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mardi, 07 novembre 2006

Une horloge où toutes les heures sont égales

medium_DSC_0660.jpg« La désorientation est constante, ponctuelle, courbée, systématique, mais n’engendre aucun désordre, au contraire. L’espace est simplement doublé et organisé en reflet, comme un échiquier. Les canaux, les piquets, les ruelles, les quais, les bateaux, les places, les ponts, les puits, le dallage même, orchestrent cette mise en scène géométrique. Le temps, lui, ne peut être, à chaque instant, que vertical, étagé, feuilleté, poudroyant, ouvert. Venise est un entrelacement de chemins qui ne mènent nulle part et qui se suffisent à eux-mêmes ; une horloge où toutes les heures sont égales » 

Philippe Sollers, Eloge de l’infini

Photo : Gildas Pasquet

Sans doute !

Amusant que l’expression « sans doute » signifie qu’il en existe tout de même un !

16:55 Publié dans Papillote | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : doute, papillote

Une perle baroque dans la brume plombagine

medium_PL_9_.jpgJe ne souffle mot. Je regarde par la fenêtre Venise. Venise. Reflets insolites dans l'eau de la lagune. Micassures et reflets glissants dans les vitrines et sur le parquet en mosaïque de la bibliothèque Saint-Marc. Le soleil est comme une perle baroque dans la brume plombagine qui se lève derrière les façades des palais du front de l'eau et annonce du mauvais temps au large, crachin, pluies, vents et tempête. Je ne souffle mot. A la place du vaporetto qui passe devant la Dogana di Mari, appareille une tartane. C'est le 11 novembre 1653...

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Blaise Cendrars, Bourlinguer.

Photos de Gildas Pasquet

lundi, 06 novembre 2006

De l'ombre à la lumière

medium_PL_30_.jpgVenise 2006, photo de Gildas Pasquet

23:26 Publié dans Photo | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Photo, Venise, Gildas Pasquet

Venise 2006

medium_PL_14_.jpgPhoto : Gildas Pasquet

18:32 Publié dans Photo | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : photo, Gildas Pasquet, Venise

J'aimais bien sa nonchalance

Les chroniques de Bernard Frank dans le Nouvel Obs, c'était la certitude d'une page bien écrite, un peu hors du temps, et ce mélange de nonchalance et de vivacité, de distance et de savoir-faire qu'il réussissait si bien, il y avait aussi ses références constantes à Stendhal, Proust, etc. Une manière d'élégance...

Agir à la façon de la Nature

medium_LE_PETIT_PRINCE_A_DIT.jpg"Ce qui me semble à moi le plus haut dans l'Art (et le plus difficile), ce n'est ni de faire rire, ni de faire pleurer, ni de vous mettre en rut ou en fureur, mais d'agir à la façon de la Nature." : Gustave Flaubert ; cité par Simon Leys : "Poésie et peinture, Aspects de l'esthétique chinoise classique" in Essais sur la Chine, collection Bouquins. Leys cite aussi Picasso qui a écrit presque la même chose : "Il ne s'agit pas d'imiter la nature, mais de travailler comme elle."

Tableau de Frédérique Azaïs

dimanche, 05 novembre 2006

Cette lumière est divine

medium_Tous_les_Matins_du_Monde.jpg"L’être ouvert - à la mort, au supplice, à la joie - sans réserve, l’être ouvert et mourant, douloureux et heureux, paraît déjà dans sa lumière voilée : cette lumière est divine. Et le cri que, la bouche tordue, cet être tord peut-être mais profère est un immense alléluia, perdu dans le silence sans fin."

Georges Bataille

Frédérique Azaïs : "Tous les matins du monde"

Une expression bouffonne et égarée au possible

medium_Golden_Study_20Pollock.2.jpg"Enfin, ô bonheur, ô raison, j'écartai du ciel l'azur, qui est du noir, et je vécus étincelle d'or de la lumière nature. De joie, je prenais une expression bouffonne et égarée au possible."

Rimbaud

Pollock

samedi, 04 novembre 2006

La Belle Équipe en ciné permanent

medium_soutine_01_450.jpgVous l'avez compris, ce n'est pas dans nos habitudes, chez Brunetti, de cabotiner ainsi quand depuis des lustres s'est établie entre nous une sorte de hiérarchie toute de tacite et discrète connivence dont les rouages aussi bien huilés qu'une série de tournées au quatre-vingt-et-un font tourniquer notre planète comme sur des roulettes. C'est la treizième tribu notre troquet, La Belle Équipe en ciné permanent ; un profane fait tinter le drelin-drelin de la porte vitrée et vient poser coude au comptoir, il doit aussitôt se mesurer à cent mille paires d'yeux qui par en dessous les sourcils froncés en moins de rien le jaugent. Qu'il affiche une suffisance déplacée, use de ce ton sec que les petits Marius seuls savent prendre entre eux et sa liquette n'aura le temps de s'imprégner des douces effluves de fritons grésillant dans l'huile bouillante ; la messe est dite, on ne le reverra guère. Mais si, pas tartufe pour deux thunes, il veut bien se montrer tel qu'en lui-même, avec ses coquards au coeur, ses illusions au fil du caniveau toutes en allées - comme souvent et comme tant d'autres ici -, s'il apostrophe et questionne à la cantonade pour se donner une contenance et par pudeur masquer sous la plaisanterie quelque chagrin ou le poids de la solitude qui le tourmente alors, que cela lui chante et qu'il y trouve son compte, il se peut bien qu'il devienne tantôt des nôtres. Brunetti, voyez-vous, c'est un de ces bistrots qui parvient quand même à faire tenir debout ensemble un certain nombre de vies.

Pierre Autin-Grenier, extrait de Friterie-Bar Brunetti, Gallimard, col l'Arpenteur, 2005

Soutine, Jour de vent à Auxerre (1939)

vendredi, 03 novembre 2006

Un ogre dans la ville

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Marseille est une ville sublime, étonnante. Onirique même. Au contraire de l'idée de ceux qui ne la connaissent que de loin, la ville qui vit naître Artaud et mourir Rimbaud est pleine de mystères, d'étrangeté. Cendrars en a parlé magnifiquement dans "L'homme foudroyé" : "Marseille, presque aussi ancienne que Rome, ne possède aucun monument. Tout est rentré sous terre, tout est secret." Mireille Disdero nous plonge dans une autre ville encore, loin de tous les clichés, tour à tour solaire et terrifiante. L'orage approchait, dans les aigus. L'orage ici c'est l'ogre. Il s'appelle Angelo. Il harcèle la narratrice, veut la dévorer, lui dévorer sa vie. Il est son double en quelque sorte. Tour à tour Marie et Angelo évoquent chacune des faces de l’histoire, la médaille et son envers. Cet ogre est un monstre affectueux et dangereux. Quelque chose bouge et se lève tout autour. Respiration haletante de fantômes sans au-delà des vies. Larmes rouges du tatoueur pour un amour de peau. Bruit des existences loin, autour, dans les rues. Battements d’ailes noires des secondes qui nous escortent. La ville s’éveille, grandit de ses tentatives sans apaisement. J’ai toujours peur.C’est une ville souvent crépusculaire, venteuse, presque vide (une atmosphère à la De Chirico) qui déroule ses méandres. Et si c’est à un suspens haletant que nous convie Mireille Disdero, rythmé par les encres de Catherine Carruggi, le vrai fil conducteur du roman c’est la poésie : Je m’allonge sur la pierre chaude, les yeux vers le ciel. J’écoute les vagues se jeter contre l’île. Shhhhhhhhuuuuuuuu… Des mouettes tournoient au-dessus de moi pour m’inviter au voyage. La lumière est presque palpable. Je la sens me toucher, m’aimer. Je suis bien. Aujourd’hui, il n’y a personne, pas un seul touriste. J’aime cet endroit. Je pense à la première fois que je suis arrivée à Marseille avec mes parents. On devait atterrir à Marignane mais l’avion est venu faire un demi-tour au-dessus de Marseille et du Frioul, en fin d’après-midi. L’ombre des ailes frôlait les vagues. Ce jour-là, j’ai été heureuse d’avoir des yeux capables de découvrir cette ville adossée à la mer. Je garde encore la marque de sa beauté, même des années après, en traversant ses quartiers aux murailles écorchées. J’aime Marseille, je l’ai dans les yeux, comme une couleur.

 

Références ici

Voir aussi le blog de Mireille Disdero

À cet accès soudain de calme

medium_Weiss.jpgÀ quoi reconnaît-on ce que l'on aime. À cet accès soudain de calme, à ce coup porté au coeur et à l'hémorragie qui s'ensuit - une hémorragie de silence dans la parole. Ce que l'on aime n'a pas de nom. Cela s'approche de nous et pose sa main sur notre épaule avant que nous ayons trouvé un mot pour l'arrêter, pour le nommer, pour l'arrêter en le nommant.
(Une petite robe de fête, Christian Bobin)

Photo : Sabine Weiss

jeudi, 02 novembre 2006

Fil

medium_mantegna-andrea-camera-degli-sposi-2402378.jpgIl y a ce fil

Où s’accrochent les plumes

Fil aux facettes miroitantes

La couleur jette des flaques

Sur d’invisibles murs

Et les ballerines dansent

Au vertige

Nénuphar issu des limbes

Le cœur en offrande

Tendre comme une chair de figue

Aux ailes

Cède la nuque

Une mèche glisse

 

Valérie Canat de Chizy

Andrea Mantegna

mercredi, 01 novembre 2006

Emploi du temps

medium_balzac_rodin_paris_b.jpg« je me couche à six heures du soir ou à sept heures comme les poules ; on me réveille à une heure du matin et je travaille jusqu’à huit heures ; à huit heures, je dors encore une heure et demie ; puis je prends quelque chose de peu substantiel, une tasse de café pur et je m’attelle à mon fiacre jusqu’à quatre heures ; je reçois, je prends un bain, ou je sors, et après dîner, je me couche » 

Balzac

Balzac par Rodin

 

 

 

mardi, 31 octobre 2006

Qu’est-ce donc que la vie ordinaire

medium_IcoArtista1a.gif« Ma vie est semblable à l’enfant tumultueux de retour à la maison, gagné par l’ardeur d’un jeu au dehors : elle me quitte très souvent, elle me revient de loin en loin, encombrée par une émotion que les premiers mots apaisent. Je n’écris que très peu, et ce peu est encore trop, en regard des quelques instants qui éclairent le chemin où je vais : il y a très peu d’événements dans une vie. Parfois il n’y a que l’événement de son désastre, de son lent engloutissement dans le désastre quotidien. Ainsi perd-on toutes forces, dans l’impur mélange des jours. Qu’est-ce donc que la vie ordinaire, celle où nous sommes sans y être ? C’est une langue sans désir, un temps sans merveille. C’est une chose douce comme un mensonge. »

Christian Bobin, Le huitième jour de la semaine.

Modigliani

The Queen

medium_20061027ho_thequeen_450.jpgStephen Frears a réalisé là un film à la fois intense et sobre. Crépusculaire. On y suit jour après jour la famille royale anglaise la semaine qui a suivi la mort de Lady Di. Le soutien que va lui apporter Tony Blair, qui vient d'être élu, alors que dépassée par l'engouement et l'émotion mondiale qu'a provoqué ce deuil, elle reste d'abord campée dans son refus de le reconnaître, de comprendre ce qu'il représente et les évolutions qu'il signifie. Au point de se mettre en danger et de menacer tout l'équilibre des pouvoirs dans le pays. D'où ce mano a mano avec le jeune premier ministre qui joue là son baptême du feu. Helen Mirren porte bien la dimension tragique du personnage de la reine, notamment dans cette très belle scène, où, seule dans la nature, sa voiture en panne, elle se retrouve face à un cerf magnifique, celui que les chasseurs poursuivent, qu'elle incite à s'enfuir...

Transports en Chine

medium_transport_en_chine_03.jpgmedium_transport_en_chine_04.jpg

00:20 Publié dans Photo | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photo, Chine

lundi, 30 octobre 2006

Cristaux de roche

medium_yred.jpgLes heures,

Tu les traînes dans ton sillage

Dans l’attente

D’une prochaine éclipse.

Le sucre te mange.

Se fige le temps

Couleur de caramel.

Sous ta peau

Se forment

Les cristaux

Et les morceaux de roche

Dévalent

Des sommets.

 

Valérie Canat de Chizy

Yves Klein

dimanche, 29 octobre 2006

"Tu m'as tué... mais, comme toi, j'ai oublié de mourir."

Arabian love song: "Mahmoud Darwich, malade d'espoir!"

 A lire ici

samedi, 28 octobre 2006

La profondeur du sentiment pour sillon

medium_n45_klein_l.jpgUne fois le chandail ôté, l'offrande d'une poitrine rouge

Conséquence possible d'un coup de soleil,

Trace probable d'une vieille peinture de guerre

Une fois notre chant sur pilotis

suspendu entre brume et feutre

la profondeur du sentiment pour sillon

Que savoir d'autre de la vie ?

Jean Azarel, extrait de Passage du mortel

Yves Klein