Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

jeudi, 29 novembre 2007

Ondoiements et frissons

c9d1a3d92c0fb234c0961fc6442f6d6f.jpgba8ecb1a018d3bcc407057f4159cf7c7.jpg884835332d81429dd08c41995c9b3930.jpgPhotos de Jean-Louis Bec

21:38 Publié dans Photo | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : photo, Jean-Louis Bec

Un cri, de Pierre Autin-Grenier, prix Léo Ferré 2007, remis par la ville de Grigny

4c688d3d83c226bd95412f223842e75d.jpg« Et maintenant, comme je l'ai dit au début, nous pressions le pas sous la Grande Ourse. Dissipée notre frayeur nous avancions, résolus, comme aspirés par l'horrible trou borgne de la nuit, en direction de cette interminable agonie. En somme on marchait à la recherche d'un cri. L'essentiel n'était-il pas de trouver d'où cela venait ? Après, nous verrions bien...» Une nuit d'hiver, les habitants d'une ferme partent dans les bois pour découvrir l'origine d'une inquiétante plainte, « du côté des collines ».

Accompagnés de l'éclat d'une lune « étrangement écarlate », de lanternes, de chiens, et du souvenir du « crime des Granges Rouges », les hommes s'enfoncent dans l'obscurité. « Il se passe, en décembre, des faits bien étranges à l'écart de nos bourgs »... Le cri devient grognement, ricanement ; malgré la nuit et l'inextricable maquis, les bruits de bête et les craquements d'arbres, le curieux cortège ne cèdera pas à la panique, et sera bientôt à deux doigts de percer le mystère...

La première parution d'Un cri, dans le recueil de nouvelles L'Ange au gilet rouge (aux éditions Syros) a marqué un tournant dans l'oeuvre de Pierre Autin-Grenier : l'auteur de poésie « noire » nous a offert, depuis, des récits où se côtoient le fantastique et le surréalisme (Toute un vie bien ratée, L'Éternité est inutile). Avec l'habileté d'un conteur à la veillée au coin du feu, Pierre Autin-Grenier sait manier à la perfection une langue gouailleuse et musicale, populaire et élaborée à la fois. Le rythme des scènes entretient merveilleusement le suspense, jusqu'au tableau final d'une beauté rare, une « vision d'apocalypse » dévoilée dans la toute dernière phrase.

Un cri : nouvelle de Pierre Autin-Grenier, illustrations de Laurent Dierick, préface de Dominique Fabre Collection « Texte au carré », 14x14 cm, 36 pages, Prix : 9 euros

-CADEX EDITIONS 19 rue d'en Quissé Russan 30 190 Sainte-Anastasie Tél/Fax : 04 66 22 47 74 cadex@cadex-editions.net

http://www.cadex-editions.net

mercredi, 28 novembre 2007

Des paroles

0ac53bff6c46ca32471e44bed357ee02.jpg"Ce pour quoi nous trouvons des paroles, c'est que nous l'avons dépassé"

Nietzsche, Crépuscule des idoles

Photo : Nina Houzel

mardi, 27 novembre 2007

Latérite, de Jean-Jacques Marimbert

81ba7284914eb516a95b4b2b9e803dea.jpgJe me disais, n'y va pas. Tu n'en reviendras pas, trop loin, de tout, de tes mots, de tes chemins. Tu cours les yeux fermés, n'y va pas. Je me disais aussi : ce sont des chemins trop anciens, beaucoup trop, tu vas t'y casser le nez. D'un haussement d'épaule j'ai fait le fier, celui qui a lu Conrad, Bouvier ou je ne sais qui, quand je dis lu, bouffé oui, vite mâché, sans voir que le fil tendu entre les pages me piégeait, me ligotait les pieds. N'y va pas. Tu n'es pas bien ici ? La Garonne, les briques, le tremble au fond du jardin, trois oiseaux, le puits, tari mais un puits, des iris, l'été finissant. Je n'en ai fait qu'à ma tête. Partir, le verbe a toujours bourdonné, partir. Filer. Vers quoi ? qui ? Un nom, une sonorité, l'ombre d'un nid, le cri d'une chouette : Cotonou. N'y va pas. Reste et rêve, si tu veux, c'est mieux, tu arrêtes tout quand tu veux, tu fermes les yeux et repars quand tu veux ; mais une fois quitté ici, une fois là-bas -- je n'ose même pas t'imaginer là-bas -- que feras-tu ? C'est décidé : tout noter. Ce refus de sauter, je le note. Cotonou. Tu t'attaches trop aux sons. Tu es matérialiste, dans ton genre. Pour un vieux, c'est douteux. Poésie à trois sous, un enfant aurait honte, rirait de toi. Justement, enfant, tu n'es qu'un enfant. Tu m'avais déjà fait le coup. C'est à peine si tu savais lire... Himalaya et hop, tu t'étalais en plein ciel, te vautrais, tout blanc, et l'écho, plus tard tu disais que l'écho habitait le nom comme une  salle vide. Himalaya, un cri lointain et long écho, i...a...a...a..., sur à-pic blancs, rochers pointus, turlututu ! Pareil avec Istanbul, Valparaiso, Médines et des tas, des tas de villes. Même pas. De la musique ? Rien que de la musique ? Tu as beau accélérer le pas, tu vas rater l'avion, il le faut. Tu sais rater un avion, tu l'as déjà fait, tu les as tous ratés jusqu'à présent, alors un de plus... Tu peux tirer ta valoche, pas usée par les soutes des longs courriers, ça non ! Et puis tu es vieux ! Penses-y : dans trois fois rien septante ! Avant, passe encore, brin de folie, le regard vacillant devant une photo, nez collé à la vitrine d'une agence de voyages, cocotiers, paquebots, châteaux forts, casbahs, ces noms, même pas les lieux, les noms. Une vraie collection sur tes cahiers, pas classés, au hasard. Preuve, tu n'as jamais été bon en géo. Mais qui te parle de géographie ? Je veux seulement savoir ce qu'il y a dans ce nom. C'est la terre qui importe. La terre ou la Terre ? La géo c'est de la couture, voyage immobile sur un bâti, et moi je désorganisais, je glissais toujours au-delà des faufils, longs pointillés pour préparer la guerre, on connaît, ailleurs c'était mieux, et une fois là, je prenais n'importe quelle route, une ligne de dénivelé, un fleuve, j'évitais les villes, je sautais les reliefs, je planais sur les Océans ! La Terre. Tu fermais les yeux, tu disais : "la Terre !" Un enfant,  ça se comprend, mais tu as mal aux os, arthrose, tu craques de partout, tu oublies... La terre m'a toujours ému. J'aurais aimé être vigie et crier "Terre !" après des mois de mer, de solitude, de soleil à n'en plus pouvoir. C'est ton côté stylite ! Grimper à la grand'hune du monde et rêvasser, faire d'un nid de pie ton territoire, ta patrie, à deux pas du divin pour ainsi dire. "Terre !" Libération ! Déflagration ! La mer est là, le ciel immense, quel vent!, naseaux salés, tout tangue et roule, "Terre !" L'air expulsé, jusque-là confiné par un coup de glotte tétanisé, précieux viatique en vue de ce seul moment où libéré il te coupe le sifflet ! Avec la mer, mouillé, avec le fer, feu. Mais terre, c'est solide, le sol tremble sous le talon, juste avant la douceur de l'air, à poumons fermés. Souffle inouï, d'emblée scindé, sifflé, empêché, murmuré, rauque. Air vague ou tassé, feulé, toujours teinté, aux couleurs du temps. L'air du temps, voilà la terre, rouge ici, brune, ocre jaune, noire, pâleur de nacre au fond d'un ravin, et c'est de l'eau qui coule, irrigue, inonde, recouvre. Et sous le terre, terre encore, tôt ou tard enfouie, tassée, aussi noire que lait dessous, là où tout se joue, tes os, dans le secret des odeurs musquées, d'invisibles copulations moléculaires au hasard d'ondulations symphoniques, déplacement mathématique des astres. N'y va pas. Tu rentreras déglingué, perclus de symptômes bizarres dont personne ici ne saura quoi te dire. Croûte latéritique des régions tropicales, alumine, oxyde de fer. Latérite, sang de brique d'où sourd l'humide ambiguïté, le bois parfait, totémique. N'y va pas. À Cotonou, tu ne connais personne. Justement. Tu te vois en Afrique ? Désert, ou bien indescriptible fouillis végétal et humain, au choix ! Entre les deux, des zones inclassables, des acacias avec des épines grandes comme ça, à peine de bois tordu, pâle, calciné par le sable, pour faire cuire des riens, quelques chèvres, un puits tous les..., des chameaux qui se dandinent en blatérant ! Toi tu veux aller plus loin, encore plus loin, là où tout est enchevêtré, inextricable ? Il paraît que tout pousse à une allure folle, que l'humidité, parlons-en, l'humidité n'est pas qu'un mot ! Et ça grouille, bestioles, insectes, racines, les villages bouffés au termites, les enfants faméliques, les yeux traversés de filaires et... Qu'est-ce que tu me chantes ! Je tire ma valise. J'emporte trop de trucs. À tous les coups je vais avoir un excédent de bagages. N'y va pas. J'ai peur. Ouf ! De justesse, la voilà dans la file sur le tapis roulant. Toujours glacé, ces aéroports, illisibles ces billets d'embarquement. Monde fou. Si j'avais pu y aller en bateau ! Porte 48, immédiat. Il fait un froid de canard dans ce coucou ! Une revue, papier glacé, dossier sur la Suède, je sors mon pull et ma carte : Afrique de l'Ouest. Je regarde cette épaule de l'Océan et ne vois rien. Lanières multicolores des pays découpés dans la chair, galons d'une uniforme de carnaval. C'est bon, on vole. La clim' me fait claquer des dents. Toute la nuit comme ça ! Le plaid est minuscule, on va finir gelés. Vers l'avant, un écran muet où s'agite une fille et un gars qui s'engueulent, non, ils rigolent, ne savent pas ce qu'ils veulent, je mets le casque, anglais, j'appuie, allemand, le fil se débranche, ils s'embrassent à bouche goulue, ma voisine sors un masque de décontraction, il fait de plus en plus froid. Je cale mon regard entre Togo et Nigeria, fais le Yo-Yo du nord au sud, accroche çà et là des syllabes vides, rejoins le sud, l'eau, Cotonou, bleu atlantique, ocre béninois. L'atmosphère se stabilise entre vibration et relative apesanteur. Je me lève pour dérouiller mes poulies, manque rester pour l'éternité dans le cercueil des toilettes, décide de dormir jusqu'aubout du voyage. L'écran est mort. Ma voisine est livide, légèrement bleutée. Ici et là, des corps affalés. La carlingue fonce dans la nuit. Je sonne l'hôtesse, superbe métisse type antilope. Je finis par somnoler en suçotant un armagnac parcimonieux. Plus que six heures ! Une ribambelle hétéroclite d'impressions, des images par vagues molles cheminent derrière mes paupières. Je recompose à tâtons l'itinéraire qui m'a mené à ce siège étroit, dur, inconfortable. La pêche est maigre. Toujours revient une fascination ancienne, indatable, détachée de tout souvenir d'enfance, cependant étrangère à aucun. Un mélange pâteux m'envahit, où germe, incertaine puis évidente, la nécessité de ne pas mourir sans avoir vu la Côte des Esclaves.

Latérite : Jean-Jacques Marimbert (texte paru dans la revue L'instant du Monde). Dernier livre paru : "Le Corps de l'océan" : Carnet des Sept Collines, éditions Jean-Pierre Huguet

Bona Mangangu, huile sur toile 

Vous devez travailler plus pour penser moins ! C’est ça le fond des choses.

Lire ici l'intervention de Philippe Sollers face à Valérie Pécresse, chez Guillaume Durand

lundi, 26 novembre 2007

Marc Wetzel ou la pensée joyeuse

Voilà un écrivain qui réconcilie pensée et joie. Marc Wetzel, vient de publier son septième livre En témoin de trop aux éditions Climats. Quatrième tome des aventures de Cogito, prénom Marcel. Qui est Cogito ? Un promeneur, oisif, assez sentencieux, plutôt inquiet, très curieux, à la fois extrêmement têtu et totalement disponible. Un homme, sans spécialité ni vocation, simplement intéressé par le réel et qui sert de témoin bénévole à tout ce qui bouge. Il fait du tourisme anthropologique, à trois conditions – que ça ne soit pas trop dangereux, que la vie intérieure soit celle des  autres, qu’il reste une marge de manœuvre. C’est de l’imagination concrète. Cogito n’invente que dans les situations, à même l’existence. Exemples : Lors d’une promenade près de Lunel, il croise un suicidaire blotti sur le parapet d’un pont d’autoroute. il faut l’attirer sur la terre ferme mais il n’écoute rien. Comment faire ? La solution, lui voler ostensiblement son vélo, qui traîne contre le fossé voisin : le type, indigné, sort hargneusement de sa position périlleuse pour réclamer son bien. Et un abruti de sauvé ! Ou bien il rencontre, dans les ruines d’un château haut-perché, un illuminé qui porte sur lui un « détecteur de fantômes » (une espèce de cube métallique, censé émettre des bruits spécifiques à proximité de spectres).  Comment s’en assurer ? En le faisant se précipiter dans le vide : dans la minute, un fantôme se forme en contrebas, dont on verra bien si la boîte le signale ou non ! et un génie pris au mot ! Lors d’une conférence assommante, un gourou onctueux entend prouver l’inexistence du temps : Cogito se lève, dit qu’il a sur lui la preuve contraire, se fouille la braguette et brandit un poil pubien blanc. Et un tyran au piquet ! … On pourrait multiplier les exemples. On retrouve toujours la même verve, le même ton caustique, le sens du raccourci, du comique. Finalement on aime bien la façon dont Cogito va dans le réel, d’ailleurs il nous réconcilie avec lui, et surtout la leçon n’est jamais pesante, ça s’appelle la grâce, car n’est-ce pas, on peut faire semblant d’être grave, mais pour avoir de l’esprit, impossible de tricher…

Interview de Marc Wetzel pour la revue Salmigondis

Ø  Vous enseignez la philosophie, mais pratiquez la fiction. Pourquoi ?

Je me sens en effet enseignant de philosophie et littérateur ; je ne suis donc ni philosophe (je suis inapte à la théorie pure, à l’essai, à l’objectivité impartiale et  nue) ni critique littéraire (je ne peux démonter un style, je n’ai jamais pu comprendre comment se fait une mise en images).  Mon métier consiste à enseigner des idées que je ne peux avoir, et mon hobby d’écrivain à produire les images que je ne peux pas expliquer.

ØVos livres sont constitués d’une suite de tableaux, de saynètes. Comment cette idée de la forme courte vous est-elle venue, et pourquoi ce choix ?

Par  incapacité d’autre chose. Je ne suis pas romancier, pas architecte de mondes alternatifs, pas constructeur. Je ne « tiens » pas la durée, je ne prends pas en charge les structures. Je ne suis qu’un chroniqueur du fugitif, du singulier et de l’approximatif. C’est décevant, puisque c’est un monde où on n’habite pas, où on s’attarde à  peine. Ce sont des événements « filants », occasions de vœux ou d’actions de grâces, mais qui n’offrent aucune assise, aucune configuration stable.

Ø Vos textes jouent, il me semble, sur des décalages constants : entre le réel et sa dérision, entre les niveaux de langage que vous utilisez, entre l’aspect quasi-symbolique de votre personnage et les situations très quotidiennes dans lesquelles il se trouve placé ; de même son nom Cogito est contrebalancé par son prénom, Marcel, etc…

Oui, le procédé essentiel est, je suppose, le contraste, qui a à la fois le spectaculaire de la contradiction et l’efficacité de l’identité. C’est le moment synthétique, où la thèse et l’antithèse sont ensemble, où Dieu et Satan arrivent dans le même avion. C’est la complexité normale des choses, leur ordinaire ambiguïté, leur routinière ambivalence. Dans le contraste, on tient un court instant ensemble le oui et le non, les mondes incompatibles. Un chauffard excité  empoigne Cogito ; que dire sinon « Ah vous êtes aussi un danger privé ? … » Un chardonneret entonne un chant sublime alors qu’on a l’âme grise et triste à mourir ; comment traduire son chant autrement que par « T’inquiète, le spleeneux ; nous aussi nous causons cul, et bouffe et langes et territoire … ». Un neurophysiologiste  assène que « sans cerveau, pas d’esprit » ? comment ne pas rétorquer que justement « sans esprit, pas de « sans cerveau, pas d’esprit » ? Le contraste consiste à replier d’un coup (et de préférence en y étranglant les sots et les cruels, tous les existants unilatéraux) l’accordéon d’abord totalement distendu – de l’infime infini à l’immense -  de la réalité. Un monde ainsi exhaustivement convoqué, et où l’on entend résonner harmoniquement les extrêmes, optimalement contrasté, jette d’un coup hors du puzzle général les fanatiques de telle ou telle de ses pièces. C’est peu de choses, mais cette cure d’ampleur – ou d’intensité – réveille, par une sorte de tétanie métaphorique, l’habitant d’univers qui est en nous. C’est là tout ce que peut Cogito pour son lecteur (et Marcel pour lui-même) !

ØIl paraît que Ronald Reagan, quand il était président des Etats-Unis, avant de prendre une décision importante, se demandait : qu’est-ce que John Wayne aurait fait à ma place ? Faites-vous de même avec Cogito ? Autrement dit, comment cohabitez-vous avec votre personnage, n’avez-vous pas envie parfois de le tuer ?

Cogito, c’est moi, en plus intelligent et courageux. Simplement, le discernement dont il fait preuve est sans commune mesure avec celui (mince et mesquin) que je peux lui fournir. Pour parler franchement, mon masque m’étonne. Il me procure une permanence de caractère que je n’ai spontanément pas (un style obsessionnel devient magiquement une expérience cohérente !) et je m’entends dire à travers lui des choses dont la résonance écrase ma capacité de signification. Sa créature cloue le bec au créateur ; ce doit être une expérience familière à Dieu, je suppose.

Je me mets volontiers au service d’un gars plus intéressant que moi. Mon double littéraire me permet de contrôler à peu près un dédoublement sans cela délirant. Je suis en tout cas davantage son parolier que lui mon porte-voix. Ce dessaisissement de soi au profit d’un être fictif, est-ce une mutilation complaisante ? Cette vie par procuration n’a peut-être qu’une excuse : de valoir au-delà d’elle, d’être partageable. De toute façon, je n’ai pas le choix : ma muse est Marcel ou rien. Et Marcel même n’est rien.

ØA vous lire – et c’est très agréable – on éprouve un sentiment joyeux ; quel est pour vous le rapport entre joie et pensée ?

On peut opposer la joie de penser au plaisir de connaître. La connaissance capte le monde et s’approprie les relations ou lois qu’elle y trouve ; au contraire la pensée laisse être le monde, elle en rassemble les signes sans se les approprier. Elle rend justice à la complexité des choses en admirant leur fécondité. En un mot, joie et pensée sont ensemble dans le discernement de l’utilité du meilleur : on fait varier l’existence générale juste assez pour que sa compréhension puisse parfaire notre propre existence. On remarie le monde à lui-même.

Ø Trois dernières petites questions ? Travaillez-vous beaucoup votre écriture ?

Jamais. Les choses viennent ou  non. Et puis cela supposerait être un bon ou utile lecteur de soi, et je ne le suis pas. Quand c’est mauvais ou fastidieux, on me le fait remarquer, et j’enlève. En un mot, je ne travaille pas mon écriture parce que je travaille avant d’écrire, pour pouvoir écrire. Ma muse, squelettique, ne transpire donc pas.

Ø Quels sont vos projets ?

Ceux de tout le monde : donner à  ma liberté des objets un peu plus dignes d’elle, et plus utiles aux autres. Faire (comme on fait un point de presse) un point véritable de vie avant de la rendre. Quant aux projets littéraires, je n’en ai pas, car cela supposerait vouloir ce qui va (éventuellement)  m’arriver ou me rendre visite. Or, franchement, je fais à peine ce que je peux, et en tout cas pas du tout ce que je veux !

ØSur l’île déserte, quels livres emporteriez-vous ?

Marcel vous répondrait Robinson Crusoé, je suppose ; ou un manuel de survie, ou une topographie de l’île !  Mais en vérité tout livre la ferait cesser d’être déserte.

Raymond Alcovère, pour la revue Salmigondis n° 16, 2000

 

15:00 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Marc Wetzel

dimanche, 25 novembre 2007

Stratégie de Philippe Sollers

Un livre pour dire, premièrement, que Dieu est mais n'existe pas - et, deuxièmement, que le Diable n'est pas le malin que l'on croit, qu'il est l'inintelligence même, la bêtise personnifiée, le mauvais goût, l'ignorance.

A lire ici

Plaisir âcre, puissant, paisible

18a8d861d967d17c17398c4b89b38725.jpgUne semaine plus tard, la chair de Léonore bien présente, chez lui. Le feu crépite dans la cheminée. Gaétan contemple son corps endormi pigmenté de rouge par les reflets incandescents. Son regard est si intense, scrutateur, gourmand, qu’il craint de la réveiller. Elle est sublime, dos nu jusqu’aux reins, on devine l’arrondi des hanches. La dénuder complètement, il en a furieusement envie. Il dévoile les fesses, les cuisses. Clarté rougeoyante. Pas un pouce de son corps qu’il ne vénère. Le monde s’arrête d’être multiple, il s’est envolé, résumé en elle, sa chair. Il n’aime rien tant chez les femmes que l’effet du repos sur le visage, le relâchement, cette grâce dans l’abandon. La sensualité, visible, palpable, dans le granulé de la peau, les lignes du geste inachevé, la respiration du sommeil. Certaines femmes laissent flotter cette ondulation en permanence autour d’elles, à la lisière. Alors, la rudesse du monde s’estompe. Il éprouve de la fierté à la contempler dans son lit, avec le sentiment du devoir accompli. Plaisir âcre, puissant, paisible.

Raymond Alcovère, extrait de "Le Sourire de Cézanne", 2007, éditions n & b

Photo : Jean-Luc Aribaud

samedi, 24 novembre 2007

Il l'est peut-être...

f7ff86a38c6e7c0c00ca32a383450b96.jpgOn n’est jamais plus heureux qu’à deux. Sans témoin. Tout à donner à l’autre, que  personne  n’en sache rien. Mystère des rencontres, de l’intime. Irréductible au qu’en dira-t-on, au regard extérieur qui objective, juge, transforme, colporte, trahit. Rien que le regard  doucement posé de l’autre. Bien sûr ça ne dure qu’un temps, l’autre n’est jamais complètement à soi. Mais on peut rêver un moment. De même à l’instant où on voit la beauté, penser que l’univers en est tissé. Il l’est peut-être...

Raymond Alcovère, extrait de "Fugue baroque", édtions n & b, 1998

Photo : Nina Houzel

vendredi, 23 novembre 2007

Lecture concert "en voyage"

24c61ed72302e57490f615636d1cb4b1.jpgFrançoise RENAUD & Frédéric TARI vous proposent une lecture inédite
dans le cadre d'une soirée organisée par PARTAGE HERAULT
objectif : contribuer à la construction d'une école à QUITO (Equateur)
La lecture sera suivie d'un buffet-cocktail
et d'un concert de l'ensemble Gospel EOLE à 21h
chef de chœur : Samuel ZAROUKIAN
Samedi 24 novembre, 19 H salle Petrarque, à Montpellier
(entrée : 10 €)

Quand CCE rêve d'Europe

CCE, c'est Christian Cottet-Emard (et non Consultant de la Communauté Européenne), lire ici

Profits

 « La guerre est le massacre de gens qui ne se connaissent pas au profit de gens qui, eux, se connaissent mais ne se massacrent pas »

Paul Valéry

09:46 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : guerre, Paul Valéry

Kiou-Siou à Château l'Ermitage

cc41d9ac7d4e8ef0af0675ab6a25c248.jpgRoute de Nîmes
Entre Garons & Saint Gilles

Samedi 24 Novembre de 9h à 19h

Spectacle et remise des prix à 18h

Vote du public pour le concours (40 artistes dont...... KIOU-SIOU * qui a réalisé 3 sculptures sur le thème de l'Ermitage) jusqu'à 17h.

Dégustations offertes de Vins bien sûr et de fromages vosgiens "Fromagerie de l'Ermitage"

* sous le pseudonyme de KIOU-SIOU, "artiste bicéphale", se cachent Michèle Fuxa & Frédérique Azaïs

jeudi, 22 novembre 2007

Explosion ?

Une manif, un jour de grève, vu par Alina

13:08 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : politique, manif, grève

Appel à textes pour le Magazine Autour des Auteurs

Sur le thème du FEU...
 
Nous avons aussi besoin de chroniques livres, de retour sur ces livres OUBLIES qui continuent à nous accompagner, de réactions à des événements (théâtre, expositions, concerts...), tout ce à quoi nous assistons et qui nous touche.
Les contacts avec d'autres artistes travaillant d'autres matières que l'écriture nous sont nécessaires. N'hésitez pas à les favoriser.
Bref, on attend vos actions et réactions avec impatience.
Cet appel concerne tout le monde, même si vous n'habitez pas en Languedoc-Roussillon
 
 

mercredi, 21 novembre 2007

Un peu d'ailleurs

d40e91c26561666bf4277dc91f332511.jpgDiego Rivera, peintre mexicain

Et voici sa plume...

Tintinaucongoesque...

C'est ici sur Langue Sauce Piquante...

13:55 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : plume, Guaino

La France est un pays qui pense

« La France est un pays qui pense. (…) Nous possédons dans nos bibliothèques de quoi discuter pour les siècles à venir. C’est pourquoi j’aimerais vous dire : assez pensé maintenant. Retroussons nos manches. »

Christine Lagarde, ministre de l’économie et de l’emploi ; Extrait du discours prononcé le 10 juillet 2007 à l’Assemblée Nationale.

C'est par cette spéciale dédicace que commence le dernier numéro d'Ironie, à lire ici

On peut y lire aussi cette pensée de Lichtenberg :

« Lire, c’est emprunter ; en tirer profit, c’est rembourser sa dette. »

mardi, 20 novembre 2007

Ces rives de l'Italie

739b449d24b7457ed067f802f9bdd94c.jpgAprès tout, pourquoi se soucier de ce que je ne connais pas ? Jamais je n’avais eu cette perception, que tout est bien, le monde, le désir, le cercle des jours. Se déroule dans une parfaite harmonie. Les délires baroques de Spaccanapoli, eux aussi, sont là de toute éternité. Ils figurent l’autre côté des choses, la folie, la mort, l’amour fou. Des étendards, balises de l’univers onirique qui me hante, s’étalent là devant mes yeux.

Ils sont avec moi, ils sont moi, ces frontons d’église, ces figures alambiquées, torsadées, sculptures aériennes, fluides, qui défient le temps, la logique, la mesure. Cette folie-là, je m’y suis lové, comme on se glisse entre les draps pour y trouver le repos, ne plus agir, ne plus être envahi du désordre et de l’incongruité du monde. Un grand calme enfin.

J’aime ces ruelles sombres où clabaude la vie, ces cours, ces palais de marbre, ces rives de l’Italie...

 

Raymond Alcovère, extrait de "Fugue baroque", édtions n & b, 1998

Frédérique Azaïs, 20 x 20

du 15 novembre au 20 décembre au

CLUB HOUSE de la JALADE 

4 rue de la Jalade MONTPELLIER

lundi, 19 novembre 2007

La vente aux enchères de tableaux au profit de Occi'zen

882c212524de26655655089fbc1fc007.jpgb6abb0d42888b845bd32419d88c1a1ce.jpg

 Demain à 20 H, salle Rabelais à Montpellier, grande vente aux enchères de tableaux au profit de l'association Occi'zen, enfance et art.

Frédérique Azaïs y proposera deux éléments de sa série de 20 x 20 dont vous voyez deux autres ici

Infos sur la vente aux enchères ici