lundi, 05 janvier 2009
Faites l'expérience
Faites l'expérience de vous dire sans cesse: j'étais là, je suis là, je serai toujours là, je suis avec moi jusqu'à la fin des temps, le ciel et la terre passeront, mais ma certitude ne passera pas. Le résultat est terrifiant ou comique. À moins de prendre tout ça à la légère, sur la pointe des pieds, de marcher sur l'eau, de voler. Regardez : j'ai l'air d'un boeuf mais je plane, je suis une mouette, un faucon, un héron. Ma vie est dans les fleurs, les marais, les vignes, les vagues. Je migre, je transmigre, je me réincarne au jugé. On m'enterre, je ressuscite ; on m'incinère, mes atomes persistent et se recomposent plus loin. Dans le monde humain, il m'arrive d'attendre longtemps avant de me reconnaître. J'ai des rêves, des attaques, des pressentiments, je fais des rencontres, je suis bien obligé d'admettre que je suis un autre, et soudain me revoilà, c'est plus fort que moi. Ici, il faut que je me parle doucement à mi-voix, comme quelqu'un qui a peur de réveiller des gens qui dorment et qu'il aime.
Ph.S.
Une Vie divine, Gallimard, Folio n°4533
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dimanche, 17 décembre 2006
Gratuit
« Le monde n’ayant aucun sens, autant le considérer comme gratuit. »
Philippe Sollers, Une vie divine
Photo : Desiree Dolron
15:08 Publié dans illuminations | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Sollers, Une vie divine, Photo, littérature, Desiree Dolron
lundi, 18 septembre 2006
Un simple passager de l’éternel retour du Salut
Il fait son travail intense et compliqué de mélodies et de rythmes, il devient un corps-parole, un corps-mélodie, un corps-rythme, de façon à aller, par-delà la mort, dans un monde qu’il se sera fait. Il n’est pas exclu que, pendant son voyage, il tombe sur une déesse « vêtue d’espace », portant au cou un collier de crânes et, autour du buste, des nœuds de serpents. Il n’est pas exclu non plus qu’il apprenne à faire parler et danser les cailloux, les pierres, les rochers. Le voici donc, avec sa poignée d’herbe, allant du profane au sacré.
Pour le retour, il ne va évidemment pas dire, qu’il quitte la vérité pour aller vers la fausseté. Sa formule est délicate et modeste : « Maintenant, je suis seulement ce que je suis. »
Où suis-je ? Qui suis-je ? Un simple passager de l’éternel retour du Salut. Mais oui, du Salut.
Paris, le 30 septembre 118
Philippe Sollers, Une vie divine, fin du livre. D'autres extraits à lire ici
13:30 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Sollers, Une vie divine, Salut