mardi, 11 novembre 2008
Posséder c'est perdre
L'art nous délivre de façon illusoire, de cette chose sordide qu'est le fait d'exister... En art, il n'y a pas de désillusion,
car l'illusion s'est vue admise dés le début. Le plaisir que l'art nous offre ne nous appartient pas, à proprement parler :
nous n'avons donc à le payer ni par des souffrances, ni par des remords...
Par le mot art, il faut entendre tout ce qui est cause de plaisir sans pour autant nous appartenir : la trace d'un passage,
le sourire offert à quelqu'un d'autre, le soleil couchant, le poème, l'univers objectif. Posséder c'est perdre. Sentir sans posséder, c'est conserver, parce que c'est extraire de chaque chose son essence.
Fernando Pessoa
L'incertitude du poète : Chirico
00:15 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, art, fernando pessoa, chirico
lundi, 10 novembre 2008
Comment les écrivains français gagnent leur vie
15:57 Publié dans Edition | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : édition, littérature, argent
La malle aux manuscrits de Pessoa
Dans ses ouvrages et articles sur Pessoa, Teresa Rita Lopes, grande exégète de l'écrivain, raconte les difficultés extrêmes qui se posent aux chercheurs, car l'oeuvre est enfoui pêle-mêle dans cette malle-sarcophage. 27 543 documents ont été retrouvés dont 18 816 sont des manuscrits. 3 948 d'entre eux sont dactylographiés. Certains sont classés dans des enveloppes, au nombre de 343, mais il s'agit d'une minorité, car on dénombre 2662 feuillets volants. De plus, il écrivait parfois des fragments d'œuvres différentes sur la même feuille, ce qui complique singulièrement la tâche des chercheurs.
Quand, en 1968, la malle fut mise à la disposition d'équipes officielles de recherche, elle avait déjà été fouillée par bien des mains, qui ont contribué ainsi au désordre et à la disparition de certains manuscrits. Le fonds a été racheté par la fondation Gulbenkian en 1979, et déposé à la Bibliothèque Nationale du Portugal en 1982.
Dès qu'on ouvre l'une des pochettes dans lesquelles se trouvent maintenant les manuscrits, on est frappé du peu de cas que Pessoa en a fait. Certes, il était pauvre, ce qui l'obligeait à récupérer tout le papier possible ; c'est pourquoi ses manuscrits sont une véritable stratification car constamment réutilisés.
Il n'a pas pris la peine de numéroter les feuillets, et très peu sont datés. L'écriture y est quasiment illisble, ce qui entraîne les exégètes à publier nouvelles versions, au fur et à mesure de leur relecture de la graphie pessoenne. Enfin les supports utilisés révèlent un véritable mépris quant à la sauvegarde de l'œuvre : papier de qualité médiocre, feuilles fournies par les cafés, en particulier le Brasileiro, calendriers, articles et quotidiens, brouillons divers et même… ses propres manuscrits. Ainsi un passage du Livre jouxte-t-il sur la même page, quand il n'est pas copié par-dessus, un poème d'Alvaro de Campos, un horoscope, une liste de comptes… Soares, le semi-hétéronyme auteur du Livre de l'Intranquillité, affiche son indifférence pour l'outil et le support graphiques :
"Je remplis peu à peu, à traits lents et mous d'un crayon émoussé (que je n'ai pas la sentimentalité de tailler), le papier blanc qui sert à envelopper les sandwiches et que l'on m'a fourni dans ce café, parce que je n'avais pas besoin d'en avoir de meilleur et que n'importe lequel faisait l'affaire, pourvu qu'il soit blanc."
00:15 Publié dans Histoire littéraire | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, pessoa, gildas pasquet
dimanche, 09 novembre 2008
Nous manufacturons des réalités
« Nous attribuons généralement à nos idées sur l’inconnu la couleur de nos conceptions sur le connu: si nous appelons la mort un sommeil, c’est qu’elle ressemble, du dehors, à un sommeil ; si nous appelons la mort une vie nouvelle, c’est qu’elle paraît être une chose différente de la vie. C’est par le jeu de ces petits malentendus avec le réel que nous construisons nos croyances, nos espoirs – et nous vivons de croûtes de pain baptisées gâteaux, comme font les enfants pauvres qui jouent à être heureux. Mais il en va ainsi de la vie entière : tout au moins de ce système de vie particulier qu’on appelle en général civilisation. La civilisation consiste à donner à quelque chose un nom qui ne lui convient pas, et à rêver ensuite sur le résultat. Et le nom, qui est faux, et le rêve, qui est vrai, créent réellement une réalité nouvelle. L’objet devient réellement différent, parce que nous l’avons, nous, rendu différent. Nous manufacturons des réalités. »
Fernando Pessoa, Le Livre de l'intranquillité
Magritte, Le Château des Pyrénées
00:15 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature, art, fernando pessoa, le livre de l'intranquillité, magritte
samedi, 08 novembre 2008
Rappel de quelques infos
Dernière ce soir (à ne pas manquer) à 19 H
Au théâtre d'Ô à Montpellier de Bureau National des Allogènes, de Stanislas Cotton
Cie Les Perles de Verre
Mise en scène Hélène de Bissy et Béla Czuppon / Avec Babacar M’Baye Fall et Béla Czuppon
Rigobert Rigodon, petit fonctionnaire, examine et trie les requêtes des demandeurs d’asile. Mais un jour, ce «monsieur tout le monde » saute par la fenêtre et s ’écrase quelques mètres plus bas. Pourtant, son âme continue à flotter parmi les vivants,pour raconter son étrange rencontre avec Barthélémy Bongo venu lui demander si, en tant qu’être humain, il pouvait rester ici…
Allogène : D'une origine différente de celle de la population autochtone et installé tardivement dans le pays.
Rond point du Château d'eau
34090 Montpellier
Tel : 04 67 67 73 73
Fax : 04 67 67 73 74
Réservations : 04 67 67 66 66
La semaine prochaine à Nîmes, au Périscope, le 13 à 19 H et le 14 à 20 H 30 (résa : 04 66 76 10 56)
Et tout le WE,
Voir ici le site du Salon avec toutes les infos
Lire ici sur ce blog, en date des 28, 29 et 30 octobre des inédits de PAG
11:06 Publié dans Evénements | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, théâtre, pierre autin-grenier, bureau national des allogènes
J'ai façonné ainsi ma vie
Organiser notre existence de façon qu'elle soit aux yeux des autres un mystère, et que ceux mêmes qui nous connaissent le mieux nous ignorent seulement de plus près que les autres. J'ai façonné ainsi ma vie, presque sans y penser, mais avec tant d'art et d'instinct que je suis devenu pour moi-même une individualité, mienne sans doute, mais qui n'est ni clairement ni entièrement définie.
Fernando Pessoa, Le livre de l'intranquillité,
00:15 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : lisboa, littérature, pessoa, chiado
vendredi, 07 novembre 2008
La splendide et inexplicable Italie...
12:58 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : politique, italie, obama, berlusconi
Artemisia Gentileschi
Remarquablement douée et aujourd'hui considérée comme l'un des premiers peintres baroques, l'un des plus accomplis de sa génération, elle s'impose par son art à une époque où les femmes peintres ne sont pas facilement acceptées. Elle est également la première femme à peindre l'histoire et la religion à une époque où ces thèmes héroïques sont considérés comme hors de portée d'un esprit féminin.
Autoportrait
00:15 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : art, peinture, baroque, artemisia gentileschi
jeudi, 06 novembre 2008
Vinci or not Vinci ?
"Cette Marie-Madeleine est sans doute un des clous de l'exposition de Koekelberg. Jusqu'ici, elle avait été attribuée à un élève de Léonard de Vinci, Giovan Pietro Rizzoli, dit Il Giampetrino. Mais le Pr Carlo Pedretti, 83 ans, expert mondial ès Leonardo, est persuadé d'y voir la patte du maître. « A tout le moins, on peut voir que Léonard regardait par-dessus son épaule », dit-il. Mais il va plus loin : il croit que l'œuvre est de Léonard lui-même : « Je le sens. J'accompagne Léonard depuis tant d'années que je sais quand il intervient. Ici je suis sûr que la facture va bien au-delà de ce que pouvait faire son meilleur élève. »
Léonard de Vinci n'a guère peint de nus féminins. Carlo Pedretti croit savoir que le commanditaire le voulait expressément. « Il avait demandé une femme. Une peinture religieuse, bien sûr. Mais une qu'il pouvait embrasser. Marie-Madeleine s'imposait. Le peintre a même gommé le vase que Marie-Madeleine tient dans la plupart de ses représentations. »
19:34 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : leonardo da vinci, marie-madeleine, art, peinture
Nos enfants nous accuseront
Pour que ce film qui dénonce les méfaits de la mauvaise alimentation et des pesticides, réalisé par un français, soit correctement programmé lors de sa sortie en salle, il faut qu'un maximum de personnes regarde la bande-annonce dans les 3 jours à venir. http://www.nosenfantsnousaccuseront-lefilm.com/
En vous remerciant de bien vouloir faire suivre à tous vos contacts
13:57 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : cinéma, nos enfants nous accuseront, pesticides, alimentation
mercredi, 05 novembre 2008
Jour historique ?
14:09 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : politique, obama, etats-unis
Ces rives de l'Italie
Les délires baroques de Spaccanapoli, eux aussi, sont là de toute éternité. Ils figurent l’autre côté des choses, la folie, la mort, l’amour fou. Des étendards, balises de l’univers onirique qui me hante, s’étalent là devant mes yeux.
Ils sont avec moi, ils sont moi, ces frontons d’église, ces figures alambiquées, torsadées, sculptures aériennes, fluides, qui défient le temps, la logique, la mesure. Cette folie-là, je m’y suis lové, comme on se glisse entre les draps pour y trouver le repos, ne plus agir, ne plus être envahi du désordre et de l’incongruité du monde. Un grand calme enfin.
J’aime ces ruelles sombres où clabaude la vie, ces cours, ces palais de marbre, ces rives de l’Italie... Plus envie de retourner en France, je voudrais être une de ces pierres, le bras de cette statue dont le doigt pointe vers la mer, sentir le matin les odeurs de l’aube, sécher au soleil de midi et m’effriter lentement de la vie qui va... La rouille comme une délivrance.
Raymond Alcovère, extrait de Fugue baroque, prix 98 de la ville de Balma, éditions n & b
00:17 Publié dans Fugue baroque | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature, raymond alcovère, fugue baroque, gildas pasquet
mardi, 04 novembre 2008
La complexité d'un tableau de Nicolas Poussin
La Récolte de la Manne : Voir ici une vidéo explicative
23:43 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art peinture, nicolas poussin, la récolte de la manne
Sarx
A l’heure où les écrans et tout ce qui nous entoure nous éloigne de plus en plus des sensations vraies – par exemple la plupart des objets avec lesquels nous sommes en contact au quotidien sont des produits manufacturés et ne sont plus faits directement par la main de l’homme -, Jacki Maréchal, dans une série de douze tableaux (dont ces trois là font partie) a choisi d’aborder symboliquement la problématique de la chair et du « toucher » Le terme « sarx » signifie « chair » en grec ancien.
Prolongement de tous les autres sens, la main ici volontairement traitée de manière symbolique, touche un autre corps qui souvent n’est qu’ombre, voir poussière, ou mieux encore, pure ontologie.
Il faut lire dans cette série de toiles une démarche allégorique, qui lie au toucher, une structure de notre conscience de l’autre et de sa corporéité unique. De l’harmonie de l’action dépendra la subtilité de relation qui va du monde extérieur vers cet unique intime, et de là, vers la richesse illimitée du toucher.
Le projet est de révéler dialectiquement le toucher, par un art purement visuel qui s’adresse à l’œil de l’autre, et donne envie de franchir la frontière vers cet autre à la main tendue, miroir affranchi par l’horizon du corps de celui qui voit. La main, ici symbole du sens du toucher, montre la limite de l’œil et le surpasse au final.
Pour toutes informations et projets : jackimarechal@yahoo.fr
00:15 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : art, peinture, jacki maréchal, sarx
lundi, 03 novembre 2008
Diogène jetant son écuelle
L’écuelle était le seul objet usuel de Diogène. Comme les moines zen, il la transportait partout avec lui pour manger et pour boire. Jusqu’au jour où il vit un enfant boire à la fontaine dans ses deux mains en creux. Il jeta alors l’écuelle – luxe inutile. Nicolas Poussin l’a représenté en 1648.
23:05 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : diogène, poussin
Bureau national des allogènes, de Stanislas Cotton
Cie Les Perles de Verre
Mise en scène Hélène de Bissy et Béla Czuppon / Avec Babacar M’Baye Fall et Béla Czuppon
Rigobert Rigodon, petit fonctionnaire, examine et trie les requêtes des demandeurs d’asile. Mais un jour, ce «monsieur tout le monde » saute par la fenêtre et s ’écrase quelques mètres plus bas. Pourtant, son âme continue à flotter parmi les vivants,pour raconter son étrange rencontre avec Barthélémy Bongo venu lui demander si, en tant qu’être humain, il pouvait rester ici…
Allogène : D'une origine différente de celle de la population autochtone et installé tardivement dans le pays.
Au théâtre d'Ô
Rond point du Château d'eau
34090 Montpellier
Tel : 04 67 67 73 73
Fax : 04 67 67 73 74
Réservations : 04 67 67 66 66
Infos pratiques :
Le 05/11/08 de 19:00 à 20:25 : Mercredi
Du 06/11/08 au 07/11/08 de 20:30 à 21:55 : Jeudi, Vendredi
Le 08/11/08 de 19:00 à 20:25 : Samedi
04:18 Publié dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, bureau national des allogènes
samedi, 01 novembre 2008
J'interromps si souvent une pensée par un morceau de paysage
Je reste toujours ébahi quand j'achève quelque chose. Ébahi et navré. Mon instinct de perfection devrait m'interdire d'achever ; il devrait même m'interdire de commencer. Mais voilà : je pèche par distraction, et j'agis. Et ce que j'obtiens est le résultat, en moi, non pas d'un acte de ma volonté, mais bien d'une défaillance de sa part. Je commence parce que je n'ai pas la force de penser ; je termine parce que je n'ai pas le courage de m'interrompre. Ce livre est celui de ma lâcheté.
La raison qui fait que j'interromps si souvent une pensée par un morceau de paysage, qui vient s'intégrer de quelque façon dans le schéma, réel ou supposé, de mes impressions, c'est que ce paysage est une porte par où je m'échappe et fuis la conscience de mon impuissance créatrice. J'éprouve le besoin soudain, au milieu de ces entretiens avec moi-même qui forment la trame de ce livre, de parler avec quelqu'un d'autre, et je m'adresse à la lumière flottant, comme en ce moment, sur les toits de la ville, mouillés sous cette clarté oblique ; à la douce agitation des arbres qui, haut perchés sur les pentes citadines, semblent tout proches cependant, et menacés de quelque muet écroulement ; aux affiches superposées que font les maisons escarpées, avec pour lettres les fenêtres où le soleil déjà mort pose une colle humide et dorée.
Fernando Pessoa, Le livre de l'intranquillité
00:17 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : littérature, paysage, pessoa, lisbonne