mardi, 18 avril 2006
Bienvenue dans le labyrinthe
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mercredi, 29 mars 2006
Réalité de l'illusion
On y apprend, dans ces dictionnaires, que la réalité est le “ caractère de ce qui est réel, de ce qui a une existence effective ”, tandis que l’illusion, selon les mêmes dictionnaires, est une “ erreur de la perception ou de l’esprit, qui fait prendre l’apparence pour la réalité ”.
Le bon sens commun, dont la paresse est presque sans limites, se satisfait généralement de telles définitions, et en conclut que, en effet, réalité et illusion sont antinomiques et aussi peu conciliables que le sont, croit-on aussi, le blanc et le noir.
Cependant l’expérience, toujours elle, nous a enseigné que la non intentionnelle et très incréée subtilité de l’univers a prévu, avec le gris, un niveau de conciliation, simple mariage de raison où chacune des parts cède une fraction de sa singularité, dont il résulte cette couleur intermédiaire, composite, qui atténue, en les ménageant, les irréductibles antagonismes chromatiques constitutifs de leur abrupte différentiation !
Ainsi donc réalité et illusion sont-elles, de la même façon, plus qu’on ne croit, non seulement combinables, mais encore susceptible de d’exercer, chacune, une telle force d’attraction sur l’autre qu’en résultera souvent, non pas un moyen terme ou un pis aller, mais une fusion intégratrice, une “ con-fusion ”, produisant soit l’effet du gris, dans le cas du blanc et du noir, soit celui de la mosaïque, du damier ou du patchwork, réalité et illusion s’interpénétrant et se répartissant, dans une même apparence, selon des dosages et des emplacements à tout moment variables.
De ce fait, on pourra dire sans hésiter que l’illusion est une composante décisive de la réalité, qui en est une tout aussi décisive de l’illusion.
C’est du reste cette apparence, mode de perception pas si trompeur qu’on ne dit, qui réconcilie ces deux contraires lexicologiques, que nul esprit libre et actif n’acceptera jamais de considérer comme irréconciliables, voire même comme opposés.
Que serait en effet, depuis la nuit des temps humains, notre réalité d’ “ hommes savants- savants ”, si des éclairs fulgurants d’illusion n’étaient venus, périodiquement, infléchir l’ordre des choses, spontanément végétatif et réactif ?
Qu’est-ce qui a engendré la conscience, la pensée, la parole, la projection puis le projet, l’outillage et son lent perfectionnement, le souci de se construire un abri fixe et de le pérenniser, l’art, sans parler de cet acte rassembleur que fut la religion ? L’illusion, ou son intime moteur, l’imagination, et rien d’autre (si, toute fois, autre chose, de connexe au demeurant : le désir).
L’être humain est celui d’entre les animaux qui aura détourné la fatalité vers des formes de la réalité tout imprégnées de traces d’illusion.
C’est ainsi que, fidèles aux dispositions des derniers hommes du paléolithique, plutôt que soumis aux astreintes pragmatiques des néolithiques purs et durs, les Gaulois continuèrent-ils (pour leur perte, cela est vrai ; mais leur intuition nous aura contaminés par résurgence ou par latence obstinée) à percevoir de toute chose sa dualité, plus encore que sa dualité, sa réversibilité, cette façon qu’elle a de disposer, derrière sa réalité apparente, de masses d’inapparent actif, de non-dit loquace, d’inconnu familier. Les poètes ont su reprendre, tardivement il est vrai, ce message fondamental, celui d’une identité inaliénable de l’endroit et de l’envers non pas “ opposés ”, mais adossés l’un à l’autre, s’étayant, dans leur effort de solidarité. Que s’effondre l’illusion, c’est la réalité qui s’écroulera aussitôt après.
En fait, sans illusion, pas de pensée, pas de rêve, pas de métaphysique, pas d’activités artistiques, pas de spéculations aventureuses, pas de grandes découvertes ; autant dire : pas d’humanité !
Car l’illusion, marqueur spécifique inscrit dans l’épaisse carnation de la réalité humaine, anime celle-ci, et la détermine en l’incitant à constamment se dépasser.
Et c’est ainsi que l’illusion est bel et bien l’un des “ caractères de ce qui est réel, de ce qui a une existence effective ”, ou si l’on veut : une composante décisive, active, de la réalité.
CQFD, comme dirait le principe de réalité, qui n’est que pure illusion.
Gil Jouanard ; contribution au numéro 5 de la revue L'instant du monde, "Réalité de l'illusion"
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samedi, 25 mars 2006
Une communication physique
Viviane Alleton
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vendredi, 10 mars 2006
Tissu
Texte veut dire Tissu [...] nous accentuons maintenant, dans le tissu, l’idée générative que le texte se fait, se travaille à travers un entrelacs perpétuel ; perdu dans ce tissu - cette texture - le sujet s’y défait, telle une araignée qui se dissoudrait elle-même dans les sécrétions constructives de sa toile
Roland Barthes, Le plaisir du texte
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mardi, 14 février 2006
L'adjectif infini ou cet élégant espoir...
"Je viens d'écrire infinie. Je n'ai pas intercalé cet adjectif par entraînement rhétorique ; Je dis qu'il n'est pas illogique de penser que le monde est infini. Le juger limité, c'est postuler qu'en quelque endroit reculé les couloirs, les escaliers, les hexagones peuvent disparaître - ce qui est inconcevable, absurde. L'imaginer sans limites, c'est oublier que n'est point sans limites le nombre de livres possibles. Antique problème où j'insinue cette solution : La Bibliothèque est illimitée et périodique. S'il y avait un voyageur éternel pour la traverser dans un sens quelconque, les siècles finiraient par lui apprendre que les mêmes volumes se répètent toujours dans le même désordre - qui répété, deviendrait un ordre : l'Ordre. Ma solitude se console de cet élégant espoir ".[...]
Jorge Luis Borges - Fiction
(extrait de) La bibliothèque de Babel
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lundi, 13 février 2006
Supprimer l'adjectif ?
Repensant à l'idée de J.-J.M., supprimer le plus possible les adjectifs, n'ai pas trouvé d'issue : il faut dire que je les aime les adjectifs, n'est-ce pas ce qu'on attend de l'écrivain, qu'il qualifie le monde - lui propose une qualité, des couleurs, un regard, une façon de voir, sentir, entendre, toucher... Supprimerais plus volontiers le verbe, quand il est inutile, descriptions... (l'adjectif suffit amplement alors) ou alors le sujet puisque finalement le moi est une illusion !
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vendredi, 03 février 2006
Dans des miroirs magiques
Le sens de la création littéraire : dépeindre des objets ordinaires tels que leur reflet apparaîtrait dans des miroirs magiques
Nabokov
Felix Vallotton
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mercredi, 18 janvier 2006
Définition de l'amour
Définition de l'amour, à l'heure de la vidéo-surveillance et des SMS stéréotypés : association de malfaiteurs en vue d'une action terroriste. Contre quoi ? La Terreur.
Philippe Sollers, Une vie divine
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samedi, 07 janvier 2006
Les livres
"Prends-les comme s'adressant directement à toi, on n'est pas à l'école"
Philippe Sollers, Une vie divine
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mardi, 03 janvier 2006
L'hallali
23:09 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (3)
La littérature est sa voix...
« Nous acceptons les particularismes, mais non les singularités ; les types, mais non les individus. Nous créons des choeurs de particuliers, dotés d’une voix revendicatrice, criarde et inoffensive. Mais l’isolé absolu ? Celui qui n’est ni breton, ni corse, ni femme, ni homosexuel, ni fou, ni arabe, etc. ? Celui qui n’appartient même pas à une minorité ? La littérature est sa voix... »
Roland Barthes, Sollers écrivain
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dimanche, 11 décembre 2005
Vague battement d’ailes autour
Ciel profond, immense, étendues bleues, blanches et noires, oiseaux sillonnant poussés par les rafales du vent, la ville balayée. Souvent je l’imagine délivrée de l’activité des hommes, avec ce grand souffle coupant, lumière et courants, nuages circulant par vagues au dessus. Rien ne change, sauf le ciel justement, à l’épreuve de tout, au milieu, au dessus, dans toutes les directions. L’histoire s’accumule et se détruit par strates mais le ciel lui, imperturbable. Bleu ardent, lignes de pluie de l’horizon, tout près la mer et son désordre de vagues. Nuit de syzygie. La mer d’Ulysse, j’entends le battement des rameurs, la mer vineuse, sillonnée par ce voyageur fou. Orage de l’histoire jeté sur la ville, elle intacte ou presque, les hommes balayés, en poussière, en dessous, perdus dans l’abîme, et toujours cette clarté flotte au dessus, immense, impénétrable, acide, ardente. L’histoire est constamment retournée, agitée, dévoyée. Histoire éternelle des pouvoirs qui façonne le monde, les humains se battent pour du vent. Homère, l’Odyssée, le voyage essentiel, la Grèce, enfouie depuis, les Troyens contre les Achéens, ils vont fonder Rome, et puis Rome à son tour, face au Saint Empire romain germanique, conséquences désastreuses, et ainsi de suite, qui détruira l’autre, retournements constants, le scénario est toujours le même, le diable se glisse partout. Et puis il y l’autre histoire, l’éternelle, celle des débuts, elle se joue de nous, des méandres, retours, aléas, victoires, défaites, au dessus et à l’intérieur. Lourdeur factice, légèreté des anges, éternelle agilité, vague battement d’ailes autour.
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mardi, 06 décembre 2005
L'épaule de l'océan
Je n’ai pas fermé l’œil de la nuit. Du moins n’ai-je observé aucune différence entre les vibrations de l’avion bourdonnant et le ressac des rêves entrecoupé de comptines chuchotées par ma voisine en boubou bleu, inquiète pour son petit, juste devant moi. Le mioche ronfle par à-coups, gémit réclame s’agite, et je l’envie de flotter ainsi dans le ciel saharien, ignorant que l’enveloppe d’acier pèse des tonnes et ne tient qu’à l’air fendu. Je jette de temps en temps un œil vers l’œil noir du hublot, n’y vois que ma tête déformée par le plexiglas. Alors, comme buvant dans un puits en plein désert, je me penche sur la revue d’Air France ouverte sur mes genoux, où j’ai dégoté une petite carte de l’Afrique de l’ouest, unique lien avec la réalité. La mienne est en soute, idiot que je suis.
L’épaule de l’Océan soutient le continent, des lanières verticales multicolores se dressent, tels des galons d’uniforme de la Coloniale. Je m’y habitue. Je récite d’ouest en est, Côte d’Ivoire, Ghana, Togo, Bénin, Nigeria, et Cameroun pour l’épaulette. Puis ce ne sont que villages éparpillés en pleine forêt primaire, entrelacs de lianes et de serpents, femmes nues mâchant du bétel et chasseurs de fauves. Oui mon commandant.
Autour de moi ça frôle l’anti-matière, un no man’s land, no man’s time, no man’s tout absolu dans le fuselage climatisé du long-courrier. Sur l’écran muet de la télé collée au plafond s’agite un type armé jusqu’aux dents. Je cale mon regard entre Togo et Nigeria, je fais du yoyo sud nord sud, bute contre le Burkina rose pâle, me pose au ras de l’eau sur Cotonou, à la frontière du bleu atlantique et du jaune béninois. Le Bénin est bouton d’or. Mais je le sais bien, la terre y est rouge, et au Togo aussi, au Nigeria, au Ghana, toute l’épaule est rouge. Au nord, elle vire à l’ocre, puis au sable jaune, coquille d’œuf, paprika, blanc par endroit. Je le sais, j’ai lu, j’ai vu des photos. Et puis j’ai un goût prononcé pour les éléments. Rouge terre, rouge humide, rouge poussière, le même rouge qu’à Toulouse, je ris. Le rouge ajoute à la chaleur, lui donne corps, sature l’air, rouille le blanc des murs, le blanc des yeux, le blanc du ciel, dont la blancheur est revendiquée tel un passé révolu, le pur enfoui. Rouge bruyant, bouillant, rire blanc. Je vole vers l’origine.
Je n’ose m’avouer, tant la naïveté m’accable, qu’en tous ces mots égrenés sonnant le lointain, Afrique, papaye, igname, palme, mille autres, coule une source enfantine, les heures de l’écolier peinant devant une carte de France, cherchant ailleurs, le plus loin possible, de quoi apaiser sa vaine inquiétude existentielle, étalé de tout son long sur les minuscules cartes africaines du vieux Larousse dont la couverture latérite passée, déjà, bâillait, effrangée, ouvrant à l’enfant que j’étais des territoires souterrains, le sous-sol d’une Afrique de papier.
Je lève les yeux. Le hublot pâlit enfin et à travers l’humidité sauvage m’apparaît l’immense feuille rouge du sol gravelée, tachée de vert sombre, rayée d’improbables pistes, moi nez collé, confondant l’air et l’eau, la buée de ma gorge et les lambeaux de brume accrochés aux ailes. J’écarquille les yeux, au seuil d’un univers déjà peuplé des spectres légendaires d’un cartographe en culotte courte.
Jean-Jacques Marimbert, Extrait de Latérite à Cotonou
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samedi, 03 décembre 2005
Café du Tonkin
Je n’ai jamais vu personne
au Café du Tonkin
et personne ne se le rappelle
à Quimper-Corentin.
La rivière coulait devant sa porte
avec un bruit de jonque,
et de chauve-souris.
Parfois un légionnaire
s’asseyait à sa table en bambou
et d’un juron passait commande
d’une fille, d’un alcool de contrebande.
Le Café du Tonkin
n’avait pas son pareil
à dix lieues à la ronde
et s’il n’a jamais existé
est-ce une raison pour l’oublier ?
Gérard Le Gouic
Cafés (Rougerie éd. 1988)
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mercredi, 30 novembre 2005
Combler ce manque
(...) exprimant ce que nous vivons nous nommons la rose, son odeur, etc., mais ce faisant nous gommons les aspects individuels, subjectifs, intimes et personnels. Cela indique à nouveau que les mots figent de façon impersonnelle et symbolique ce qui, au sein de la vie de la conscience, demeure unique et indicible. Nous réduisons à de l’homogène ce qui est hétérogène, nous figeons dans une expression symbolique ce qui est vécu dans la durée sur le mode qualitatif infiniment nuancé. (Extrait du cours de Jean-Jacques Marimbert, Durée et liberté)
Ainsi, la poésie, la littérature viennent combler ce manque, rapprocher le langage de la complexité, de porosité, de la fluidité des sensations et des états de conscience.
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lundi, 21 novembre 2005
La mer à Dieppe
Oui amour violent tu es là partout tissé dans mon âme obombré dans chaque pore de ma peau rien ne peut me détacher de toi happé enlevé trituré ourdi dépossédé je peux à peine bouger vibration qui parcourt mon échine tout ce que je pourrai tenter pour me détacher de toi est inutile ce qui a été une fois est pour toujours
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dimanche, 13 novembre 2005
Piero della Francesca
21:25 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (4)
vendredi, 04 novembre 2005
Une haine secrète
La haine secrète (secrète même pour qui l’éprouve) que l’être humain, et tout spécialement celui qui – critique, éditeur, universitaire etc – gravite autour de la littérature, sa haine secrète envers les écrivains n’a peut-être d’égale que la haine secrète que l’auteur porte à l’écriture : la haine de qui, par une exaspération de l’amour, est en situation de dépendance. Qu’est-ce que cette vie qui ne peut se vivre qu’avec un carnet constamment à portée de main ? Rimbaud la rejeta avec rage et on le vit, au désert, manifester sa honte quand se trouvait évoquée son ancienne activité de poète. Kafka demanda que soient brûlés ses manuscrits. Le verbe avait dévoré leur vie, le verbe qui seul pourtant leur avait permis d’accéder à leur essence, de réaliser leur être dans la plus grande liberté possible.
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lundi, 31 octobre 2005
Avec mon corps
Pour la première fois de ma vie, il me semblait que je pensais avec mon corps
Henri Bosco, Malicroix
11:05 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (1)
dimanche, 30 octobre 2005
Accueillir les mirages
Il faut accueillir les mirages pour connaître ce qui tout en se voilant veut être connu.
Alina Reyes
22:15 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (2)