mercredi, 06 juillet 2005
La liberté de penser
"La liberté de penser s'arrête là où commence le droit du travail" : c'est de la nouvelle patronne des patrons, joli non ?
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mardi, 05 juillet 2005
Servitude
Un état totalitaire vraiment "efficient" serait celui dans lequel le tout-puissant comité exécutif des chefs politiques et leur armée de directeurs auraient la haute main sur une population d'esclaves qu'il serait inutile de contraindre, parce qu'ils auraient l'amour de leur servitude.
Aldous Huxley
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Je regarde le ciel clair et profond
Personne encore n'a défini, dans un langage pouvant être compris de ceux-là mêmes qui n'en ont jamais fait l'expérience, ce qu'est l'ennui. Ce que certains appellent l'ennui n'est que de la lassitude; ou bien ce n'est qu'une sorte de malaise; ou bien encore, il s'agit de fatigue. Mais l'ennui, s'il participe en effet de la fatigue, du malaise et de la lassitude, participe de tout cela comme l'eau participe de l'hydrogène et de l'oxygène dont elle se compose. Elle les inclut, sans toutefois leur être semblable.
Si la plupart donnent ainsi à l'ennui un sens restreint et incomplet, quelques rares esprits lui prêtent une signification qui, d'une certaine façon, le transcende: c'est le cas lorsqu'on appelle ennui ce dégoût intime et tout spirituel qu'inspirent la diversité et l'incertitude du monde. Ce qui nous fait bâiller, et qui est la lassitude; ce qui nous fait changer de position, et qui est le malaise; ce qui nous empêche de bouger, et qui est la fatigue - rien de tout cela n'est vraiment l'ennui; mais ce n'est pas non plus le sens profond de la vacuité de toute chose, grâce auquel se libère l'aspiration frustrée, se relève le désir déçu et se forme dans l'âme le germe d'où naîtra le mystique ou le saint.
L'ennui est bien la lassitude du monde, le malaise de se sentir vivre, la fatigue d'avoir déjà vécu; l'ennui est bien, réellement, la sensation charnelle de la vacuité surabondante des choses. Mais plus que tout cela, l'ennui c'est aussi la lassitude d'autres mondes, qu'ils existent ou non; le malaise de devoir vivre, même en étant un autre, même d'une autre manière, même dans un autre monde; la fatigue, non pas seulement d'hier et d'aujourd'hui, mais encore de demain et de l'éternité même, si elle existe - ou du néant, si c'est lui l'éternité.
Ce n'est pas seulement la vacuité des choses et des êtres qui blesse l'âme, quand elle est en proie à l'ennui; c'est aussi la vacuité de quelque chose d'autre, qui n'est ni les choses ni les êtres, c'est la vacuité de l'âme elle-même qui ressent ce vide, qui s'éprouve elle-même comme du vide, et qui, s'y retrouvant, se dégoûte elle-même et se répudie.
L'ennui est la sensation physique du chaos, c'est la sensation que le chaos est tout. Le bâilleur, le maussade, le fatigué se sentent prisonniers d'une étroite cellule. Le dégoûté par l'étroitesse de la vie se sent ligoté dans une cellule plus vaste. Mais l'homme en proie à l'ennui se sent prisonnier d'une vaine liberté, dans une cellule infinie. Sur l'homme qui bâille d'ennui, sur l'homme en proie au malaise ou à la fatigue, les murs de la cellule peuvent s'écrouler, et l'ensevelir. L'homme dégoûté de la petitesse du monde peut voir ses chaînes tomber, et s'enfuir; il peut aussi se désoler de ne pouvoir les briser et, grâce à la douleur, se revivre lui-même sans dégoût. Mais les murs d'une cellule infinie ne peuvent nous ensevelir, parce qu'ils n'existent pas; et nos chaînes ne peuvent pas même nous faire revivre par la douleur, puisque personne ne nous a enchaînés.
Voilà ce que j'éprouve devant la beauté paisible de ce soir qui meurt, impérissablement. Je regarde le ciel clair et profond, où des choses vagues et rosées, telles des ombres de nuages, sont le duvet impalpable d'une vie ailée et lointaine. Je baisse les yeux vers le fleuve, où l'eau, seulement parcourue d'un léger frémissement, semble refléter un bleu venu d'un ciel plus profond. Je lève de nouveau les yeux vers le ciel, où flotte déjà, parmi les teintes vagues qui s'effilochent sans former de lambeaux dans l'air invisible, un ton endolori de blanc éteint, comme si quelque chose aussi dans les choses, là où elles sont plus hautes et plus frustes, connaissait un ennui propre, matériel, une impossibilité d'être ce qu'elles sont, un corps impondérable d'angoisse et de détresse.
Quoi donc? Qu'y a-t-il d'autre, dans l'air profond, que l'air profond lui-même, qui n'est rien? Qu'y a-t-il d'autre dans le ciel qu'une teinte qui ne lui appartient pas? Qu'y a-t-il dans ces traînées vagues, moins que des nuages et dont je doute déjà, qu'y a-t-il de plus que les reflets lumineux, matériellement incidents, d'un soleil déjà déclinant? Dans tout cela, qu'y a-t-il d'autre que moi? Ah, mais l'ennui c'est cela, simplement cela. C'est que dans tout ce qui existe - ciel, terre, univers -, dans tout cela, il n'y ait que moi!
Fernando Pessoa
Texte extrait du recueil Le livre de l'intranquillité
traduit du portugais par Françoise Laye
381 - 28 septembre 1932
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vendredi, 01 juillet 2005
Le pic de la déesse
Parmi ceux qui agitent leur mouchoir en signe d'adieu
Laquelle retire rapidement la main
Pour s'en couvrir les yeux?
Quand les voyageurs se dispersent
Laquelle se tient longuement à la poupe
La jupe flottant comme un nuage bouillonnant?
Les flots
Mugissent...
Murmurent...
De beaux rêves laissent de beaux chagrins
En ce bas monde comme dans le ciel
C'est une loi perpétuelle, mais le coeur
Se métamorphose-t-il vraiment en pierre
Pour attendre les messagers du ciel et
Laisser passer tant de lunes humaines?
Le long des pics qui dominent la rivière Bleue
Le courant de chrysanthèmes d'or et de graines de
troène
Engendre une nouvelle trahison
Mieux vaut pleurer une nuit sur l'épaule de l'amant
Que de s'exposer mille ans, sur le pic
Shu Ting, Juin 1981, sur le Yangtsé
Shu Ting est née en 1952 à Quanzhou, Fujian. Elle a publié quatre recueils de poèmes et un recueil de textes en prose.
14:42 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (1)
Les cerises à l’eau de vie
Voici la recette des cerises à l’eau de vie de Pierre Dac (1893 - 1975)
Voici l'époque où les cerises vont se trouver en abondance sur nos marchés; profitons de leur prix abordable pour préparer de délicieuses cerises à l'eau-de-vie. Pour cette préparation, employez de préférence la cerise anglaise, la Montmorency, la griotte d'Etampes ou la tardive de Saint-Quentin. Enlevez les queues, dénoyautez. Prendre un litre de bonne eau-de-vie à 45° et procédez de la façon suivante : absorber une dizaine de cerises d'un seul coup, boire immédiatement la valeur d'un verre à bordeaux d'eau-de-vie et continuer ainsi jusqu'à épuisement des cerises et de l'eau-de-vie. Cette méthode, qui laisse à la cerise toute sa saveur, évite l'emploi toujours fastidieux des pèse-sirop et des bocaux de verre.
14:00 Publié dans humour | Lien permanent | Commentaires (9)
Carnets de route pour les gourmands
"Prenez un mot prenez-en deux
faites-les cuir’ comme des œufs
prenez un petit bout de sens
puis un grand morceau d’innocence
faites chauffer à petit feu
au petit feu de la technique
versez une sauce énigmatique
saupoudrez de quelques étoiles
poivrez et puis mettez les voiles…"
Raymond Queneau
Sur ce site, des carnets gourmands, recettes, images et écrits...
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