jeudi, 03 mars 2005
Cézanne
Les objets se pénètrent entre eux... Ils ne cessent pas de vivre, comprenez-vous... Ils se répandent insensiblement autour d'eux par d'intimes reflets, comme nous par nos regards et par nos paroles
Cézanne
08:43 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (0)
Miro
Les tableaux de Miro sont des symphonies, des hymnes à la vie. Ciel bleu, céruléen, nuages rouges. Il se voulait catalan universel. Miro, étonnant de simplicité, de clairvoyance, avouant que les mots n’étaient pas sa spécialité. Pourtant : Les choses suivent leur cours naturel. Elles poussent, elles mûrissent. Il faut greffer. Il faut irriguer, comme pour la salade. Ca mûrit dans mon esprit. Aussi je travaille toujours énormément de choses à la fois. Et même dans des domaines différents : peinture, gravure, lithographie, sculpture, céramique. Avec cette idée, de l’impression globale du tableau, qui revient. Pour moi, un tableau doit être comme des étincelles. Il faut qu’il éblouisse comme la beauté d’une femme ou d’un poème. Qu’il ait un rayonnement... Plus que le tableau lui-même, ce qui compte, c’est ce qu’il jette en l’air, ce qu’il répand. Miro, magicien, avec son désir d’être au plus près de la vie, des objets de tous les jours, ramenant de ses promenades sur la plage de Majorque des bouts de bois, de ficelle. Il voulait un art populaire et l’avait trouvé finalement. Partout du rouge, du bleu, de l’indigo, du jaune, la passion, voilà le catalan universel.
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mercredi, 02 mars 2005
La poésie
L’art se situe à l’écart de tout, et nous y transfère immédiatement. La poésie n’est pas un art. Elle est un état. Constamment provisoire et fragile. A l’écart des mots. A cet état il peut se faire que le poème permette d’accéder. Mais cet état n’est pas inscrit dans le poème. Il est en nous. Illisible et muet.
Gil Jouanard
02:25 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (3)
Dire la vérité ?
Les écrivains sont des fabulateurs qui essaient désespérément de dire la vérité. C'est très difficile, de dire la vérité, si difficile qu'il faut passer par le mensonge, ou quelque chose qui y ressemble
Georges-Olivier Châteaureynaud
02:13 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
Où est le réel ?
Le miracle du langage, ce n’est point de traduire une émotion actuelle, ni une chose présente. C’est d’évoquer des émotions possibles et des choses absentes. Il révèle la vertu qui lui est propre dans l’absence beaucoup mieux que dans la présence : et de l’absence même, il fait une présence plus subtile. Le propre du langage, c’est de représenter ce qui n’est pas plutôt encore que ce qui est. Il applique ma pensée au passé et au futur. Il donne une réalité à l’objet du souvenir et à l’objet du désir. Il n’est pas tout à fait faux de dire que le langage est créateur, il consiste moins à nommer les choses qu’à reproduire leur image quand elles ont disparu, ce qui est proprement les rappeler à la lumière, c’est-à-dire à l’existence.
Plus qu’aucun objet, qu’aucune image ou qu’aucune émotion, il possède une puissance d’évocation qui est véritablement sans limites : car il nous délivre du lieu et de l’instant et il associe à une infinité d’expériences réalisées une infinité d’expériences imaginées. Cela est vrai même des noms propres : ce qui leur donne un prestige qui dépasse souvent celui de la personne de chair et d’os.
Louis Lavelle
00:15 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
L'innocence
L’innocence est peut-être malgré tout ce qui perce le mieux dans ce monde à travers le tumulte des éléments
Kafka
00:05 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (2)
mardi, 01 mars 2005
En vue de quels mirages...
Ce que l’on sait des autres est peu de chose. Ce que l’on croit de soi ne vaut guère mieux : quelques pétales, un brin d’acier, l’incertitude de l’instant où, tout compte fait, il faudra bien sourire.
La lumière imite l’inouï
Aux fins de quels éclats ?
En vue de quels mirages…
Roch-Gérard Salager
02:03 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
Une promenade dans la vallée de l'Ouche
Une promenade dans la vallée de l’Ouche m’a amenée dans un village de l’arrière côte. On n’imagine pas autrement un vrai village. Rien n’y manque : ni les vallonnements, ni le château, ni le clocher aux tuiles vernissées qui donne des envies de dessiner, ni, surtout, le « vieux tilleul ». Avez-vous remarqué qu’un tilleul ne peut être que vieux ? Mais celui là, en juillet, c’est l’âme du village par son feuillage touffu, son odeur entêtante et le bourdonnement intense de ses fleurs habitées d’abeilles.
Jean Azarel
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lundi, 28 février 2005
Montpellier
Nuit claire, temps radouci. Instant magique juste avant le sommeil où l’esprit se promène libre, sans attache particulière, éloigné des pesanteurs de la journée. Jetée d’étoiles dans le ciel bleu nuit. Il fait presque toujours doux à Montpellier. Soudain il comprend à quel point il aime cette ville. Pas de façon exclusive, non, pour son ouverture, son absence, sa légèreté, cette façon de ne pas être vraiment à soi. Rien ici de pesant, de trop enraciné. Liberté indispensable.
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dimanche, 27 février 2005
La double mémoire de David Hoog
C’est dans l’ombre souple, furtive et inquiétante de Kafka que nous emporte Roland Fuentès avec ce court roman. Un Kafka solaire, lumineux, nourri de cette lumière du sud qui sera une si grande révélation pour Nietzsche. L’histoire se passe entre Marseille, Cassis et la Ciotat. Et ce n’est pas une des plus minces réussites de ce roman que ce décalage constant entre cette lumière dionysiaque et l’ombre inquiétante du scénario qui déroule méthodiquement ses méandres, imperturbable. Car il s’agit bien d’un combat, que n’aurait pas renié Kafka. Un combat entre deux mémoires, entre deux âmes qui se disputent un corps. Le roman est construit en spirale, on est pris dans son tourbillon. Encore un paradoxe, assumé et réussi, alors que le temps est le nœud de l’affaire, tout se passe dans un présent intemporel, presque magique, en phrases courtes, retenues, et en même temps empreintes de lyrisme. La calanque est déserte encore au milieu de la matinée. Seuls quelques enfants l’animent, petites flammèches posées sur les roches. Des mouettes silencieuses couvrent la paroi du grand tombant. La mistral a glacé la mer en quelques jours, aucun nageur n’en trouble plus l’étale aux reflets argentés. Le territoire des mouettes. Et des fous. (...) A travers le Velux, de grands oiseaux projettent leur ombre sur le sol. Des valses lentes naissent là, de leurs mouvements alanguis.On jurerait que des créatures montées du fond du parquet reprennent vie à la surface de la mer et du ciel.(...) David Hoog attend, installé à la terrasse du Marigny. C'est une sensation étrange que d'attendre, pour le plaisir sans doute, un événement encore indistinct. Peut-être le flot des passants qui s'épaissit, avivant son chatoiement, lui offrira-t-il l'image attendue.
Editions A contrario. Roland Fuentès a reçu le prix Prométhée de la nouvelle en 2003 pour « Douze mètres cubes de littérature » (éditions du Rocher).
Il dirige la revue Salmigondis.
00:10 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (3)
vendredi, 25 février 2005
Aller simple
Partir. Train d’enfer. Aller ; retour m’effraie ; chemin biffé, replié sur lui-même, comme moi. Non. Laisser aller le fleuve d’images bordant la vitre au rythme des feuillées, fragiles papillons végétaux accrochés à leurs branches, comme moi, mais sans les ailes. Ce train, travelling de mon immobilité, joie d’un effort annulé, puissance de la machine irriguant mon corps de coton. Je suis un homme-fauteuil, et cette baie vitrée, si vaste que ses berges m’échappent, est un espace de jeu où mon regard s’ébat, libre et léger. Ma vie se fait vision. Le rêve alors m’emporte. Aller simple. Je deviens ce héron qui en un saut à peine se pique en haut d’un chêne, tel un soldat du ciel guettant l’attaque de l’ombre. Je virevolte entre les lourdes vaches, les silos et les mares. Mon crapaud aux inutiles roues devient tapis d’Orient. Mes yeux écarquillés, que des nerfs agacés ne peuvent contenir, creusent dans les nuages des abris de fortune. Je m’y vautre en chantant, je chahute les dieux !
Jean-Jacques Marimbert
09:55 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (4)
Caravaggio
De notre terrasse à Rome on voyait le Château Saint-Ange et le meilleur moment pour faire l’amour c’est quand la lumière déclinait et restait agrippée aux pierres, un instant d’éternité. Dans les palpitations de l’air et les odeurs mauves des jacarandas, adagio sostenuto, la Sonate au clair de lune était le moment de la plus grande dispersion, quand tout semble retenu dans le ciel, déposé comme un rideau de théâtre, lueurs pourpres, lisses et fauves dans le lointain, reflets ondoyants sur les toits, les murs, les visages. Temps figé, saisi. La beauté, improbable, présente et ramassée. Dans cette ville minérale, de méandres, replis, fuites, retournements, on poursuivait d’église en palazzo les tableaux de Caravaggio, pure merveille, absolue présence. Il y avait ce cou, miracle d’équilibre, douceur et étrangeté, ce cou si sublime de la Madone de Lorette à Sant’ Agostino, impossible de s’en détacher et cette bibliothèque en forme de navire juste à côté où on est entrés tous les deux, comme dans l’univers magique du Nom de la rose. Tu cherchais Les trois âges de la femme de Gustav Klimt, on l’a découvert finalement sur les bords de la Villa Borghese, perdu dans un musée immense, froid et un rien lugubre. Jamais les reproductions ne le montrent en entier, la vieille femme cache ses yeux, devant le visage rayonnant de la maternité.
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jeudi, 24 février 2005
Une limite consciente
Plus le corps est une limite consciente, plus l'esprit est illuminé
Sollers
07:19 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (1)
mercredi, 23 février 2005
Un des plus beaux débuts...
De roman, c’est celui de Point de lendemain, de Vivant Denon, écrit en 1812. Et la suite de ce court roman est du même niveau…
J’aimais éperdument la comtesse de * ; j’avais vingt ans, et j’étais ingénu ; elle me trompa, je me fâchai, elle me quitta. J’étais ingénu, je la regrettai ; j’avais vingt ans, elle me pardonna : et comme j’avais vingt ans, que j’étais ingénu, toujours trompé, mais plus quitté, je me croyais l’amant le mieux aimé, partant le plus heureux des hommes.
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mardi, 22 février 2005
Il n'y a pas de grandes personnes
Un vieux prêtre que j’interrogeais pour savoir ce qu’il retenait de toute une vie de confesseur, quelle leçon il tirait de cette longue familiarité avec les âmes me répondit : je vous dirai deux choses : la première, c’est que les gens sont beaucoup plus malheureux qu’on ne le croit ; la seconde, c’est qu’il n’y a pas de grandes personnes.
Malraux
00:10 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 21 février 2005
Jusqu'à l'infini
Un mobile qui est en A ne pourra jamais atteindre le point B, parce qu’il devra auparavant parcourir la moitié de la distance qui les sépare, et auparavant la moitié de la moitié et d’abord la moitié de cette moitié de cette moitié, et ainsi jusqu’à l’infini
Borges
14:37 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (16)
Glisse
Le monde réel, ce monde soi-disant réel
C’est simplement quelque chose dont on doit s’accommoder
Comme tout le monde
La réalité est une corde raide
Si je glisse, je me dis tiens, c’est intéressant
La plupart du temps, je glisse
Dans cette version fugitive, cet éclair.
De Kooning
14:25 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (1)
L'art
Corps aimés, retrouvés, sommeil, jouissance sans fin du sommeil - il est l’amour, mesure parfaite et réinventée – poésie, peinture, sculpture, notes étirées, soufflées, susurrées, Mozart est là, avec nous, en creux, jusqu’à la fin des temps, il a existé, c’est possible, il y aura d’autres Mozart, passant comme des météores, n’en déplaise aux censeurs, plaisir, voix mêlées, psalmodiées, venues des profondeurs… Infamie, retournements, troubles du langage, prose incandescente, plaisir encore, chaque seconde qui passe me rapproche du monde, plus je vis, plus je m’approche de la vie… Quand le monde sera réduit en un seul bois noir pour nos quatre yeux étonnés, - en une plage pour deux enfants fidèles, - en une maison musicale pour notre claire sympathie, - je vous trouverai. Diagonale vers l’infini, c’est possible, cela s’appelle l’art…
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dimanche, 20 février 2005
Anti
Tout ce qui est anti reste inextricablement pris au sein de ce contre quoi il entreprend de se battre
Heidegger
15:07 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (4)
Un secret
Un secret n’est secret que si n’apparaît même pas le fait que, là, existe un secret
Heidegger
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