dimanche, 06 décembre 2009
J’étais peintre
Un peu plus tard, à Montpellier, on est allés écouter le pianiste Alexeï Volodine. Au programme, Schubert, Chopin et Bach. Jeu puissant, raffiné, ondoyant, liquide. Les notes entraient en moi, au point de chasser tout le reste, les scories, les doutes, la fatigue. Je me laissais envahir, j’étais « dans les autres mondes » de Giono… La durée n’existait plus. Un bonheur sûr, placide et total. Bach, sa musique circulaire, enroulée jusqu’à l’infini, virevoltante, libre, profonde comme le dix-huitième. Tout se mêlait dans un ordre plus harmonieux. Ce qui était épars, je devais le rassembler. Un satori. Ma vie allait changer. Je n’avais plus le moindre doute. En fermant les yeux, je distinguais une palette, mes mains s’animaient, puisaient, tournant et retournant la matière. Cette chair du monde, c’était la mienne. Le kaléidoscope éclatait sur la toile. La couleur était en moi, depuis les débuts du monde. Je la tenais, elle m’avait rattrapé. J’étais peintre.
Raymond Alcovère, extrait de "Le Bonheur est un drôle de serpent", vient de paraître, éditions Lucie
Goya, La Forge
16:03 Publié dans Le Bonheur est un drôle de serpent | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le bonheur est un drôle de serpent, raymond alcovère, goya
samedi, 05 décembre 2009
Relisant Gens de Dublin
Relisant pour la xième fois "Les morts", la nouvelle qui clôt le recueil de James Joyce "Gens de Dublin", oeuvre de jeunesse de James Joyce, je n'en reviens pas de cet extraordinaire enchaînement de faits et de causes : John Huston l'a adaptée au cinéma, ce serait son dernier film ; et par rapport à la nouvelle, il donne encore plus de force et d'importance à la scène finale, longue et magnifique méditation sur la mort ; et c'est à sa fille Angelica Huston qu'il confia le principal rôle féminin, personnage qui fait tout basculer à la fin justement
00:15 Publié dans Histoire littéraire | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : james joyce, gens de dublin, les morts, john huston
vendredi, 04 décembre 2009
Marc Wetzel, Cogito
Marc Wetzel publie moins depuis quelques années ; c'est bien dommage. Voici un article écrit sur lui pour la revue Salmigondis en 2000 :
Voilà un écrivain qui réconcilie pensée et joie. Marc Wetzel, vient de publier son septième livre En témoin de trop aux éditions Climats. Quatrième tome des aventures de Cogito, prénom Marcel. Qui est Cogito ? Un promeneur, oisif, assez sentencieux, plutôt inquiet, très curieux, à la fois extrêmement têtu et totalement disponible. Un homme, sans spécialité ni vocation, simplement intéressé par le réel et qui sert de témoin bénévole à tout ce qui bouge. Il fait du tourisme anthropologique, à trois conditions – que ça ne soit pas trop dangereux, que la vie intérieure soit celle des autres, qu’il reste une marge de manœuvre. C’est de l’imagination concrète. Cogito n’invente que dans les situations, à même l’existence. Exemples : Lors d’une promenade près de Lunel, il croise un suicidaire blotti sur le parapet d’un pont d’autoroute. il faut l’attirer sur la terre ferme mais il n’écoute rien. Comment faire ? La solution, lui voler ostensiblement son vélo, qui traîne contre le fossé voisin : le type, indigné, sort hargneusement de sa position périlleuse pour réclamer son bien. Et un abruti de sauvé ! Ou bien il rencontre, dans les ruines d’un château haut-perché, un illuminé qui porte sur lui un « détecteur de fantômes » (une espèce de cube métallique, censé émettre des bruits spécifiques à proximité de spectres). Comment s’en assurer ? En le faisant se précipiter dans le vide : dans la minute, un fantôme se forme en contrebas, dont on verra bien si la boîte le signale ou non ! et un génie pris au mot ! Lors d’une conférence assommante, un gourou onctueux entend prouver l’inexistence du temps : Cogito se lève, dit qu’il a sur lui la preuve contraire, se fouille la braguette et brandit un poil pubien blanc. Et un tyran au piquet ! … On pourrait multiplier les exemples. On retrouve toujours la même verve, le même ton caustique, le sens du raccourci, du comique. Finalement on aime bien la façon dont Cogito va dans le réel, d’ailleurs il nous réconcilie avec lui, et surtout la leçon n’est jamais pesante, ça s’appelle la grâce, car n’est-ce pas, on peut faire semblant d’être grave, mais pour avoir de l’esprit, impossible de tricher…
Ø Vous enseignez la philosophie, mais pratiquez la fiction. Pourquoi ?
Je me sens en effet enseignant de philosophie et littérateur ; je ne suis donc ni philosophe (je suis inapte à la théorie pure, à l’essai, à l’objectivité impartiale et nue) ni critique littéraire (je ne peux démonter un style, je n’ai jamais pu comprendre comment se fait une mise en images). Mon métier consiste à enseigner des idées que je ne peux avoir, et mon hobby d’écrivain à produire les images que je ne peux pas expliquer.
ØVos livres sont constitués d’une suite de tableaux, de saynètes. Comment cette idée de la forme courte vous est-elle venue, et pourquoi ce choix ?
Par incapacité d’autre chose. Je ne suis pas romancier, pas architecte de mondes alternatifs, pas constructeur. Je ne « tiens » pas la durée, je ne prends pas en charge les structures. Je ne suis qu’un chroniqueur du fugitif, du singulier et de l’approximatif. C’est décevant, puisque c’est un monde où on n’habite pas, où on s’attarde à peine. Ce sont des événements « filants », occasions de vœux ou d’actions de grâces, mais qui n’offrent aucune assise, aucune configuration stable.
Ø Vos textes jouent, il me semble, sur des décalages constants : entre le réel et sa dérision, entre les niveaux de langage que vous utilisez, entre l’aspect quasi-symbolique de votre personnage et les situations très quotidiennes dans lesquelles il se trouve placé ; de même son nom Cogito est contrebalancé par son prénom, Marcel, etc…
Oui, le procédé essentiel est, je suppose, le contraste, qui a à la fois le spectaculaire de la contradiction et l’efficacité de l’identité. C’est le moment synthétique, où la thèse et l’antithèse sont ensemble, où Dieu et Satan arrivent dans le même avion. C’est la complexité normale des choses, leur ordinaire ambiguïté, leur routinière ambivalence. Dans le contraste, on tient un court instant ensemble le oui et le non, les mondes incompatibles. Un chauffard excité empoigne Cogito ; que dire sinon « Ah vous êtes aussi un danger privé ? … » Un chardonneret entonne un chant sublime alors qu’on a l’âme grise et triste à mourir ; comment traduire son chant autrement que par « T’inquiète, le spleeneux ; nous aussi nous causons cul, et bouffe et langes et territoire … ». Un neurophysiologiste assène que « sans cerveau, pas d’esprit » ? comment ne pas rétorquer que justement « sans esprit, pas de « sans cerveau, pas d’esprit » ? Le contraste consiste à replier d’un coup (et de préférence en y étranglant les sots et les cruels, tous les existants unilatéraux) l’accordéon d’abord totalement distendu – de l’infime infini à l’immense - de la réalité. Un monde ainsi exhaustivement convoqué, et où l’on entend résonner harmoniquement les extrêmes, optimalement contrasté, jette d’un coup hors du puzzle général les fanatiques de telle ou telle de ses pièces. C’est peu de choses, mais cette cure d’ampleur – ou d’intensité – réveille, par une sorte de tétanie métaphorique, l’habitant d’univers qui est en nous. C’est là tout ce que peut Cogito pour son lecteur (et Marcel pour lui-même) !
ØIl paraît que Ronald Reagan, quand il était président des Etats-Unis, avant de prendre une décision importante, se demandait : qu’est-ce que John Wayne aurait fait à ma place ? Faites-vous de même avec Cogito ? Autrement dit, comment cohabitez-vous avec votre personnage, n’avez-vous pas envie parfois de le tuer ?
Cogito, c’est moi, en plus intelligent et courageux. Simplement, le discernement dont il fait preuve est sans commune mesure avec celui (mince et mesquin) que je peux lui fournir. Pour parler franchement, mon masque m’étonne. Il me procure une permanence de caractère que je n’ai spontanément pas (un style obsessionnel devient magiquement une expérience cohérente !) et je m’entends dire à travers lui des choses dont la résonance écrase ma capacité de signification. Sa créature cloue le bec au créateur ; ce doit être une expérience familière à Dieu, je suppose.
Je me mets volontiers au service d’un gars plus intéressant que moi. Mon double littéraire me permet de contrôler à peu près un dédoublement sans cela délirant. Je suis en tout cas davantage son parolier que lui mon porte-voix. Ce dessaisissement de soi au profit d’un être fictif, est-ce une mutilation complaisante ? Cette vie par procuration n’a peut-être qu’une excuse : de valoir au-delà d’elle, d’être partageable. De toute façon, je n’ai pas le choix : ma muse est Marcel ou rien. Et Marcel même n’est rien.
ØA vous lire – et c’est très agréable – on éprouve un sentiment joyeux ; quel est pour vous le rapport entre joie et pensée ?
On peut opposer la joie de penser au plaisir de connaître. La connaissance capte le monde et s’approprie les relations ou lois qu’elle y trouve ; au contraire la pensée laisse être le monde, elle en rassemble les signes sans se les approprier. Elle rend justice à la complexité des choses en admirant leur fécondité. En un mot, joie et pensée sont ensemble dans le discernement de l’utilité du meilleur : on fait varier l’existence générale juste assez pour que sa compréhension puisse parfaire notre propre existence. On remarie le monde à lui-même.
Ø Trois dernières petites questions ? Travaillez-vous beaucoup votre écriture ?
Jamais. Les choses viennent ou non. Et puis cela supposerait être un bon ou utile lecteur de soi, et je ne le suis pas. Quand c’est mauvais ou fastidieux, on me le fait remarquer, et j’enlève. En un mot, je ne travaille pas mon écriture parce que je travaille avant d’écrire, pour pouvoir écrire. Ma muse, squelettique, ne transpire donc pas.
Ø Quels sont vos projets ?
Ceux de tout le monde : donner à ma liberté des objets un peu plus dignes d’elle, et plus utiles aux autres. Faire (comme on fait un point de presse) un point véritable de vie avant de la rendre. Quant aux projets littéraires, je n’en ai pas, car cela supposerait vouloir ce qui va (éventuellement) m’arriver ou me rendre visite. Or, franchement, je fais à peine ce que je peux, et en tout cas pas du tout ce que je veux !
ØSur l’île déserte, quels livres emporteriez-vous ?
Marcel vous répondrait Robinson Crusoé, je suppose ; ou un manuel de survie, ou une topographie de l’île ! Mais en vérité tout livre la ferait cesser d’être déserte.
Raymond Alcovère, pour la revue Salmigondis n° 16, 2000
http://rene.maltete.com/main.php
Photo de René Maltête
02:34 Publié dans Critique | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : marc wetzel, rené maltête
jeudi, 03 décembre 2009
Regardez cette Sainte-Victoire
Elle se lève tôt le lendemain matin, ouvre la fenêtre. L’air, étonnamment doux, palpite au dessus des toits. L’ombre est grise encore. Une trouée dans le ciel orgeat, derrière Saint-Sauveur, plus ocre et violente au fil des minutes. Des vols de moineaux décrochent des toits avant de plonger dans les rues vides. Sa vie commence. Elle a dix-huit ans, mais avec le calme en plus. Elle ira posément dans la direction fixée, une certaine forme de doute n’a plus sa place. Gaétan dort tranquillement. Ses affaires, posées sur une chaise, sont animées d’une vie propre. Elle déborde d’un amour absolu envers lui, un amour qui ne remet pas en cause sa liberté. Le plus improbable est arrivé, il en est ainsi depuis les origines de l’univers. La même sorte de probabilité qu’un Cézanne existe.
Elle l’imagine, se levant de bon matin, préparer ses pinceaux et son chevalet, partir d’un bon pas, l’esprit en ébullition, ou très placide peut-être, à travers la campagne aixoise, tenter d’en saisir le mystère, le regard fixé sur la Sainte-Victoire. Regardez cette Sainte-Victoire, quel élan, quelle soif impérieuse de soleil et quelle mélancolie le soir, quand toute cette pesanteur retombe. Les blocs étaient du feu. Il y a du feu encore en eux. L’ombre, le jour a l’air de reculer en frissonnant, d’avoir peur d’eux.
Raymond Alcovère, Le Sourire de Cézanne, éditions n & b, 2007, extrait
La Montagne Sainte-Victoire au-dessus de la route du Tholonet
(avec pin parasol)
Huile sur toile, 73 x 92 cm - c. 1904
The Cleveland Museum of Art, legs de Leonard C. Hanna, Jr., 1958.21
© The Cleveland Museum of Art
00:15 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : raymond alcovère, le sourire de cézanne, cézanne
mercredi, 02 décembre 2009
Les dix mille temps
Pour le maître parfait
Ciel et terre ne durent qu'un matin
Les dix mille temps, un seul instant.
Soleil et lune sont ses fenêtres,
Les huit déserts forment sa cour.
Ses pas ne laissent nulle trace,
Nulle part il ne demeure.
Plafond du ciel, tapis de la terre,
Il suit son bon plaisir.
Son repos : saisir la coupe.
Son mouvement : vider la cruche.
Le vin est son seul travail ;
Il ne sait rien d'autre.
Lieou Ling, 221-300
Andrea Schiavone, Jupiter séduisant Callisto
00:15 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : lieou ling, andrea schiavone
mardi, 01 décembre 2009
Un des sommets de l'oeuvre de Cézanne : Le Lac d'Annecy
1896
21:24 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cézanne, le lac d'annecy
Nos pensées
« Nos pensées sont les ombres de nos sentiments, elles sont toujours plus obscures, plus vides, plus simples que ceux-ci »
Nietzsche
Pierre-Auguste Renoir
00:15 Publié dans illuminations | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : pierre-auguste renoir, nietzsche
lundi, 30 novembre 2009
Expo en ligne de Jacki Maréchal
Pour celles et ceux qui sont loin d'Oyonnax, Jacki Maréchal a mis son expo en ligne, allez-y voir c'est superbe, ici :
http://jacki-marechal.com/crbst_278.html
GALERIE EX-LIBRIS
3, rue Brunet
01100 OYONNAX
"Quand on s'assoupit, on (c)rêve"
Expo du 20 novembre au 19 décembre 2009
10h30 à 12h30 et 14h30 à 19h30
Tous les jours sauf lundi et vendredi matin
Le dimanche de 15h à 18h30
06 16 26 07 58
00:15 Publié dans Evénements | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : jacki maréchal
dimanche, 29 novembre 2009
Sept choses que les lecteurs ne savaient pas
Marguerite Duras m'a adressé la parole avec sa voix cassée, pour me demander d'éteindre ma cigarette ; la fumée la gênait. C'était au Festival international du jeune cinéma à Hyères, en 1980. J'ai accédé à sa demande, bien sûr
J'ai traversé l'Angleterre en stop en une journée, comme une fusée, n'attendant pas plus de cinq minutes à chaque fois, sur la route de l'Ecosse, en août 1974
J'ai serré la main de Youri Garagine ; c'était à Port-de-Bouc, dans les Bouches du Rhône, ville communiste où ma mère était directrice d'école. Le cosmonaute avait un magnifique regard bleu et effectuait une tournée en France, dans les années soixante
J'ai assisté à la conférence de presse de Silvio Berlusconi, en 1985 à Paris, au Pavillon Gabriel, pour le lancement de la première chaîne de télévision privée non cryptée, la 5. C'est le président Mitterrand qui en avait pris l'initiative et donc introduit le Cavaliere en France. J'ai dû me pincer pour me dire que je ne rêvais pas quand je l'ai vu apparaître avec son air satisfait, béat et sûr de lui
J'ai décidé de me mettre vraiment à l'écriture, un soir d'octobre 1987, en marchant dans une banlieue de Paris, seul et triste, au bout de nulle part
Parmi les plus beaux paysages que j'ai vus, il y a ceux du sud marocain, découverts au printemps 1977, près de Ouarzazate, couleurs ocres et rouges des villages qui se fondent dans la montagne
Souvent, face à la Méditerranée, je me dis "c'est la mer d'Uysse" et cette idée me rend heureux
00:15 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gagarine, marguerite duras
samedi, 28 novembre 2009
Un dimanche matin sur France Inter
23:48 Publié dans Radio | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : philippe sollers, norwegian wwod, beatles
Aphorismes et périls
J'ai souvent parlé ici des Greguerias, de Ramon Gomez de la Serna, en voici quelques autres, toujours dans la traduction française de Jean-Yves Carcelen et Georges Tyras, aux éditions Cent pages :
- Nous fronçons les sourcils comme si nous voulions saisir avec des pinces quelqu'importante pensée qui nous échappe
- Lorsqu'une femme se met du rouge à lèvres devant son miroir de poche, on dirait qu'elle apprend à prononcer le O
- J'aime regarder les grands orchestres de violons car l'inclinaison mobile des nombreux archets dessine une sorte de pluie musicale
- Ce que la bicyclette a de plus beau, c'est son ombre
- C'est dans les bibliothèques que le temps est le plus uni à la poussière
- Les mouettes naissent des mouchoirs que l'on agite au départ du bateau.
- Il ne faut pas oublier que, le jour du déluge, ceux qui savaient nager se noyèrent aussi
- On voit que le vent ne sait pas lire quand il feuillette les pages d'un livre à l'envers
Photo : René Maltête
00:15 Publié dans Greguerias | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : ramon gomez de la serna, greguerias, rené maltête
jeudi, 26 novembre 2009
Toujours les contre-feux
D'une main, le président de la République veut déterrer Albert Camus pour le panthéoniser et, de l'autre, il enterre le livre et la lecture en France. Effectivement, un décret daté du 15 novembre supprime carrément le poste de directeur du livre et de la lecture au ministère de la Culture pour le transformer en directeur général des médias et des industries culturelles.
21:34 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (1)
Un article sur "Le Bonheur est un drôle de serpent"
Paru dans Midi libre le 12 novembre, ici sur le net
Le livre peut être commandé sur le site de l'éditeur :
http://www.lucie-editions.com/librairie/ouvrages/ouvrage....
en librairie
ou sur demande ici : raymond.alcovere@neuf.fr
18:44 Publié dans Le Bonheur est un drôle de serpent | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : le bonheur est un drôle de serpent
Inédits recherchés
A vos plumes ! Nous recherchons des inédits (textes courts, de création, éventuellements billets d'humeur) pour le Magazine Autour des auteurs
Envoyez vos contributions à Françoise Renaud : renaufran@free.fr
00:15 Publié dans Evénements | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : autour des auteurs, inédits
mercredi, 25 novembre 2009
sa conception du temps n’est pas la nôtre
"Il y a une guerre incessante : celle qui nous saute à la figure à travers le terrorisme déchaîné par la stratégie directe. Et une guerre plus secrète qui se mène sans cesse, pas seulement économique, et dont les Chinois sont en train de tirer la plupart des fils. Si l’adversaire est unilatéral, je vais faire du multilatéralisme ; comme l’adversaire est capitaliste, je vais devenir encore plus capitaliste. Pratiquer la défensive stratégique, utiliser la force de l’adversaire pour la retourner en ma faveur. Le Chinois s’appuie d’instinct sur la compréhension interne de ce que l’adversaire ose, veut, calcule et est obligé de faire. Il mène une guerre défensive qui peut durer une éternité : sa conception du temps n’est pas la nôtre. Cette guerre peut se prolonger indéfiniment pour user l’adversaire. Elle ne cherche pas l’anéantissement, mais la domination."
Philippe Sollers, Guerres secrètes, Editions Carnets Nord, 2007
01:28 Publié dans illuminations | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : philippe sollers, chine
mardi, 24 novembre 2009
Herbier des jours, de Progreso Marin
Rarement la poésie atteint cette intensité, cette sobriété, cette retenue, tout en laissant libre cours au rêve et à la méditation. C'est ce que réussit Progreso Marin, dans cet Herbier des jours. Ecoutez plutôt :
HISTOIRE
Je suis marié
A l'Histoire,
Avec celles
Et ceux
Qui ont jeté
Des paquets
De cigarettes
Par dessus
Les barbelés.
"En el somni del temps doloros"
Salvador Espriu
Dans le matin
Droite
La falaise
De la Franqui.
L'éblouissement
De l'enfance
Entre mer
Et étangs.
Dans la guarrigue
Les résidences
De l'ennui
S'alignent
Comme des urnes
Funéraires.
Au loin
Les Corbières
Sévères
Disent
La permanence.
Des cyprès
Se serrent
Pour résister.
La mer
Comme une peau
De taureau
Brillante.
Des fantômes
Courent
Sur le sable
Et dans ma tête.
Les maisons
Pauvres
De Port-Bou
Engoncées
Dans la suie
Et le linge
Aux fenêtres
Pleurent
Les absents.
Progreso Marin est né à Toulouse. Poète, il a déjà publié Ecluse/buée en 2005. Il travaille aussi sur la mémoire de l'exil espagnol et a publié trois ouvrages : Dolores, une vie pour la liberté, Exil, et récemment : Exilés espagnols, la Mémoire à vif (éditions Loubatières)
Editions n & b, novembre 2009, 92 pages, 12 €
00:15 Publié dans Critique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : progreso marin, herbier des jours
lundi, 23 novembre 2009
Une affection
Plus je vieillis et plus je trouve qu'on ne peut vivre qu'avec les êtres qui vous libèrent, qui vous aiment d'une affection aussi légère à porter que forte à éprouver.
Albert Camus, Correspondance avec René Char, 1946-1949, Gallimard.
00:10 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : albert camus
dimanche, 22 novembre 2009
Le Maître est énorme et nu
« Car l’Adversaire est inquiet. Ses réseaux de renseignement sont mauvais, sa police débordée, ses agents corrompus, ses amis peu sûrs, ses espions souvent retournés, ses femmes infidèles, sa toute-puissance ébranlée par la première guérilla venue. Il dépense des sommes considérables en contrôle, parle sans cesse en termes de calendrier ou d’images, achète tout, investit tout, vend tout, perd tout. Le temps lui file entre les doigts, l’espace est pour lui de moins en moins un refuge. Les mots « siècle » ou « millénaire » perdent leur sens dans sa propagande. Il voudrait bien avoir pour lui cinq ou dix ans, l’Adversaire, alors qu’il ne voit pas plus loin que le mois suivant. On pourrait dire ici, comme dans la Chine des Royaumes combattants, que « même les comédiens de Ts’in servent d’observateurs à Houei Ngan ». Le Maître est énorme et nu, sa carapace est sensible au plus petit coup d’épingle, c’est un Goliath à la merci du moindre frondeur, un Cyclope qui ne sait toujours pas qui s’appelle Personne, un Big Brother dont les caméras n’enregistrent que ses propres fantasmes, un Pavlov dont le chien n’obéit qu’une fois sur deux. Il calcule et communique beaucoup pour ne rien dire, l’Adversaire, il tourne en rond, il s’énerve, il ne comprend pas comment le langage a pu le déserter à ce point, il multiplie les informations, oublie ses rêves, fabrique des films barbants à la chaîne, s’endort devant ses films, croit toujours dur comme fer que l’argent, le sexe et la drogue mènent le monde, sent pourtant le sol se dérober sous ses pieds, est pris de vertige, en vient secrètement à préférer mourir. »
Philippe Sollers, Eloge de l’Infini. Janvier 2001
00:15 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philippe sollers
samedi, 21 novembre 2009
Camus au Panthéon, vu par Mykaïa
12:49 Publié dans humour | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : albert camus
Cela fera l'affaire
"Il arrive souvent qu'à partir d'un certain âge, l'œil d'un grand chercheur trouve partout les éléments nécessaires à établir les rapports qui seuls l'intéressent. Comme ces ouvriers ou ces joueurs qui ne font pas d'embarras et se contentent de ce qui leur tombe sous la main, ils pourraient dire de n'importe quoi : cela fera l'affaire." :
Marcel Proust.
Photo : Gildas Pasquet
00:15 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marcel proust, gildas pasquet