dimanche, 19 février 2006
Dolce vita
Mardi 21 février, 20h30, Atelier de la Dolce Vita
(rue de la Charité 37a – 1210 Bruxelles)LES NOIX (nouvelle inédite en recueil, parue jadis dans la revue Écrits Vains).
N Deux questions et leurs réponses.
N Quelques extraits de JIVAROSSERIES (Éd. Memor).
N Une question et sa réponse.
N Quelques extraits des PENSÉES D’UN ORTIECULTEUR (à paraître aux Ateliers du Tayrac).
N Trois questions et des réponses.
N Histoire de faire mal à votre culture littéraire, LES TRENTE LIVRES PRÉFÉRÉS d’Éric (version un peu modifiée de la liste parue dans le n°4 du GALOPIN, revue impertinente que l’on peut télécharger gratuitement sur http://sites.cmgprod.com /journal.php).
N KABERDOUCHE (nouvelle inédite, extraite d’un recueil en gestation).
N Quelques PENSÉES D’UN FOSSOYEUR DE BIÈRES avant de descendre au bar pour...
Vingt minutes d’entracte !
À la bonne vôtre !
SUBREPTICEMENT (paroles d’Éric, musique de Paul Guiot).
N Deux questions et... deux réponses.
N Quelques extraits de DANS LA VIE À COUPS DE PIOCHE (Éd. Gros Textes) et de PRISES DE VIE EN NOIR ET NOIR (recueil inédit).
N D’autres extraits des PENSÉES D’UN ORTIECULTEUR et quelques réflexions (?) récentes.
N L’ODE AUX RATS (paroles et musique de Paul Guiot, chanson extraite d’un CD qu’il prépare d’arrache-guitare).
N Quelques définitions – si la mémoire d’Éric est bonne – de son LEXIQUE D’ANTHROPOCLASTIE qui en compte plus de 700 (à paraître aux Éd. Gros Texte).
N Éric aime-t-il les chats ?
N Éric aime-t-il les chiens ?
N Quelques extraits des CONTES DE LA POÉSIE ORDINAIRE (Éd. Memor).
N LE PORTIQUE (nouvelle inédite, extraite du recueil LES SEIGNEURS DES ÂNES).
N Quatre PENSÉES D’UN FOSSOYEUR DE BIÈRES avant de redescendre définitivement au bar...
(N Cela dépend de vous : rappel possible pour quelques inédits...)
[Si vous n’avez pas encore ses œuvres complètes, Éric a caché quelques exemplaires de ses derniers livres dans son sac...]
16:54 Publié dans Evénements | Lien permanent | Commentaires (2)
Le miroir et le masque
Un an plus tard, la nouvelle ode qu'il propose est très différente de la précédente. Elle subvertit toutes les règles, qu'elles soient grammaticales, poétiques ou rhétoriques. Le poète ne la récite plus avec la maîtrise qui était la sienne un an auparavant ; il la lit devant le roi et le cénacle des hommes de lettres avec inquiétude et hésitation. Ce nouveau texte, étrange et surprenant, n'est pas situé dans l'ordre de la représentation, mais dans celui de l'illusion. Il ne donne pas à entendre les prouesses du roi, il fait surgir l'événement dans sa force inouïe : "Ce n'était pas une description de la bataille, c'était la bataille." L' ekphrasis s'est substitué à la représentation. Comme les fictions du Siècle d'or, l'ode déploie une séduction merveilleuse, mais dangereuse. Elle doit être conservée, mais en un unique exemplaire. Pour son oeuvre, qui a la force du théâtre, le poète reçoit un objet de théâtre : un masque d'or. Le roi désire pourtant une oeuvre plus sublime encore.
Un an plus tard, l'ode n'est plus écrite et ne consiste qu'en une seule ligne. Seuls, le poète et le roi la "murmurèrent comme s'il se fût agi d'une prière secrète ou d'un blasphème". Le poète, envahi comme l'aède homérique par une parole qui n'est pas la sienne, est devenu un autre : "Quelque chose, qui n'était pas le temps, avait marqué et transformé ses traits. Ses yeux semblaient regarder très loin ou être devenus aveugles" - aveugles comme les yeux des poètes inspirés dans leur nuit : Homère, Milton, Joyce, et Borges lui-même. La troisième ode ne sera ni transcrite, ni répétée. Son mystère a conduit ceux qui l'ont énoncée à la contemplation interdite, celle de la Beauté. "Maintenant il nous faut l'expier", dit le roi. Avec la dague qui lui a été offerte, le poète se suicide. L'expiation du souverain prend une autre forme, propre au "grand théâtre du monde" où tous les rôles sont éphémères et interchangeables : "Du roi, nous savons qu'il est aujourd'hui un mendiant parcourant les routes de cette Irlande qui fut son royaume, et qu'il n'a jamais redit le poème."
Extrait de L'Auteur au "centre d'innombrables relations" par Roger Chartier
04:20 Publié dans Critique | Lien permanent | Commentaires (2)
samedi, 18 février 2006
Et voilà ma comédie flambée
... Je broche une comédie dans les moeurs du sérail. Auteur espagnol, je crois pouvoir y fronder Mahomet sans scrupule : à l'instant un envoyé... de je ne sais où se plaint que j'offense dans mes vers la Sublime-Porte, une partie de la presqu'île de l'Inde, toute l'Egypte, les royaumes de Barca, de Tripoli, de Tunis, d'Alger et de Maroc : et voilà ma comédie flambée, pour plaire aux princes mahométans"
Le Mariage de Figaro, acte V scène 3, Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais, 1784.
18:31 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (3)
Ciao Ray !
12:00 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0)
Censures...
11:02 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (0)
vendredi, 17 février 2006
Le prochain Hitler ressemblera à un animateur de talk-show qui charmera les ménagères.
C'est la servitude volontaire...
21:58 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (9)
L'Histoire n'est déjà plus qu'un département narratif du nihilisme
La littérature n'existe pas pour conforter les humains dans leur petite vie : c'est une puissance mélodique d'arrachement. On sort du cauchemar de l'Histoire avec des phrases. Les phrases de Claude Simon, dans leur plastique ondulante, composent une matière épaisse, hérissée, compacte, comme un mortier de prose où se cherche, par saccades, spasmes, roulis, une cadence qui échappe à l'extinction des choses.
13:16 Publié dans Critique | Lien permanent | Commentaires (15)
En matière de moquerie...
«Ils (les incroyants) se moquent mais, en matière de moquerie, Dieu est insurpassable.»
09:19 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (2)
Ah ! Voyez comme les humains mettent les dieux en cause !
Ah ! Voyez comme les humains mettent les dieux en cause !
C'est de nous que viendraient tous leurs malheurs.
Quand ce sont eux qui aggravent leur sort du fait de leur propre sottise.
Homère - l'Odyssée
Titien, L'amour sacré et l'amour profane (détail)
03:57 Publié dans illuminations | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 16 février 2006
Une fois pour toutes
Pourquoi ne pas considérer une fois pour toutes que les pratiques érigées en dogmes par toutes les religions ne concernent que ceux qui se réclament de ces diverses religions ?
09:50 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (8)
Une main nue
Et sur le port, au milieu des camions et des barriques, et dans les rues, au coin des bornes, les bourgeois ouvraient de grands yeux ébahis devant cette chose si extraordinaire en province, une voiture à stores tendus, et qui apparaissait ainsi continuellement, plus close qu'un tombeau et ballottée comme un navire.
Une fois, au milieu du jour, en pleine campagne, au moment où le soleil dardait le plus fort contre les vieilles lanternes argentées, une main nue passa sous les petits rideaux de toile jaune et jeta des déchirures de papier, qui se dispersèrent au vent et s'abattirent plus loin comme des papillons blancs, sur un champ de trèfles rouges tout en fleur.
Puis, vers six heures, la voiture s'arrêta dans une ruelle du quartier Beauvoisine, et une femme en descendit qui marchait le voile baissé, sans détourner la tête.
Flaubert, Madame Bovary
Claude Monet
06:15 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 15 février 2006
Il fait un temps de temps

Extrait de
"Le révolver à cheveux blanc"
Poésie/Gallimard.
Photo : Henri Cartier-Bresson
01:00 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0)
Le chateaubriand
00:45 Publié dans humour | Lien permanent | Commentaires (5)
mardi, 14 février 2006
1984
1984, la gauche était aux affaires, Hugues quittait la fac de lettres de Montpellier et son esprit libertaire pour plonger dans les allées du pouvoir et l’arrivisme triomphant de ces années-là. Trois ans après l’élection de François Mitterrand, l’euphorie des débuts était passée, le parti socialiste était le parti au pouvoir, attirant un nombre incalculable de gogos et autres margoulins aussi incompétents qu’inefficaces qui hantaient les corridors dans le seul but de se remplir les poches en étalant la bêtise la plus crasse. Ce joli monde dépensait toute l’énergie et le savoir faire à sa disposition uniquement pour se mettre en avant …
Dans ce labyrinthe, on vivait au quotidien parmi les Caractères de La Bruyère. Tel Robin, ami de la femme d’un ministre d’Etat, brillant causeur, il passait au bureau deux fois par jour, lire la presse et régler par téléphone les affaires de son ami qui travaillait chez un des plus grands couturiers de Paris. Sa grande force, outre son persiflage incessant, était son carnet d’adresses, sa capacité à organiser des dîners. Considérable valeur ajoutée, vu le fonctionnement de cette microsociété, à qui les palais de l’Etat allaient comme un gant, dans ce salmigondis d’huissiers et de courtisans. Les pires coups de Trafalgar résonnaient dans un univers feutré, digne de l’Ancien Régime. Ouvrant les fenêtres on découvrait l’Hôtel des Invalides à gauche, le pont Alexandre III puis le Grand Palais à droite. Balzac est éternel.
Un peu plus tard, sur l’autre bord politique, Hugues découvrait avec stupeur ce chef de service issu d’un ministère prestigieux ; dissimulant sous un teint rougeaud une intelligence très vive, il ne pouvait hélas supporter une heure de réunion sans le secours de quelque boisson alcoolisée. Ensuite il fut nommé consul de France à Shanghai. Et puis ce secrétaire général, lui de quel côté était-il, impossible de le savoir, même pas lui, opportunisme et bêtise crasse avant tout. On était alors entré dans la phase incertaine des " cohabitations " ; dans son bureau flamboyant, il pérorait au téléphone à propos des " avions renifleurs " qui défrayaient la chronique à ce moment-là, histoire de montrer qu’il était dans le coup ; il n’y avait pourtant pas de quoi, ce fut un des plus lamentables scandales de la République.
17:30 Publié dans En cours d'écriture | Lien permanent | Commentaires (0)
L'amour, l'infini...
L'amour c'est l'infini mis à la portée des caniches
Louis-Ferdinand Céline
15:13 Publié dans Papillote | Lien permanent | Commentaires (18)
L'adjectif infini ou cet élégant espoir...
"Je viens d'écrire infinie. Je n'ai pas intercalé cet adjectif par entraînement rhétorique ; Je dis qu'il n'est pas illogique de penser que le monde est infini. Le juger limité, c'est postuler qu'en quelque endroit reculé les couloirs, les escaliers, les hexagones peuvent disparaître - ce qui est inconcevable, absurde. L'imaginer sans limites, c'est oublier que n'est point sans limites le nombre de livres possibles. Antique problème où j'insinue cette solution : La Bibliothèque est illimitée et périodique. S'il y avait un voyageur éternel pour la traverser dans un sens quelconque, les siècles finiraient par lui apprendre que les mêmes volumes se répètent toujours dans le même désordre - qui répété, deviendrait un ordre : l'Ordre. Ma solitude se console de cet élégant espoir ".[...]
Jorge Luis Borges - Fiction
(extrait de) La bibliothèque de Babel
11:46 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 13 février 2006
Le jour où le monde bascula...
Ce livre est avant tout l'histoire d'un homme, qui vécut la plus grande partie de sa vie en Europe occidentale, durant la seconde moitié du XXe siècle. Généralement seul, il fut cependant, de loin en loin, en relation avec d'autres hommes. Il vécut en des temps malheureux et troublés. Le pays qui lui avait donné naissance basculait lentement, mais inéluctablement, dans la zone économique des pays moyen-pauvres; fréquemment guettés par la misère, les hommes de sa génération passèrent en outre leur vie dans la solitude et l'amertume. Les sentiments d'amour, de tendresse et de fraternité humaine avaient dans une large mesure disparu; dans leurs rapports mutuels ses contemporains faisaient le plus souvent preuve d'indifférence, voire de cruauté.
Au moment de sa disparition, Michel Djerzinski était unanimement considéré comme un biologiste de tout premier plan, et on pensait sérieusement à lui pour le prix Nobel; sa véritable importance ne devait apparaître qu'un peu plus tard.
A l'époque où vécut Djerzinski, on considérait le plus souvent la philosophie comme dénuée de toute importance pratique, voire d'objet. En réalité, la vision du monde la plus couramment adoptée, à un moment donné, par les membres d'une société détermine son économie, sa politique et ses moeurs. Les mutations métaphysiques - c'est-à-dire les transformations radicales et globales de la vision du monde adoptée par le plus grand nombre - sont rares dans l'histoire de l'humanité. Par exemple, on peut citer l'apparition du christianisme.
Dès lors qu'une mutation métaphysique s'est produite, elle se développe sans rencontrer de résistance jusqu'à ses conséquences ultimes. Elle balaie sans même y prêter attention les systèmes économiques et politiques, les jugements esthétiques, les hiérarchies sociales. Aucune force humaine ne peut interrompre son cours aucune autre force que l'apparition d'une nouvelle mutation métaphysique. On ne peut pas spécialement dire que les mutations métaphysiques s'attaquent aux sociétés affaiblies, déjà sur le déclin. Lorsque le christianisme apparut, l'Empire romain était au faîte de sa puissance; suprêmement organisé, il dominait l'univers connu; sa supériorité technique et militaire était sans analogue; cela dit, il n'avait aucune chance. Lorsque la science moderne apparut, le christianisme médiéval constituait un système complet de compréhension de l'homme et de l'univers; il servait de base au gouvernement des peuples, produisait des connaissances et des oeuvres, décidait de la paix comme de la guerre, organisait la production et la répartition des richesses; rien de tout cela ne devait l'empêcher de s'effondrer. Michel Djerzinski ne fut ni le premier, ni le principal artisan de cette troisième mutation métaphysique, à bien des égards la plus radicale, qui devait ouvrir une période nouvelle dans l'histoire du monde; mais en raison de certaines circonstances, tout à fait particulières, de sa vie, il en fut un des artisans les plus conscients, les plus lucides.
Les particules élémentaires, Prologue, Michel Houellebecq, 1998
20:41 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (4)
Supprimer l'adjectif ?
Repensant à l'idée de J.-J.M., supprimer le plus possible les adjectifs, n'ai pas trouvé d'issue : il faut dire que je les aime les adjectifs, n'est-ce pas ce qu'on attend de l'écrivain, qu'il qualifie le monde - lui propose une qualité, des couleurs, un regard, une façon de voir, sentir, entendre, toucher... Supprimerais plus volontiers le verbe, quand il est inutile, descriptions... (l'adjectif suffit amplement alors) ou alors le sujet puisque finalement le moi est une illusion !
19:30 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (25)
La possibilité de l’île Littérature
Je lis depuis le début de l’année Une vie divine de Philippe Sollers, l’écrivain français que j’ai le plus vilipendé naguère, et je l’évoque tous les jours sur mon blog parce que ce livre, malgré l’apparente fatuité de son auteur et son hédonisme de façade, est écrit lui aussi « sous le regard de Dieu », jusque dans ses blasphèmes et ses effets. Sollers y devient M.N. qui n’est ni Nietzsche, qu’il revisite pas à pas et réanime à la diable, ni lui-même non plus, ni toi ni elle - et tous à la fois pourtant. Ce n’est pas tant de Sollers qu’il est alors question que de la possibilité de l’île Littérature, et demain ce sera Proust ou Shakespeare, Tchékhov ou le Kurosawa du sublime Vivre, Bonnard et Beethoven en alternance...
12:32 Publié dans Critique | Lien permanent | Commentaires (0)
Il s’agit, avant tout, d’un bonheur de langage
Pourquoi l’érotisme rend-il heureux ? Parce qu’il est un retour direct à l’enfance, à ses jeux, à sa gratuité, à sa profondeur de temps. L’enfant, on le sait depuis Freud, est un pervers polymorphe qu’on oblige ensuite, sous prétexte de normalité, à devenir un pervers honteux monomorphe (la famille, l’école et le travail s’y emploient). L’adulte est en général un enfant durci, puritain malgré lui, péniblement pornographe. Il s’applique dans le vice comme dans la vertu, il est ennuyeux, peu doué pour la régression enchantée qui définit l’érotisme. Ce n’est pas par hasard que « le vert paradis des amours enfantines » (Baudelaire) lui reste fermé. Il en rêve, l’adulte, il se sent jeté en enfer, il devient parfois bassement pédophile pour tenter de rejoindre son corps perdu.
Il délire assez vite sur le sujet (voir la minable affaire Lewinsky), s’empêtre dans ses dénégations, bafouille, réprime, s’obstine, et finit par transformer la question en marchandise dégradée. Rien de plus éloigné de l’érotisme, par exemple, que la littérature érotique. C’est un genre qui, comme le pastiche, ne supporte pas la médiocrité. C’est pourquoi, au risque de faire hurler, il faut maintenir le constat que l’érotisme est d’essence aristocratique. Le bonheur, dans cette dimension du langage et des sensations, est rare, clandestin, toujours inattendu, discret, subversif. Contrairement à ce que veut faire croire la propagande puritaine, c’est une affaire grave, pas du tout superficielle, comme la musique. Grave et légère, joyeuse. Georges Bataille a résumé cela dans une formule fameuse : « L’érotisme est l’approbation de la vie jusque dans la mort. »
L’érotisme menace la société de surveillance et de calcul parce qu’il convoque tous les sens en même temps. Ce n’est pas une affaire « de cul » (même si). Il s’agit, avant tout, d’un bonheur de langage. On se touche en parlant d’une certaine façon. C’est ce que les Anglais, autrefois, appelaient avoir des « conversations criminelles ». Pas d’érotisme vrai sans verbalisation appropriée : c’est un art. Le bonheur, ici, est de pouvoir jouer des fantasmes les plus crus de façon détachée. Les tempéraments érotiques, c’est connu, sont le contraire de la perversion sociale et de son désir morbide de négation de la liberté et de la vie.
L’érotisme, bonheur dans la connaissance, est une désacralisation sans rabaissement. Il ne respecte rien, sauf la justesse d’exécution. Il est ennemi de toutes les pesanteurs et de toutes les idoles. Tenez, par exemple, il ne sera pas mauvais de faire entendre aujourd’hui aux es- prits moisis cette phrase d’André Breton, datant de 1926 : « Oh, monsieur, quelle femme que cette Jeanne d’Arc ! Je crois que l’impudicité même avait établi toutes ses flammes dans le con de cette putain royale, la coquine était toute en feu et le foutre exhalait par ses pores. » Amen.
Par Philippe Sollers
Nouvel Observateur - Hors-série le bonheur - 1998
09:38 Publié dans amour | Lien permanent | Commentaires (0)