vendredi, 23 février 2024
Ce point final n’en est peut-être pas un
21:21 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne
mardi, 27 septembre 2022
Jetée d’étoiles dans le ciel bleu nuit
20:49 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne
lundi, 29 août 2022
Tout avait commencé avec les pommes
Étonnante amitié entre Cézanne et Zola, nouée dans l’enfance. Zola a pressenti le génie de Cézanne, il l’a encouragé, poussé à persévérer. Puis comme s’il avait reconnu en lui sa part maudite, ses doutes, sa difficulté à créer, il ne l’a plus supporté.
Il le tue symboliquement dans L’Œuvre, ce roman qui provoquera la rupture, où Cézanne découvre son portrait déformé. Après avoir lu le livre, il écrit sa dernière lettre à Zola et termine par ses mots : Tout à toi sous l’impulsion des temps écoulés. La vie de l’écrivain était devenue de plus en plus publique, celle du peintre retirée. Au début, c’était le contraire.
Tout avait commencé avec les pommes. Zola adolescent chétif, renfermé, italien par son père et parisien par son accent, est mal accepté ; il est mis en quarantaine par les autres. Un jour, Cézanne, plutôt solide, bien dans son corps et de deux ans son aîné, transgresse l’interdit : “ Je ne pouvais m’empêcher de lui parler quand même ”. Il reçoit une raclée de toute la cour, petits et grands. Le lendemain, pour le remercier, Zola lui offre un plateau de pommes. Lesquelles reviendront constamment dans sa peinture. Leur amitié venait de naître, elle ne cesserait pas. Malgré la rupture, l’éloignement, quand il apprendra sa mort, bien des années plus tard, Cézanne, fou de douleur, s’enfermera dans sa chambre.
Toute sa vie il peindra des pommes.
Raymond Alcovère, extrait de "Le Sourire de Cézanne", roman, éditions N&B, 2007
19:03 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne
mardi, 22 février 2022
L’acte de voir ne se détermine pas à partir de l’œil mais à partir de l’éclaircie de l’être
Rien de plus apaisant que les fresques de Piero della Francesca. Comme Cézanne, il a poursuivi un chemin solitaire, sans chercher la gloire ni la protection d’hommes influents, préférant l’œuvre aux intrigues du monde. Reste la plénitude, un sentiment d’éternité. Personne n’a imprimé à ses personnages autant de grâce, de sérénité sur les visages, jamais on n’a pu lire une telle absence d’anxiété jusque dans les scènes de violence, de guerre.
Visages proches de ceux de Cézanne d’ailleurs, hiératiques, paisibles. L’acte de voir ne se détermine pas à partir de l’œil mais à partir de l’éclaircie de l’être, cette phrase de Heidegger, Léonore la met en exergue de son livre.
Raymond Alcovère, extrait de "Le Sourire de Cézanne", roman, 2007, n & b éditions
PIERO DELLA FRANCESCA ; LE DECES D'ADAM ; DETAIL
17:52 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne, piero della francesca
vendredi, 18 février 2022
Autant s’attaquer au plus difficile, comprendre la vie dans son entier
Gaétan se sent bien dans cette relation à priori bancale avec Léonore. Beaucoup de gens ont tenté de l’en dissuader. Certains sont rassurés lorsque tout tourne mal, surtout une histoire d’amour. Encore une preuve, ce qui se passe là est important. Lieu de l’impossible, peut-être le dernier, le seul, du réel. Presque par provocation, il n’a qu’une envie, être heureux avec Léonore. Pour aimer vraiment, il faut être contre la société, contre les autres. Parfois Gaétan veut tout abandonner, ses études, ses amis, Léonore, partir à l’autre bout du monde ou se mettre au jeu, tout brûler, ne rien conserver, aucune connaissance. De cette ivresse, il revient apaisé. Replonge dans l’étude. Là il reste des secrets, des territoires vierges. Autant s’attaquer au plus difficile, comprendre la vie dans son entier.
Raymond Alcovère, "Le Sourire de Cézanne", roman, N & B éditions, 2007
18:27 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne
vendredi, 30 juillet 2021
Rien de pesant, de trop enraciné ici
17:51 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : montpellier, le sourire de cézanne
vendredi, 15 janvier 2021
L’acte de voir ne se détermine pas à partir de l’œil mais à partir de l’éclaircie de l’être
13:08 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne, piero della francesca
mercredi, 06 janvier 2021
Les sensations formant le fond de mon affaire, je crois être impénétrable
Des arbres, un coin de ciel safran, des branches de pins se balancent dans l’air doré, corps suspendus flottant au dessus du vide, vert sauge de la végétation, baigneurs, baigneuses, chaque tableau fait partie de l’unité du monde, une parcelle de l’univers, détachée afin de mieux le rejoindre. Il y a toujours une relation d’amour, de fusion dans sa composition." C’est comme si chaque point du tableau avait connaissance de tous les autres", écrira Rilke à propos de La Femme au gilet rouge, Madame Cézanne. "Les sensations formant le fond de mon affaire, je crois être impénétrable." A la question, écrivez une de vos pensées ou une citation dont vous approuvez le sens, Cézanne a répondu ces vers de Vigny : "Seigneur, vous m’avez fait puissant et solitaire. Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre." Le véritable vers est : "Hélas ! Je suis, Seigneur, puissant et solitaire..."
Raymond Alcovère, Le Sourire de Cézanne, éditions n & b, 2007, extrait
Autoportrait à la palette (remarquez le pouce !)
19:17 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cezanne, le sourire de cézanne
jeudi, 31 décembre 2020
Le catalan universel
Les tableaux de Miro sont des symphonies, des hymnes à la vie. Ciel bleu, céruléen, nuages rouges. Il se voulait catalan universel. Miro, étonnant de simplicité, de clairvoyance, avouant que les mots n’étaient pas sa spécialité. Pourtant : "Les choses suivent leur cours naturel. Elles poussent, elles mûrissent. Il faut greffer. Il faut irriguer, comme pour la salade. Ca mûrit dans mon esprit. Aussi je travaille toujours énormément de choses à la fois. Et même dans des domaines différents : peinture, gravure, lithographie, sculpture, céramique." Avec cette idée, de l’impression globale du tableau, qui revient. Pour moi, un tableau doit être comme des étincelles. Il faut qu’il éblouisse comme la beauté d’une femme ou d’un poème. Qu’il ait un rayonnement... Plus que le tableau lui-même, ce qui compte, c’est ce qu’il jette en l’air, ce qu’il répand. Miro, magicien, avec son désir d’être au plus près de la vie, des objets de tous les jours, ramenant de ses promenades sur la plage de Majorque des bouts de bois, de ficelle. Il voulait un art populaire et l’avait trouvé finalement. Partout du rouge, du bleu, de l’indigo, du jaune, la passion, voilà le catalan universel.
Raymond Alcovère, Extrait du roman : "Le sourire de Cézanne", 2007, éditions N & B
22:59 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : miro, le sourire de cézanne
mercredi, 30 décembre 2020
Paysage par temps calme
On peut passer des dizaines de fois devant un tableau de Poussin et ne rien voir. A son ami Chantelou : "Les choses esquelles il y a de la perfection ne se doivent pas voir à la hâte, mais avec temps, jugement et intelligence. Il faut user des mêmes moyens à les bien juger comme à les bien faire". L’émotion tisse son œuvre. L’espace est baigné d’une douce lumière, transfiguré, présence de la volupté, mais aussi de la volonté farouche des hommes, touches graciles de vert dans le jade du ciel. Une perfection qu’on devinait confusément est là, manifeste, sur la toile. Lumière romaine, tour à tour triomphante et souple, sensualité des corps, justes, voluptueux, jamais idéalisés, tout précise l’harmonie, la souplesse, l’éternel retour...
Cette œuvre : Paysage par temps calme. Le bleu de l’eau et des météores se contemplent, enserrent le paysage, un rêve entre les deux, lui aussi dédoublé par son reflet. Sinon presque rien, des animaux paisibles, la montagne se fond dans l’architecture des nuages, les feuilles de l’arbre sur la droite s’effilochent irréelles, ténues, graciles, les nuages s’envolent vers le haut du ciel, la sensation de calme est rassemblée, ramenée partout, innervée.
Un homme au premier plan s’appuie sur une canne, près de lui un chien mais leur regard flotte indifférent à cette beauté, ils en sont tellement pénétrés qu’ils n’ont pas besoin de la regarder. Le mouvement de leur corps est le lever de rideau de la scène. D’autres personnages, minuscules, des cavaliers, l’un d’entre eux lance sa monture à toute vitesse, il va quitter le tableau, il n’a pas place ici, son départ imminent le montre, la tranquillité va reprendre sa place.
Partout dans l’œuvre de Poussin, ces nuances de teintes qui sculptent le paysage, répandues sur les contours, cieux déchirés, adamantins, douceur infinie des regards, apaisante. Souvent, les personnages sont pris de frénésie, c’est l’orage, le grand vent de l’Histoire, la Bible, rien n’échappe à ce déferlement. Toujours les météores, les nuées décrivent l’action, les sentiments, la palette est infinie. Son but, la délectation, la sensualité pure, l’arrondi des corps, cette chair que l’on respire. Plus on regarde un tableau de Poussin, plus on y décèle d’harmonie, plus la vue s’éclaire, prend de l’expansion, devient assurée. La fièvre subtile qui se dégage de la composition gagne le spectateur.
Ainsi dans le Paysage avec les funérailles de Phocion, la lumière du soir est posée subreptice, dans une fureur printanière, multitude des plans entrelacés. Un arbre torturé berce sa palme avec indolence. A un moment il y a résonance entre la composition, le motif, les émotions décrites. Des tableaux comme des opéras. Une œuvre ailée.
Raymond Alcovère, Le Sourire de Cézanne, roman, éditions n & b, 2007, extrait
10:10 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne, poussin
jeudi, 09 juillet 2020
Toute impatience a disparu
Jusqu’à la fin Cézanne s’est consacré au travail. La série de portraits du jardinier Vallier est éblouissante. J’aime par dessus tout l’aspect des gens qui ont vieilli sans faire violence aux usages en se laissant aller aux lois du temps. Je hais l’effort de ces lois. L’homme assis tranquillement dans son jardin, c’est Cézanne, en paix, fondu dans la nature. A un moment on est l’œuvre, l’artiste a atteint son but. Le jardinier Vallier, c’est nous. Voilà son legs ; visiblement, toute impatience a disparu.
Extrait du roman "Le sourire de Cézanne", Raymond Alcovère, n & b éditions, 2007
Cézanne, Le jardinier Vallier
11:48 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne, cezanne
jeudi, 18 juin 2020
La Danse des vifs, une lecture du "Sourire de Cézanne", par Jean-Louis Kuffer
20:24 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean-louis kuffer, le sourire de cézanne
dimanche, 10 mai 2020
Le Sourire de Cézanne
Étonnante amitié entre Cézanne et Zola, nouée dans l’enfance. Zola a pressenti le génie de Cézanne, il l’a encouragé, poussé à persévérer. Puis comme s’il avait reconnu en lui sa part maudite, ses doutes, sa difficulté à créer, il ne l’a plus supporté.
Il le tue symboliquement dans L’Œuvre, ce roman qui provoquera la rupture, où Cézanne découvre son portrait déformé. Après avoir lu le livre, il écrit sa dernière lettre à Zola et termine par ses mots : Tout à toi sous l’impulsion des temps écoulés. La vie de l’écrivain était devenue de plus en plus publique, celle du peintre retirée. Au début, c’était le contraire.
Tout avait commencé avec les pommes. Zola adolescent chétif, renfermé, italien par son père et parisien par son accent, est mal accepté ; il est mis en quarantaine par les autres. Un jour, Cézanne, plutôt solide, bien dans son corps et de deux ans son aîné, transgresse l’interdit : “ Je ne pouvais m’empêcher de lui parler quand même ”. Il reçoit une raclée de toute la cour, petits et grands. Le lendemain, pour le remercier, Zola lui offre un plateau de pommes. Lesquelles reviendront constamment dans sa peinture. Leur amitié venait de naître, elle ne cesserait pas. Malgré la rupture, l’éloignement, quand il apprendra sa mort, bien des années plus tard, Cézanne, fou de douleur, s’enfermera dans sa chambre.
Toute sa vie il peindra des pommes.
Des arbres, un coin de ciel safran, des branches de pins se balancent dans l’air doré, corps suspendus flottant au dessus du vide, vert sauge de la végétation, baigneurs, baigneuses, chaque tableau fait partie de l’unité du monde, une parcelle de l’univers, détachée afin de mieux le rejoindre. Il y a toujours une relation d’amour, de fusion dans sa composition." C’est comme si chaque point du tableau avait connaissance de tous les autres", écrira Rilke à propos de La Femme au gilet rouge, Madame Cézanne. "Les sensations formant le fond de mon affaire, je crois être impénétrable." A la question, écrivez une de vos pensées ou une citation dont vous approuvez le sens, Cézanne a répondu ces vers de Vigny : "Seigneur, vous m’avez fait puissant et solitaire. Laissez-moi m’endormir du sommeil de la terre." Le véritable vers est : "Hélas ! Je suis, Seigneur, puissant et solitaire..."
Elle l’imagine, se levant de bon matin, préparer ses pinceaux et son chevalet, partir d’un bon pas, l’esprit en ébullition, ou très placide peut-être, à travers la campagne aixoise, tenter d’en saisir le mystère, le regard fixé sur la Sainte-Victoire. "Regardez cette Sainte-Victoire, quel élan, quelle soif impérieuse de soleil et quelle mélancolie le soir, quand toute cette pesanteur retombe. Les blocs étaient du feu. Il y a du feu encore en eux. L’ombre, le jour a l’air de reculer en frissonnant, d’avoir peur d’eux."
La dernière Sainte-Victoire de Cézanne : une assomption, sombre, crépusculaire, en bleu, vert, marron et noir. Il a tout concentré, teintes de blocs soyeux, masses terrifiantes agglutinées, taches blanches disséminées. L’existence est inachevée, ce que nous en décelons reste partiel. Une autre est son propre reflet dans une eau glauque, une eau de nuit, un vitrail.
Il s’est vite détaché des impressionnistes, la bande impressionniste à qui il manque un maître, des idées, comme il l’écrira plus tard. Ce n’est pas l’impression d’ensemble, l’atmosphère du tableau qui l’intéresse mais le ressort intime des choses, leur structure, la relation secrète. Pourtant grâce à eux, et Pissaro, l’humble et colossal Pissaro, le premier qui l’aidera à éclaircir sa palette, il fera une découverte déterminante : "La matière j’ai voulu la copier, je n’arrivais pas, mais j’ai été content de moi lorsque j’ai découvert qu’il fallait la représenter par autre chose... par de la couleur. La nature n’est pas en surface, elle est en profondeur. Les couleurs sont l’expression, à cette surface, de cette profondeur, elles montent des racines du monde."
Raymond Alcovère, extraits de "Le Sourire de Cézanne", roman, éditions n&b, 2007
02:47 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cezanne, le sourire de cézanne
samedi, 04 janvier 2020
Silencieux, envahis par un bien-être profond
C’est dimanche, au bord de la mer. Le vent souffle en bourrasques, les promeneurs ont rebroussé chemin. Luminosité coupante. Il y a de la magie dans l’atmosphère, univers en suspens, près de basculer. Phénomène rarissime, on aperçoit le Canigou et la chaîne des Pyrénées en surimpression sur l’horizon. On tient à peine debout. Contre la violence des éléments, ils marchent. Puis ils s’arrêtent, seuls au milieu de l’espace.
Soudain Léonore le prend dans ses bras, l’embrasse à le dévorer. Ils sont serrés. Le vent hurle, soulève le sable. Elle crie : « dis-moi que tu m’aimes, que tu m’aimeras toujours ». Il l’embrasse en pleurs et crie à son tour : « je te le jure ». La tempête est effroyable. Ils tombent par terre, incapables de se détacher. Gaétan est sûr que, s’ils le faisaient à cet instant, ce serait à jamais. Emportés par un souffle qui vient du dedans, accrochés l’un à l’autre avec l’énergie du désespoir.
Le sable leur fouette le visage, s’insinue mais ils ne le sentent pas ou bien cette douleur est encore du plaisir. Au bout d’un temps, le vent a creusé un abri autour. Ils restent immobiles, puis la tension tant en eux qu’à l’extérieur s’apaise. Ils se lèvent sans dire un mot. Bientôt avec l’accalmie, ils ne seront plus seuls. Ils s’en vont, avec la sensation d’avoir été au bout du voyage, d’en être sortis vainqueurs. Silencieux, envahis par un bien-être profond.
Raymond Alcovère, extrait de "Le Sourire de Cézanne", roman, 2007 éditions N&B
Turner, Vapeur dans la tempête de neige
19:31 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne, turner
lundi, 23 décembre 2019
Il retourne près d’elle
Le navire s’élance sur la mer de Marmara, perlée de lumières. La nuit tombe, enfin le silence. Un vent puissant, roboratif, soulève l’écume. Il est heureux dans cette solitude. Devant ses yeux, elle danse toujours. Les reflets de la lune courent sur le glacis des vagues. Il imagine les criques brûlées de soleil, l’odeur des pins, des cyprès, les crépuscules amarante et puis l’histoire, majestueuse, inscrite dans les paysages. Mais ces sensations le laissent de marbre aujourd’hui. Il retourne près d’elle.
Raymond Alcovère, Le Sourire de Cézanne, roman, 2007, éditions N&B
19:45 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne
mercredi, 06 novembre 2019
Le vent âpre de novembre
Le vent âpre de novembre déjà l’entoure, odeur du froid qui s’insinue, feu de la terre. Cézanne, à la fin, ne peint plus que des couleurs. Un vent de folie balaye ses toiles. "La couleur est le lieu où notre cerveau et l’univers se rencontrent". La lumière absolue, irradiante, déborde tout. Le dessin et la couleur ne sont plus distincts : " quand la couleur est à sa richesse, la forme est à sa plénitude."
Raymond Alcovère, extrait du roman "Le Sourire de Cézanne", éditions n & b, 2007
16:50 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne
jeudi, 28 mars 2019
Le catalan universel
Les tableaux de Miro sont des symphonies, des hymnes à la vie. Ciel bleu, céruléen, nuages rouges. Il se voulait catalan universel. Miro, étonnant de simplicité, de clairvoyance, avouant que les mots n’étaient pas sa spécialité. Pourtant : "Les choses suivent leur cours naturel. Elles poussent, elles mûrissent. Il faut greffer. Il faut irriguer, comme pour la salade. Ca mûrit dans mon esprit. Aussi je travaille toujours énormément de choses à la fois. Et même dans des domaines différents : peinture, gravure, lithographie, sculpture, céramique." Avec cette idée, de l’impression globale du tableau, qui revient. Pour moi, un tableau doit être comme des étincelles. Il faut qu’il éblouisse comme la beauté d’une femme ou d’un poème. Qu’il ait un rayonnement... Plus que le tableau lui-même, ce qui compte, c’est ce qu’il jette en l’air, ce qu’il répand. Miro, magicien, avec son désir d’être au plus près de la vie, des objets de tous les jours, ramenant de ses promenades sur la plage de Majorque des bouts de bois, de ficelle. Il voulait un art populaire et l’avait trouvé finalement. Partout du rouge, du bleu, de l’indigo, du jaune, la passion, voilà le catalan universel.
Raymond Alcovère, Extrait du roman : "Le sourire de Cézanne", 2007, éditions N & B
20:46 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : miro, le sourire de cézanne
mardi, 19 mars 2019
Paysage par temps calme
On peut passer des dizaines de fois devant un tableau de Poussin et ne rien voir. A son ami Chantelou : "Les choses esquelles il y a de la perfection ne se doivent pas voir à la hâte, mais avec temps, jugement et intelligence. Il faut user des mêmes moyens à les bien juger comme à les bien faire". L’émotion tisse son œuvre. L’espace est baigné d’une douce lumière, transfiguré, présence de la volupté, mais aussi de la volonté farouche des hommes, touches graciles de vert dans le jade du ciel. Une perfection qu’on devinait confusément est là, manifeste, sur la toile. Lumière romaine, tour à tour triomphante et souple, sensualité des corps, justes, voluptueux, jamais idéalisés, tout précise l’harmonie, la souplesse, l’éternel retour...
Cette œuvre : Paysage par temps calme. Le bleu de l’eau et des météores se contemplent, enserrent le paysage, un rêve entre les deux, lui aussi dédoublé par son reflet. Sinon presque rien, des animaux paisibles, la montagne se fond dans l’architecture des nuages, les feuilles de l’arbre sur la droite s’effilochent irréelles, ténues, graciles, les nuages s’envolent vers le haut du ciel, la sensation de calme est rassemblée, ramenée partout, innervée.
Un homme au premier plan s’appuie sur une canne, près de lui un chien mais leur regard flotte indifférent à cette beauté, ils en sont tellement pénétrés qu’ils n’ont pas besoin de la regarder. Le mouvement de leur corps est le lever de rideau de la scène. D’autres personnages, minuscules, des cavaliers, l’un d’entre eux lance sa monture à toute vitesse, il va quitter le tableau, il n’a pas place ici, son départ imminent le montre, la tranquillité va reprendre sa place.
Partout dans l’œuvre de Poussin, ces nuances de teintes qui sculptent le paysage, répandues sur les contours, cieux déchirés, adamantins, douceur infinie des regards, apaisante. Souvent, les personnages sont pris de frénésie, c’est l’orage, le grand vent de l’Histoire, la Bible, rien n’échappe à ce déferlement. Toujours les météores, les nuées décrivent l’action, les sentiments, la palette est infinie. Son but, la délectation, la sensualité pure, l’arrondi des corps, cette chair que l’on respire. Plus on regarde un tableau de Poussin, plus on y décèle d’harmonie, plus la vue s’éclaire, prend de l’expansion, devient assurée. La fièvre subtile qui se dégage de la composition gagne le spectateur.
Ainsi dans le Paysage avec les funérailles de Phocion, la lumière du soir est posée subreptice, dans une fureur printanière, multitude des plans entrelacés. Un arbre torturé berce sa palme avec indolence. A un moment il y a résonance entre la composition, le motif, les émotions décrites. Des tableaux comme des opéras. Une œuvre ailée.
Raymond Alcovère, Le Sourire de Cézanne, roman, éditions n & b, 2007, extrait
17:57 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : nicolas poussin, le temps calme, le sourire de cézanne
mardi, 12 mars 2019
La dernière Sainte-Victoire de Cézanne
La dernière Sainte-Victoire de Cézanne : une assomption, sombre, crépusculaire, en bleu, vert, marron et noir. Il a tout concentré, teintes de blocs soyeux, masses terrifiantes agglutinées, taches blanches disséminées. L’existence est inachevée, ce que nous en décelons reste partiel. Une autre est son propre reflet dans une eau glauque, une eau de nuit, un vitrail.
Il s’est vite détaché des impressionnistes, la bande impressionniste à qui il manque un maître, des idées, comme il l’écrira plus tard. Ce n’est pas l’impression d’ensemble, l’atmosphère du tableau qui l’intéresse mais le ressort intime des choses, leur structure, la relation secrète. Pourtant grâce à eux, et Pissaro, l’humble et colossal Pissaro, le premier qui l’aidera à éclaircir sa palette, il fera une découverte déterminante : "La matière j’ai voulu la copier, je n’arrivais pas, mais j’ai été content de moi lorsque j’ai découvert qu’il fallait la représenter par autre chose... par de la couleur. La nature n’est pas en surface, elle est en profondeur. Les couleurs sont l’expression, à cette surface, de cette profondeur, elles montent des racines du monde."
Raymond Alcovère, extrait de "Le Sourire de #Cézanne, Roman, 2007, N&B éditions
19:35 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne
samedi, 09 mars 2019
Cézanne la plénitude
Léonore travaille à son livre. Voir c’est capter l’esprit du monde, le sensible. Peindre, saisir du regard l’ensemble, le devenir. Ce sera la vibration chez Cézanne, l’amour ingénu chez Chagall, la sensualité, sa finesse chez Titien, la compassion chez Greco, l’harmonie chez Poussin. Regard qui perce l’univers, trouve le lien, le point nodal. Rembrandt l’ombre, Caravage la rage, Fragonard la volupté. Cézanne la plénitude. Il échafaude, construit, lentement, pièce après pièce, le puzzle de la lumière. Posée comme équation fondamentale, elle vibre, éclatante, jubilatoire, sur la toile. Aucun peintre ne s’en est approché autant, peut-être.
Raymond Alcovère, extrait du roman "Le Sourire de Cézanne", éditions n&b, 2007
14:56 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne