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jeudi, 30 novembre 2017

À voir changer la couleur des pierres, surgir la lumière crue et acide du Sud

le bonheur est un drôle de serpentÀ voir changer la couleur des pierres, surgir la lumière crue et acide du Sud, l’âpreté qui annonce les rivages de la Méditerranée, je revivais. L’odeur des aiguilles de pin brûlées, leur bruit sec, craquant sous le pas, la torpeur sous la canicule, l’attente interminable des siestes sans sommeil de l’enfance, le temps arrêté, puis le soir, vent marin qui s’insinue, rédemption, flots de fraîcheur à travers les rues, fluidité et mouvement partout, toutes ces sensations remontaient à la surface. J’étais heureux du chemin parcouru. S’y mêlaient l’apaisement du retour, une envie de quiétude. Michel était le meilleur ami de mon oncle. Il m’hébergea le temps que je m’installe. C’était bon de parler ma langue, entendre son accent, retrouver les phrases, les intonations de l’enfance. Pendant toute une semaine, temps humide et doux, partir à la pêche au petit matin, casser la croûte avec un verre de vin clairet à la première chaleur, puis rentrer dès que le vent tourne au Nord, la mer devenue plaque incandescente, criblée de moutons bondissants, respirer les odeurs de sel comme un peu de soi, imaginer cette côte encore sauvage, avec les moustiques, les macreuses aux reflets myosotis qui glissent sous leurs flancs le bleu du ciel, les étangs regorgeant d’anguilles, sans le bruit des avions, des voitures et des bateaux à moteur.
Raymond Alcovère, Le Bonheur est un drôle de serpent, roman, Lucie éditions, 2009, extrait
Photo : Eric Frey

Summer Wind, photography by Andreas Heumann

Andreas Heumann

dimanche, 26 novembre 2017

Jean de La Fontaine (extrait de Roman de romans)

Peter Turnley.jpgLa Fontaine (Jean de)
Commençons par tordre le cou aux légendes. Comme le souligne Patrick Dandrey : « Les animaux ne forment qu’un tiers, à peu près, des quatre cents personnages des Fables. Les deux cent quarante Fables ne constituent qu’une part, imposante mais relative, de la production d’un poète, qui composa aussi : soixante-quatre contes, un roman mêlé de prose et de vers, une idylle héroïque, deux livrets d’opéra, deux tragédies (l’une lyrique et inachevée), deux comédies, un ballet comique, les fragments d’un songe, un poème scientifique, trois épîtres critiques en vers, un poème chrétien, deux paraphrases de textes sacrés, une relation de voyage, six élégies, des satires, odes, ballades, madrigaux, chansons, épithalames, épigrammes, un pastiche, des traductions de vers latins, les lettres, beaucoup de vers de circonstances et de pièces perdues… Bilan estimable pour un paresseux. » Chateaubriand le considérait comme son dieu et il avait raison. La Fontaine, c’est la meilleure des thérapies, quand on est accablé, après avoir été obligé de lire mauvais livres, notes, rapports ou articles horriblement écrits. Un bain de jouvence ! Sans doute aucun écrivain français n’est arrivé à ce sens du raccourci, de l’épure, et de l’harmonie. Il dit en deux vers ce que beaucoup peinent à exprimer en de longues pages ou même volumes. Goût pour le bonheur, individualisme, sagesse, esprit pénétrant, imagination, tout y est. En relisant les Fables, on est étonné d’y trouver autant d’expressions encore utilisées aujourd’hui. On peut mesurer son génie en comparant avec l’original dont il s’est inspiré : ici, La Cigale et les fourmis, de Ésope (6e siècle avant J.-C.) : « Pendant l’hiver, leur blé étant humide, les fourmis le faisaient sécher. La cigale, mourant de faim, leur demandait de la nourriture. Les fourmis lui répondirent : – Pourquoi en été n’amassais-tu pas de quoi manger ? – Je n’étais pas inactive, dit celle-ci, mais je chantais mélodieusement. Les fourmis se mirent à rire. – Eh bien, si en été tu chantais, maintenant que c’est l’hiver, danse. Cette fable montre qu’il ne faut pas être négligent en quoi que ce soit, si l’on veut éviter les chagrins et les dangers. » Ses contes et tout ce qu’il a écrit sont touchés par la grâce. S’il ne fallait retenir que quelques citations de notre langue, on y trouverait sans doute : « Amants, heureux amants, voulez-vous voyager ? Que ce soit aux rives prochaines ; Soyez-vous l’un à l’autre un monde toujours beau, toujours divers, toujours nouveau ; Tenez-vous lieu de tout, comptez pour rien le reste… » Et : « J’aime le jeu, l’amour, les livres, la musique, la ville et la campagne, enfin tout, il n’est rien qui ne me soit souverain bien, jusqu’au sombre plaisir d’un cœur mélancolique. » Ou le merveilleux : « Tout est mystère dans l'amour, ses flèches, son carquois, son flambeau, son enfance. Ce n'est pas l'ouvrage d'un jour que d'approfondir cette science. » Ou encore : « Bornons ici cette carrière. Les longs ouvrages me font peur. Loin d’épuiser une matière, on n’en doit prendre que la fleur. » Et les fleurs sont encore présentes ici : « Je suis chose légère, et vole à tout sujet ; je vais de fleur en fleur ; et d’objet en objet… » En appendice à son Siècle de Louis XIV, Voltaire, dans son Catalogue des écrivains, écrit : « Dans la plupart de ses fables, il est infiniment au-dessus de tous ceux qui ont écrit avant et après lui, en quelque langue que ce puisse être ». Il l’a écrit lui-même : « Les Sages quelquefois, ainsi que l’écrevisse, marchant à reculons, tournent le dos au port. C’est l’art des matelots. C’est aussi l’artifice de ceux qui, pour couvrir quelque puissant effort, envisagent un point directement contraire, et font vers ce lieu-là courir leur adversaire. »
Extrait de Roman de romans, Raymond Alcovère, Editions les Réfractaires, 2016
Photo de Peter Turnley

jeudi, 23 novembre 2017

Solsbury Hill

DObUpSfWkAEOp8s.jpgLe lendemain, on est allés à Montpellier. Les rues baignaient dans l’humidité, derrière un rideau liquide. La ville se retrempait dans son passé. Les vieux hôtels émergeaient à peine de l’histoire. Elle était là, vivante, ils nous la racontaient, bruissant du cliquetis des armes et du va-et-vient des fantômes. Vers la fin d’après-midi, la ville s’est réveillée de son apathie. À nouveau, la lumière tamisait les pierres. Les jours suivants, le soleil a répandu sa clarté crue. Comme sous un projecteur, les gestes, se sont mis en perspective. Un désir vague mais puissant rôdait. Un moment que rien n’égale, les sens en attente, chaque souffle, chaque mot, débordant d’émotions à peine contenues. Presque à notre insu, une harmonie s’installait. Inexplicable mais on n’avait pas envie de l’expliquer. Parfois, aux premiers rayons du soleil, j’écoutais Solsbury Hill, puis je sortais jouer avec les perles de l’écume, seul dans la lumière du matin. On a passé trois semaines ensemble, presque sans se quitter, juste avant que je commence à travailler, à réfléchir à ce qui m’attendait, à tout ce que je refusais de voir.

Raymond Alcovère, "Le Bonheur est un drôle de serpent", roman, 2009, Lucie éditions

mercredi, 22 novembre 2017

Ça fait du bien !

henri cartier-bressonHenri Cartier-Bresson Peloponnèse, Grèce 1961

vendredi, 17 novembre 2017

Auguste Rodin, 1880

auguste rodin

jeudi, 16 novembre 2017

René Maltête, formidable incendie !

Formidable incendie, René Maltête.jpg

08:40 Publié dans humour, Photo | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rené maltête

lundi, 13 novembre 2017

Aujourd'hui ?

Christophe KiciakPour nous résumer, on en serait un peu là aujourd'hui non ?
(Image de Christophe Kiciak)

jeudi, 09 novembre 2017

Simulations

C8WkaQbXcAEqk3Y.jpg"Le monde est en grande partie un théâtre bâti sur des histoires de simulations féminines. Les hommes sont des naïfs qui croient dominer le jeu, ils en sont les dupes."

Philippe Sollers

mardi, 07 novembre 2017

Doisneau Rue Hippolyte Maindron Giacometti Paris 1958

Doisneau Rue Hippolyte Maindron Giacometti Paris 1958.jpg

lundi, 06 novembre 2017

Miles smiles

Miles DavisGiuseppe Pino, Miles Davis, 1983

20:09 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : miles davis

jeudi, 02 novembre 2017

La Mergellina

Yann Grancher.jpgÇa y est, la Mergellina, bourdonnante de bateaux, le bleu de la mer est limpide, presque évanescent, couche parfaite de bleu, tranche napolitaine, féerique. Je suis plongée dans les couleurs, assise, paisible, l’âme secouée, les yeux fixés sur le lointain du port.

Sous un micocoulier, les feuilles vert-pâle se trémoussent dans un bruit d’orgues puis lampées plus basses, fondantes, andante avec cette rafale ardente, pianissimo vent coulis, trémulement des frondaisons, poussées plus lascives des basses encore par les côtés, se laisser bercer, musique qui revient et ne s’arrête jamais, roulis de cloches, coulée mauve dans le crépitement du soleil, ondoiement sonore en diagonale se faufilant entre les maisons, lignes croisées qui se brisent, parterre de roses roses devant moi, feu sous le soleil, balancement léger, vivifiant.

Raymond Alcovère, extrait de Fugue baroque, roman, prix 98 de la ville de Balma

Photo de Yann Grancher