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lundi, 09 mars 2009

Prélude à la délivrance (5)

DSCN3815.JPGL'impossibilité à vivre en dehors des critères de la valeur d'échange, et même à concevoir sa vie en dehors du marché, mène au malheur le plus boursouflant, ainsi qu'à l'atermoiement le plus boueux. Ni le confort, ni l'argent, ni même le pouvoir ne sont capables de combler les inconsolés du nihilisme. Rien ne compense l'inaccès à la poésie, même par l'abjection qui la condamne. Les inconsolés du nihilisme se sentent abandonnés, quand c'est eux-mêmes qui se sont abandonnés en recherchant ce qui précisément, ne les comble pas : l'argent, le confort et le pouvoir ; et en se détournant de cette jouissance poétique pourtant disponible à chaque instant, et qui fait signe, là, à portée de main, dans ce petit écart scintillant qui sépare chacun de son propre salut. Le sentiment d'être berné pousse en dernier ressort les plus amochés à se venger autant qu'à désirer avidement leur sanction.

Photo de Lionel André, la forêt des Carroz,mars 2009

Voir ici son blog, le texte vient aussi de son blog et du livre suivant :

41RWxvdxEgL__SS500_.jpgYannick Haenel, François Meyronnnis, Prélude à la délivrance, Gallimard 2009, collection L'Infini


samedi, 07 mars 2009

Prélude à la délivrance (4)

ErosPsycheAntonioCanova.jpg"Il y a ainsi des surgissements de poésie dans de brefs instants de musique, dans des gestes, des détails de peinture, des fragments d'architecture, des séquences furtives de cinéma. Ils agissent au vol, dans la rencontre. L'art existe par épiphanies. Et chacun évolue avec sa provision d'éclairs, de mémoires de jouissances. (...) L'épiphanie, on peut la trouver dans la vie. Il peut y avoir des gestes passionnants dans la rue, des situations brusquement ouvertes, des inflexions de lumière qui traversent le corps d'une passante. Pour reprendre les mots qu'Ezra Pound appliquait au paradis, l'art existe en "fragments inattendus". Il relève du coup de foudre."

Yannick Haenel, François Meyronnnis, Prélude à la délivrance, Gallimard 2009, collection L'Infini

Canova, Eros et Psyché, fragment

lundi, 02 mars 2009

Bataille et Lautréamont

bataille2.jpg« Tout au long du XXe siècle, des écrivains ont mis leurs phrases à l’épreuve des Chants et des Poésies : Jarry, Tzara, Aragon et Breton, Ponge, Sollers, Debord. A chaque fois se produit un renversement des perspectives, une avant-garde naît, les coordonnées se redistribuent. »

Yannick Haenel ; lire ici ; en fin de note, voir et entendre Bataille (ici en photo)

vendredi, 27 février 2009

Prélude à la délivrance (3)

standard.jpg"De manière générale, plus aucun acte ne fait trembler les limites du monde parce que le monde n'a plus de limites. Cela modifie considérablement l'idée qu'on peut se faire de ce qui est "révolutionnaire". Aujourd'hui, les artistes deviennent des figures de l'intégration sociale, des espèces de fétiches de la marchandise, qui non seulement sont assujettis à la société, mais surtout en propagent le mensonge. Dans le marché intégral, il n'y a pas d'exception, sauf pour faire monter les prix. C'est en ce sens que le diagnostic des situationnistes, dès le milieu des années soixante, était juste : on est entré depuis longtemps dans la fin du monde de l'art. Lorsqu'on ne voit plus dans la rue que des "artistes", c'est que le faux, comme dit Debord, est "sans réplique".

Yannick Haenel, François Meyronnnis, Prélude à la délivrance, Gallimard 2009

mercredi, 25 février 2009

Prélude à la délivrance (2)

Giorgione.jpg"Nous plaignons ceux qui ne discernent dans la lecture qu'une "pratique culturelle", comme ils disent ; c'est évidemment tout autre chose : une opération magique, créant autour d'elle son propre élément, l'un des derniers gestes de l'existence où acte et pensée commutent et où, en un éclair, le divin se retrouve."

Yannick Haenel, François Meyronnnis, Prélude à la délivrance, Gallimard 2009

Giorgione, Portrait d'un jeune homme

mardi, 24 février 2009

Prélude à la délivrance (1)

sjff_03_img1177.jpg"Seulement, s'il n'a jamais été facile de voir un dieu, la chose semble aujourd'hui frappée d'interdit. La société gestionnaire n'admet plus que sa gestion : elle organise le maniement des échanges à l'échelle de la planète, et la rotation des stocks, y compris des stocks humains, sans autre souci que celui du chiffre. Elle pose comme axiome que seul mérite d'exister ce qui passe par le resserrement de ses défilés. Le reste, elle le proscrit ; et fait en sorte qu'il n'ait plus lieu, avec l'accord des somnambules qu'elle abaisse sous son joug."

Yannick Haenel, François Meyronnnis, Prélude à la délivrance