dimanche, 06 juillet 2014
La prose de F. Scott Fitzgerald
« Ses yeux étaient remplis de jaune et de lavande, jaune pour le soleil à travers les stores jaunes et lavande pour la couette gonflée comme un nuage flottant mollement sur le lit. Soudain elle se souvint de son rendez-vous et, les bras jaillissant de la couverture, elle enfila un négligé violet, rejeta sa chevelure en arrière dans un mouvement circulaire de la tête et fondit dans la couleur· de la pièce. »
F. Scott Fitzgerald
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Sourire
« Elle lui fit un sourire de côté, d’une moitié de visage comme une petite falaise blanche. »
F. Scott Fitzgerald
06:59 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : f. scott fitzgerald
lundi, 30 juin 2014
Le monde se passe très bien d'écrivains!
On est célibataire, flottant, dépensier, rêveur. On est persuadé que la vie n'a aucun sens et ne va nulle part. On se retrouve marié, sommé d'avoir des opinions et un plan d'installation, paternisé, chronométré, poinçonné. Écrivain? Qu'est-ce que c'est que ça? Le monde se passe très bien d'écrivains!
Philippe Sollers, Grand beau temps
00:20 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philippe sollers
mardi, 03 juin 2014
Fuite
"Ce n'est pas le temps qui fuit, mais la présence éveillée dans le temps."
Ph Sollers, Carnet de nuit
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jeudi, 29 mai 2014
MANUEL DE CONTRE-FOLIE
Vous êtes fou, c’est entendu, mais vous n’avez aucune raison de préférer la folie des autres à la vôtre. Celle des autres, vous la connaissez depuis l’enfance, elle est lourde, elle vous suit partout, elle essaye, par tous les moyens, de briser la vôtre, que vous avez la folie (c’est le mot) de trouver enchantée, légère.
Vous avez l’intention d’être clair, précis. Il faut que ce Manuel puisse vous servir en toutes circonstances, dans les situations les plus imprévues. La folie est un tourbillon continu, la contre-folie doit être un contre-tourbillon constant. Poison ? Contre-poison. Blessures ? Cicatrices, Cauchemars ? Extases programmées. Mauvaise humeur ? Rires. Problèmes d’argent ? Augmentez les dépenses.
La folie vous guette ? Vous la devinez. Elle s’exprime ? Vous faites le mort. Elle augmente son bruit ? Montez la musique. Elle rentre chez vous comme si elle était chez elle ? Sortez, disparaissez, revenez. Inutile d’opposer à la folie la raison, le bon sens, la décence, la compassion, le respect, le souci de l’humanité ou de l’autre. Par définition, même avec des discours « humains », la folie est furieuse. Elle n’en a pas l’air, mais ça va venir. Cet orage vous surprend ? Cette agression vous gêne ? Vous avez des progrès à faire, c’est urgent.
Plus vous vous sentez à l’aise avec votre folie, plus la folie générale est désorientée par votre existence. À l’aide de votre contre-folie, vous lisez dans les pensées des fous qui se croient normaux. Ils se répètent, vous divaguez. Ils insistent, vous changez de sujet. Ils vous accablent de clichés, vous leur récitez des poèmes.
Le silence réprobateur des fous vous fatigue. Vous en rajoutez donc dans la gratuité, la désinvolture, le narcissisme épanoui. Vous blasphémez allègrement les poncifs moraux, vous dites du mal de toutes les religions et des plus grands philosophes. Avec les folles, pas d’efforts à faire : elles parlent tout le temps, c’est commode. Vous ponctuez de temps en temps, tout en pensant intensément à tel détail de tableau ou de paysage. Vous faites semblant d’être là, vous êtes dehors, et vous oubliez instantanément ce qu’elles viennent de dire. Supposons que vous soyez écrivain : vous avez une phrase à finir, c’est le moment, en plongée, d’écouter mieux sa cadence. Malgré le bruit, ça s’écrit. Comme elles ne lisent rien, vous êtes tranquille.
La folie fait du cinéma, votre contre-folie est astrophysique. La matière noire vous émeut, la découverte du boson vous comble, le néant marche avec vous dans la rue. Vous aimez les enfants, dont la contre-folie est évidente. On tente sans arrêt de les rendre fous, mais ils multiplient les incartades, les jeux de mots idiots, les maladies, les chagrins rentables. Ils sont là pour aggraver la folie de leurs parents, des éducateurs, des maniaques sociaux. Ces emmerdeurs-nés enfantins sont coriaces. Vous êtes comme eux, mais, vous, vous allez le rester contre vents et marées. Ils grandissent, vous rapetissez, ça y est, vous êtes maintenant un atome invisible. Pas besoin de dissimuler, vous êtes caché.
Vous êtes récusé, gardez-vous d’accuser. Vous savourez ce rejet, cet hommage. Plus la folie vous oublie, plus elle s’inquiète de son oubli. Elle sent que son temps est compté, pesé, divisé, alors que vous avez atteint la durée. La folie a besoin de se renouveler pour se répéter, la contre-folie, au contraire, est immuable, comme les mathématiques ou les pyramides sur lesquelles passe soudain un vent frais. Vous êtes dans le désert, servi par des anges. Votre retraite est introuvable, les oiseaux et les papillons vous aiment. La lune, toutes les nuits, vous sourit.
Encore des factures, des rappels à l’ordre, des chèques à remplir, des prélèvements en tous genres ? Vous payez selon votre contrat avec la folie. Après tout, c’est votre employée. Ne soyez pas grossier ni méprisant avec elle, le mépris est un mauvais placement, une faiblesse qu’il faut éviter. Vous ne méprisez personne, vous comprenez. Vous payez vos impôts, vos dettes, vous êtes un citoyen irréprochable, un virtuose de duplicité. Vous ne mentez pas, vous omettez. La vérité est un manteau sombre, une déesse que vous avez rencontrée. Dans votre vie, au fond très simple, les calculs se font d’eux-mêmes, les chiffres se débrouillent seuls, l’ordre règne sans avoir à se prononcer. Vous avez faim ? Vous mangez. Soif ? Vous buvez. Sommeil ? Vous dormez.
Philippe Sollers, Médium, Gallimard, 2014, p. 45-48.
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mercredi, 14 mai 2014
La découverte d'un vide créateur
Dans le rapport entre la Chine et le baroque, il y a cette indication que les deux perturbent, en l'englobant, toute l'histoire de la métaphysique. Et cela par le fait qu'il y a introduction brusque de la découverte d'un vide créateur, qui fonctionne aussi bien par l'évacuation de toutes les formes que par leur exaltation.
Philippe Sollers, Grand beau temps
21:48 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philippe sollers
lundi, 21 avril 2014
Le mouvement perpétuel
"[Qui] aurait trouvé le secret de se réjouir du bien sans se fâcher du mal contraire aurait trouvé le point. C’est le mouvement perpétuel."
Pascal (exergue du dernier roman de Philippe Sollers, Médium)
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lundi, 17 mars 2014
Le huitième jour
"J'écris parce que j'ai l'impression ou le sentiment que le monde est inachevé, comme si Dieu, qui a créé le monde en six jours et qui s'est reposé le septième, n'avait pas eu le temps de tout faire. Je trouve le monde trop petit, la vie trop courte, le bonheur pas assez bonheur. J'écris pour achever le monde, pour ajouter à la création le huitième jour."
Antonine Maillet
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jeudi, 13 mars 2014
Paradis
"J'ai écrit des récits. Le récit m'est indispensable pour atteindre indirectement à la poésie. C'est la poésie que je cherche, c'est-à-dire la création de fictions, tirées du plus profond de l'âme et dont la vie fictive, observée, analysée avec soin, me permette d'étudier et de connaître cette âme elle-même, par cette sorte de reflet.
Or pour que ces reflets soient bien vivants, pour qu'ils s'animent, il faut mettre l'âme en présence de ces points magnétiques du monde qui, par leurs radiations, excitent le plus intensément les puissances intérieures : la terre, les bêtes, le vent, l'eau, le feu, l'air, certaines créatures privilégiées, intermédiaires étranges entre nous et l'inconnu.
C'est la quête des secrets. Or que nous laissent supposer ces secrets multiples, sinon que tout se tient, que tout voit, que tout communique, que tout a un sens, et qu'on erre à ne pas croire en cette unité de la vie ; bien plus que vie et mort sont deux branches d'un même tronc, et que finalement tout aboutit à l'unité de l'être, qui, lui-même, fondu dans le non-être, est mystérieusement contenu par Dieu. Tout mythe poétique est un mythe religieux.
Chercher à travers ces secrets, découvrir les communications invisibles au commun c'est aller vers ce que j'appelle le Paradis terrestre."
Henri Bosco - Lettre à Jean Steinmann, Pentecôte 1948, in "Jean Steinmann, Littérature d'hier et aujourd'hui" - Desclée de Brouwer, 1963.
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mardi, 25 février 2014
Avec toi
"Je voudrais me promener avec toi, par un jour de printemps, sous un ciel un peu gris, avec quelques feuilles mortes restant encore de l'année précédente et tourbillonnant dans le vent, par les rues d'un faubourg de la ville, et que ce soit un dimanche. Dans ces banlieues jaillissent souvent des pensées mélancoliques et grandioses ; et à certaines heures flotte une sorte de poésie qui fait vibrer ensemble les cœurs de ceux qui se désirent.
En outre, naissent d'indicibles espérances, encouragées par les horizons infinis qu'on découvre au-delà des maisons, par les trains qui s'enfuient, et les nuages qui accourent du grand nord. Nous nous enlacerions simplement les mains et irions d'un pas léger, tenant des discours insensés, stupides et chaleureux. Jusqu'à ce que s'allument les réverbères et que les immeubles délabrés suintent les histoires sinistres de la ville, les aventures, les romances si longtemps attendues.
Alors nous demeurerions silencieux, nous tenant toujours par la main, car les âmes n'ont pas besoin de mots pour se comprendre. "
Dino Buzzati
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mardi, 18 février 2014
Dans son être même
"Il fallait qu’un bâton de chaise fût bien fait. C’était entendu. C’était un primat. Il ne fallait pas qu’il fût bien fait pour le salaire ou moyennant le salaire. Il ne fallait pas qu’il fût bien fait pour le patron ni pour les connaisseurs ni pour les clients du patron. Il fallait qu’il fût bien fait lui-même, en lui-même, pour lui-même, dans son être même."
Charles Péguy
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dimanche, 16 février 2014
Les jours sont ronds
«Les jours commencent et finissent dans une heure trouble de la nuit. Ils n’ont pas la forme longue, cette forme des choses qui vont vers des buts : la flèche, la route, la course de l’homme. Ils ont la forme ronde, cette forme des choses éternelles et statiques : le soleil, le monde, Dieu. La civilisation a voulu nous persuader que nous allons vers quelque chose, un but lointain. Nous avons oublié que notre seul but, c’est vivre et que vivre nous le faisons chaque jour et tous les jours et qu’à toutes les heures de la journée nous atteignons notre but véritable si nous vivons. Tous les gens civilisés se représentent le jour comme commençant à l’aube ou un peu après, ou longtemps après, enfin à une heure fixée par le début de leur travail ; qu’il s’allonge à travers leur travail, pendant ce qu’ils appellent « toute la journée » ; puis qu’il finit quand ils ferment les paupières. Ce sont ceux-là qui disent : les jours sont longs. Non, les jours sont ronds.»
Jean Giono
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mardi, 11 février 2014
Rien que leur âme libre
10 février 1898, naissance de Joseph KESSEL, journaliste et grand romancier français qui sut nourrir son œuvre de sa vie aventureuse et héroïque. Profondément engagé dans la Résistance au nazisme, Kessel composera, avec Maurice Druon, les paroles du chant des partisans, hymne de la résistance. Ses romans, en particulier l’Equipage, Belle de jour, l’armée des ombres, Terre de feu, le Lion, connaîtront – et connaissent encore – un immense succès et de nombreuses adaptations au cinéma. La plupart de ses livres sont disponibles aux éditions Folio.
« Ces gens auraient pu se tenir tranquilles. Rien ne les forçait à l’action. La sagesse, le bon sens leur conseillait de manger et de dormir à l’ombre des baïonnettes allemandes et de voir fructifier leurs affaires, sourire leurs femmes, grandir leurs enfants. Les liens matériels et les biens de la tendresse étroite leur étaient ainsi assurés. Ils avaient même pour apaiser et bercer leur conscience, la bénédiction du vieillard de Vichy. Vraiment, rien ne les forçait au combat, rien que leur âme libre. »
L’armée des ombres. 1943
01:25 Publié dans Grands textes, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : joseph kessel
dimanche, 02 février 2014
Certaines nuances d'ordre émotionnel
Quant aux dieux, comment les reconnaître ? Les écrivains ont toujours été, en cela, heureusement sans préjugés. ils ont toujours agi comme s'ils sous-entendaient une observation lumineuse d'Ezra Pound : "Aucune métaphore plus appropriée n'ayant été trouvée pour traduire certaines nuances d'ordre émotionnel, j'affirme que les dieux existent." L'écrivain est celui qui voit ces "nuances d'ordre émotionnel".
Roberto Calasso, La littérature et les dieux
Jan Gossaert, Danaé, 1527
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jeudi, 30 janvier 2014
Pour éviter toute révolte
02:32 Publié dans Grands textes, Politique | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : aldous huxley
mercredi, 29 janvier 2014
Venise
Venise ne sera jamais tout à fait une ville comme les autres et nous n’en partagerons jamais tout à fait le charme. Sans doute y apportons-nous toujours un peu plus que ce qui nous conduit dans une autre ville ; et cela même nous isole et nous divise. Cette passion singulière qu’exige Venise, n’est jamais assez vraie, n’est jamais assez grande, parce qu’elle est de la finalité d’un voyage ; ce voyage fût-il celui de la vie. Pour s’accorder à Venise il faudrait ne pas venir y chercher ce qui s’y trouve, et sans doute d’abord ne pas trouver ce que l’on y apporte. Venise ne nous propose pas une rencontre mais une séparation ; non pas « une arrivée », mais un départ. Le « charme » de Venise tient aussi pour nous à ce qu’installés dans nos certitudes, dans nos inquiétudes, dans nos passions, nous n’y arriverons jamais. Nous n’y arriverons jamais faute de savoir quitter l’espace et le temps qui nous quittent. C’est me semble-t-il ce dont témoignent, en clichés, cet ensemble de souvenirs poétiques : je ne suis pas amoureux de Venise, je suis amoureux d’une lumière, d’un éclat, d’un départ, je suis « amoureux de l’amour ».
Marcelin Pleynet
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lundi, 27 janvier 2014
Limbe bibliothèque
"Il y a dans la littérature, une Limbe bibliothèque où se tiennent en rangs sur les étagères des livres qui n’ont pas été écrits. On allait les écrire. Invisibles la plupart du temps ces livres sont pleurés comme des dieux perdus par des lecteurs inconsolables. Le livre que Joyce n’a pas écrit. Le livre que Stendhal avait envie d’écrire. Le dernier livre de Dostoïevski. Ils me manquent. Je vous attends. Vous alliez être. L’aurait-il jamais écrit, Kafka, son livre du saint des saints ? Et Shakespeare était gros d’un seigneur dont le soleil halète parmi les planètes. "
Hélène Cixous
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vendredi, 24 janvier 2014
Comment écrire une histoire géniale : huit trucs de Kurt Vonnegut
03:21 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : kurt vonnegut
mardi, 21 janvier 2014
Deux ou trois images simples
"Une oeuvre d'homme n'est rien d'autre que ce long cheminement pour retrouver par les détours de l'art les deux ou trois images simples et grandes sur lesquelles le cœur, une première fois, s'est ouvert."
A. Camus - L'envers et l'endroit (Préface)
19:21 Publié dans Grands textes, illuminations | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : albert camus
dimanche, 05 janvier 2014
Le point
« Qui aurait trouvé le secret de se réjouir du bien sans se fâcher du mal contraire, aurait trouvé le point. C’est le mouvement perpétuel. »
PASCAL
Exergue de "Médium" de Philippe Sollers, vient de sortir
19:29 Publié dans Grands textes, illuminations | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pascal