lundi, 30 août 2010
Le sans-pourquoi
" Primo Levi a soif. Une congère s'est formée au bord d'une fenêtre. Il sort du baraquement, veut casser le morceau de glace pour étancher sa soif. Un kapo allemand l'interrompt. " Pourquoi ? " demande Primo Levi. Hier ist kein warum, répond le nazi ( " Ici, il n'y a pas de pourquoi. ").La réponse nazi vaut pour l'ensemble du camp. Le sans-pourquoi est le mot d'ordre d'un monde où aucune autre expérience n'est possible que la dévastation.Mais le sans-pourquoi est aussi, plus secrètement, le nom de ce qui brille dans les ténèbres. Un mystique du XVII° siècle, Angelus Silesius, écrit : " La rose est sans pourquoi, elle fleurit parce qu'elle fleurit. " Aucune causalité ne détermine la floraison de la rose ; elle existe pour rien, et cette libre gratuité coïncide avec la poésie elle-même. Le sans-pourquoi désigne ici le contraire de l'arbitraire nazi ; il est le nom de ce qui résiste à l'emprise. "
Prélude à la délivrance / Yannick Haenel François Meyronnis / L'Infini / Gallimard
22:51 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : prélude à la délivrance, yannick haenel, françois meyronnis
Commentaires
Le sans-pourquoi, c'est beau et cela fait envie. Etre sans-pourquoi, être, donc, il n'y a rien de plus reposant.
Écrit par : Frédérique M | mardi, 31 août 2010
Ne pas chercher d'explication et accepter le monde tel qu'il est même si il semble parfois absurde. Pas facile, mais c'est un beau chemin. Bises.
Écrit par : ariaga | samedi, 04 septembre 2010
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