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lundi, 26 août 2024

Sur la lecture

Marcel Proust"En réalité, chaque lecteur est quand il lit, le propre lecteur de soi-même. L’ouvrage de l’écrivain n’est qu’une espèce d’instrument optique qu’il offre au lecteur afin de lui permettre de discerner ce que sans ce livre, il n’eût peut-être pas vu en soi-même. La reconnaissance en soi-même, par le lecteur, de ce que dit le livre, est la preuve de la vérité de celui-ci et vice-versa, au moins dans une certaine mesure, la différence entre les deux textes pouvant être souvent imputée non à l’auteur mais au lecteur."

Marcel Proust, Le temps retrouvé

vendredi, 23 août 2024

Mais c'est quelquefois au moment où tout nous semble perdu

Marcel Proust"Mais c'est quelquefois au moment où tout nous semble perdu que l'avertissement arrive qui peut nous sauver, on a frappé à toutes les portes qui ne donnent sur rien, et la seule par où on peut entrer et qu'on aurait cherchée en vain pendant cent ans, on y heurte sans le savoir, et elle s'ouvre."

Marcel Proust

lundi, 26 février 2024

Proust en famille

Marcel ProustMarcel Proust, à la droite de sa mère et son jeune frère Robert, à gauche, qui a fait des études de médecine et est devenu chirurgien…

samedi, 20 janvier 2024

Proust va gagner

Marcel Proust"C’était les événements qui survenaient dans le livre que je lisais ; il est vrai que les personnages qu’ils affectaient n’étaient pas « réels », comme disait Françoise. Mais tous les sentiments que nous font éprouver la joie ou l’infortune d’un personnage réel ne se produisent en nous que par l’intermédiaire d’une image de cette joie ou de cette infortune ; l’ingéniosité du premier romancier consista à comprendre que dans l’appareil de nos émotions, l’image étant le seul élément essentiel, la simplification qui consisterait à supprimer purement et simplement les personnages réels serait un perfectionnement décisif. Un être réel, si profondément que nous sympathisions avec lui, pour une grande part est perçu par nos sens, c’est-à-dire nous reste opaque, offre un poids mort que notre sensibilité ne peut soulever. Qu’un malheur le frappe, ce n’est qu’en une petite partie de la notion totale que nous avons de lui que nous pourrons en être émus ; bien plus, ce n’est qu’en une partie de la notion totale qu’il a de soi qu’il pourra l’être lui-même. La trouvaille du romancier a été d’avoir l’idée de remplacer ces parties impénétrables à l’âme par une quantité égale de parties immatérielles, c’est-à-dire que notre âme peut s’assimiler. Qu’importe dès lors que les actions, les émotions de ces êtres d’un nouveau genre nous apparaissent comme vraies, puisque nous les avons faites nôtres, puisque c’est en nous qu’elles se produisent, qu’elles tiennent sous leur dépendance, tandis que nous tournons fiévreusement les pages du livre, la rapidité de notre respiration et l’intensité de notre regard. Et une fois que le romancier nous a mis dans cet état, où comme dans tous les états purement intérieurs, toute émotion est découplée, où son livre va nous troubler à la façon d’un rêve mais d’un rêve plus clair que ceux que nous avons en dormant et dont le souvenir durera davantage, alors, voici qu’il déchaîne en nous pendant une heure tous les bonheurs et tous les malheurs possibles dons nous mettrions dans la vie des années à connaître quelques uns."
Marcel Proust

samedi, 18 novembre 2023

Des puissances autres

F-vkot_XcAADOl5.jpg« L'intelligence n'est pas l'instrument le plus subtil, le plus puissant, le plus approprié pour saisir le Vrai...
c'est la vie qui peu à peu, cas par cas, nous permet de remarquer que ce qui est le plus important pour notre cœur, ou pour notre esprit, ne nous est pas appris par le raisonnement mais par des puissances autres.»
Marcel Proust

samedi, 11 février 2023

Le sens artistique

Marcel Proust, Linda Moro« Le sens artistique, c’est-à-dire la soumission à la réalité intérieure. »

Marcel Proust

Photo de Linda Moro

mardi, 07 février 2023

Le propre lecteur de soi-même

Marcel Proust"En réalité, chaque lecteur est, quand il lit, le propre lecteur de soi-même. L’ouvrage de l’écrivain n’est qu’une espèce d’instrument d’optique qu’il offre au lecteur afin de lui permettre de discerner ce que, sans ce livre, il n’eût peut-être pas vu en soi-même."

Marcel Proust

Photo de Jasper Tejano

jeudi, 29 septembre 2022

Soyez jeune !

Marcel Proust, Gallimard, La Pléiade1972 : Gallimard veut s'attirer un public plus jeune. Jean-Marie Périer photographie Sylvie Vartan sur Sunset Boulevard, en train de lire le tome 1 de La Recherche en Pléiade.

mercredi, 11 mai 2022

Désir

Marcel Proust, désir« Il est très rare qu’un bonheur vienne se poser précisément sur le désir qui l’avait appelé. »

Marcel Proust

mercredi, 04 mai 2022

En nous

Tomáš Tisoň (Czech Republic).jpg« Ce qui semble extérieur, c’est en nous que nous le découvrons. » Marcel Proust

Photo de Tomas Tison

vendredi, 25 mars 2022

Moeurs

Marcel Proust, robert doisneauAussi est-il inutile d'observer les mœurs, puisqu'on peut les déduire des lois psychologiques.

Marcel Proust, A l'ombre des jeunes filles en fleur

Photo : Robert Doisneau

dimanche, 13 mars 2022

Savoir

Marcel ProustSavoir ne permet pas toujours d'empêcher, mais du moins les choses que nous savons, nous les tenons, sinon entre nos mains, du moins dans notre pensée où nous les disposons à notre gré, ce qui nous donne l'illusion d'une sorte de pouvoir sur elles.

Marcel Proust

samedi, 12 mars 2022

La trouvaille du romancier

1613731834.jpgC’était les événements qui survenaient dans le livre que je lisais ; il est vrai que les personnages qu’ils affectaient n’étaient pas « réels », comme disait Françoise. Mais tous les sentiments que nous font éprouver la joie ou l’infortune d’un personnage réel ne se produisent en nous que par l’intermédiaire d’une image de cette joie ou de cette infortune ; l’ingéniosité du premier romancier consista à comprendre que dans l’appareil de nos émotions, l’image étant le seul élément essentiel, la simplification qui consisterait à supprimer purement et simplement les personnages réels serait un perfectionnement décisif. Un être réel, si profondément que nous sympathisions avec lui, pour une grande part est perçu par nos sens, c’est-à-dire nous reste opaque, offre un poids mort que notre sensibilité ne peut soulever. Qu’un malheur le frappe, ce n’est qu’en une petite partie de la notion totale que nous avons de lui que nous pourrons en être émus ; bien plus, ce n’est qu’en une partie de la notion totale qu’il a de soi qu’il pourra l’être lui-même. La trouvaille du romancier a été d’avoir l’idée de remplacer ces parties impénétrables à l’âme par une quantité égale de parties immatérielles, c’est-à-dire que notre âme peut s’assimiler. Qu’importe dès lors que les actions, les émotions de ces êtres d’un nouveau genre nous apparaissent comme vraies, puisque nous les avons faites nôtres, puisque c’est en nous qu’elles se produisent, qu’elles tiennent sous leur dépendance, tandis que nous tournons fiévreusement les pages du livre, la rapidité de notre respiration et l’intensité de notre regard. Et une fois que le romancier nous a mis dans cet état, où comme dans tous les états purement intérieurs, toute émotion est découplée, où son livre va nous troubler à la façon d’un rêve mais d’un rêve plus clair que ceux que nous avons en dormant et dont le  souvenir durera davantage, alors, voici qu’il déchaîne en nous pendant une heure tous les bonheurs et tous les malheurs possibles dons nous mettrions dans la vie des années à connaître quelques uns.

Marcel Proust

16:43 Publié dans écriture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marcel proust

vendredi, 04 mars 2022

Pouvoir réfléchissant

2518995047.jpg"De même ceux qui produisent des œuvres géniales ne sont pas ceux qui vivent dans le milieu le plus délicat, qui ont la conversation la plus brillante, la culture la plus étendue, mais ceux qui ont eu le pouvoir, cessant brusquement de vivre pour eux-mêmes, de rendre leur personnalité pareille à un miroir, de telle sorte que leur vie si médiocre d'ailleurs qu'elle pouvait être mondainement et même, dans un certain sens, intellectuellement parlant, s'y reflète, le génie consistant dans le pouvoir réfléchissant et non dans la qualité intrinsèque du spectacle reflété."
Marcel Proust, A l'ombre des jeunes filles en fleurs

mardi, 01 mars 2022

Notre personnalité sociale est une création de la pensée des autres

Masques du théâtre grec.jpgMais même au point de vue des plus insignifiantes choses de la vie, nous ne sommes pas un tout matériellement constitué, identique pour tout le monde et dont chacun n'a qu'à aller prendre connaissance comme d'un cahier des charges ou d'un testament; notre personnalité sociale est une création de la pensée des autres. Même l'acte si simple que nous appelons "voir une personne que nous connaissons" est en partie un acte intellectuel. Nous remplissons l'apparence physique de l'être que nous voyons de toutes les notions que nous avons sur lui, et dans l'aspect total que nous nous représentons, ces notions ont certainement la plus grande part. Elles finissent par gonfler si parfaitement les joues, par suivre en une adhérence si exacte la ligne du nez, elles se mêlent si bien de nuancer la voix comme si celle-ci n'était qu'une transparente enveloppe, que chaque fois que nous voyons ce visage et que nous entendons cette voix, ce sont ces notions que nous retrouvons, que nous écoutons.

Marcel Proust, Du côté de chez Swann

Masques du théâtre grec

dimanche, 27 février 2022

Voix

bernard plossu, Marcel Proust« Rien n’altère les qualités matérielles de la voix comme de contenir de la pensée : la sonorité des diphtongues, l’énergie des labiales en sont influencées. La diction l’est aussi. » : Marcel Proust.

Photo : Bernard Plossu

lundi, 31 janvier 2022

Se représenter l'inconnu

Tyler Spangler.jpg"Pour se représenter une situation inconnue l'imagination emprunte des éléments connus et, à cause de cela, ne se la représente pas."

Marcel Proust, Albertine disparue

Photo : Tyler Spangler

jeudi, 20 mai 2021

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dimanche, 08 novembre 2020

« Les plats se lisent et les livres se mangent.» Marcel Proust

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mardi, 26 mai 2020

Humour proustien

Marcel Proust, félix vallotton—«Ah! est-ce que vous connaissez quelqu’un à Balbec? dit mon père. Justement ce petit-là doit y aller passer deux mois avec sa grand’mère et peut-être avec ma femme.»

Legrandin pris au dépourvu par cette question à un moment où ses yeux étaient fixés sur mon père, ne put les détourner, mais les attachant de seconde en seconde avec plus d’intensité—et tout en souriant tristement—sur les yeux de son interlocuteur, avec un air d’amitié et de franchise et de ne pas craindre de le regarder en face, il sembla lui avoir traversé la figure comme si elle fût devenue transparente, et voir en ce moment bien au delà derrière elle un nuage vivement coloré qui lui créait un alibi mental et qui lui permettrait d’établir qu’au moment où on lui avait demandé s’il connaissait quelqu’un à Balbec, il pensait à autre chose et n’avait pas entendu la question. Habituellement de tels regards font dire à l’interlocuteur: «A quoi pensez-vous donc?» Mais mon père curieux, irrité et cruel, reprit:

—«Est-ce que vous avez des amis de ce côté-là, que vous connaissez si bien Balbec?»

Dans un dernier effort désespéré, le regard souriant de Legrandin atteignit son maximum de tendresse, de vague, de sincérité et de distraction, mais, pensant sans doute qu’il n’y avait plus qu’à répondre, il nous dit:

—«J’ai des amis partout où il y a des groupes d’arbres blessés, mais non vaincus, qui se sont rapprochés pour implorer ensemble avec une obstination pathétique un ciel inclément qui n’a pas pitié d’eux.

—«Ce n’est pas cela que je voulais dire, interrompit mon père, aussi obstiné que les arbres et aussi impitoyable que le ciel. Je demandais pour le cas où il arriverait n’importe quoi à ma belle-mère et où elle aurait besoin de ne pas se sentir là-bas en pays perdu, si vous y connaissez du monde?»

—«Là comme partout, je connais tout le monde et je ne connais personne, répondit Legrandin qui ne se rendait pas si vite; beaucoup les choses et fort peu les personnes. Mais les choses elles-mêmes y semblent des personnes, des personnes rares, d’une essence délicate et que la vie aurait déçues. Parfois c’est un castel que vous rencontrez sur la falaise, au bord du chemin où il s’est arrêté pour confronter son chagrin au soir encore rose où monte la lune d’or et dont les barques qui rentrent en striant l’eau diaprée hissent à leurs mâts la flamme et portent les couleurs; parfois c’est une simple maison solitaire, plutôt laide, l’air timide mais romanesque, qui cache à tous les yeux quelque secret impérissable de bonheur et de désenchantement. Ce pays sans vérité, ajouta-t-il avec une délicatesse machiavélique, ce pays de pure fiction est d’une mauvaise lecture pour un enfant, et ce n’est certes pas lui que je choisirais et recommanderais pour mon petit ami déjà si enclin à la tristesse, pour son cœur prédisposé. Les climats de confidence amoureuse et de regret inutile peuvent convenir au vieux désabusé que je suis, ils sont toujours malsains pour un tempérament qui n’est pas formé. Croyez-moi, reprit-il avec insistance, les eaux de cette baie, déjà à moitié bretonne, peuvent exercer une action sédative, d’ailleurs discutable, sur un cœur qui n’est plus intact comme le mien, sur un cœur dont la lésion n’est plus compensée. Elles sont contre-indiquées àvotre âge, petit garçon. Bonne nuit, voisins», ajouta-t-il en nous quittant avec cette brusquerie évasive dont il avait l’habitude et, se retournant vers nous avec un doigt levé de docteur, il résuma sa consultation: «Pas de Balbec avant cinquante ans et encore cela dépend de l’état du cœur», nous cria-t-il.

Mon père lui en reparla dans nos rencontres ultérieures, le tortura de questions, ce fut peine inutile: comme cet escroc érudit qui employait à fabriquer de faux palimpsestes un labeur et une science dont la centième partie eût suffi à lui assurer une situation plus lucrative, mais honorable, M. Legrandin, si nous avions insisté encore, aurait fini par édifier toute une éthique de paysage et une géographie céleste de la basse Normandie, plutôt que de nous avouer qu’à deux kilomètres de Balbec habitait sa propre sœur, et d’être obligé à nous offrir une lettre d’introduction qui n’eût pas été pour lui un tel sujet d’effroi s’il avait été absolument certain,—comme il aurait dû l’être en effet avec l’expérience qu’il avait du caractère de ma grand’mère—que nous n’en aurions pas profité.

Du côté de chez Swann

Felix Vallotton