lundi, 04 avril 2005
Les mots sont des lianes d'abordage...
"Les mots sont des lianes d'abordage
à ne saisir que par l'extrémité de leur racine.
Plonge-les dans le coeur du monde
et fouilles-en les vicères :
la matière qui dégorge
est une boue en route vers les étoiles.
L'enveloppe restante, n'est rien d'autre que toi
diminué du mystère de la mort.
Maintenant tu fais partie de ce tout
même si tu répugnes à prononcer ton nom."
Jean-Luc Aribaud
Extrait de :"Passages", Pleine page, Zorba, 2005
pleinepage@pleinepage.com et http://www.pleinepage.com
zorba.edition@tiscali.fr
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Appeler
"La parole appelle, ne nomme pas. Le français le dit : nous ne nommons pas les choses, nous les appelons. Nous les appelons parce qu'elles ne sont pas là, parce que nous ne savons pas leur nom."
"La pensée n'utilise pas les mots, ne cherche pas ses mots. Ce sont les mots qui cherchent, qui traquent la pensée. Nous nous dépouillons des mots en parlant. Celui qui parle, celui qui écrit, c'est un qui jette ses mots comme des outils divinatoires, comme des dés lancés."
Valère Novarina
Ces phrases et les précédentes de Novarina sont extraites d'un texte lumineux et splendide : "Devant la parole". In "Devant la parole" POL 1999. Voir aussi le site :http://www.novarina.com/
08:46 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 03 avril 2005
L'Europe galante, de Paul Morand
1925. Avant de s’enfoncer dans la nuit, l’Europe swingue, se débride : Picasso, Joyce, Stravinski. Morand, l’homme pressé, dévoile dans l’Europe galante une étonnante série de portraits de femmes. Claudel sera choqué. Ecoutons : "Lucie est gonflée, voluptueuse, sociable, succulente à voir et si molle qu’à chaque instant on a l’impression de la posséder". Ou : "Daniel trouvait à la Hollandaise la peau saine et une poitrine difficilement ramenée à la raison". Ou encore : "Et sans se réveiller davantage, me sentant près d’elle, elle me prit dans ses jambes, qu’elle referma aussitôt, dans un réflexe de coquillage". Et encore : "Nous recommençons à danser. Le Séduisant me tient. Je suis soluble dans ses bras". L’Europe galante, c’est un recueil de nouvelles : le style y est vif, alerte, piquant, d’une poésie lunaire ou sarcastique, mais qui fait toujours mouche. Céleste Julie, ce court et cinglant chef d’œuvre, magnifique leçon sur le désir féminin, commence ainsi : "Au-dessus d’un massif de pois de senteur, je la regardais. Elle n’était pas tellement belle. Son visage, d’une charmante polychromie, s’était trop écrasé contre d’autres visages. Mais une bouche, bonne auberge. Des cheveux comme de la musique. Le démon". Tout au long de ces quatorze nouvelles on est emporté par le swing de Morand, témoin son ironie mordante dans Je brûle Moscou, ou pour cause de crise du logement, le narrateur n’arrivera pas à ses fins. Pourtant, tout avait bien commencé : "J’allais recevoir une récompense, et la plus douce, celle qu’on ne mérite pas. Je montais à la rencontre de l’amour". Laissons à Morand la conclusion, en 1970 dans Venises : "La façon d’atterrir dans une époque compte moins que celle dont on en sort ; la vie est un travail lent, une opération à deux, le hasard et soi ; c’est là ce qui donne son tour à l’ouvrage".
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samedi, 02 avril 2005
Le ciel était lisse...
"Le ciel était lisse comme une pierre de lavoir ; le mistral y écrasait du bleu à pleine main ; le soleil giclait de tous les côtés ; les choses n’avaient plus d’ombre, le mystère était là, contre la peau ; ce vent de perdition arrachait les mots aux lèvres et les emportait dans les autres mondes. "
Jean Giono
08:18 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
Première neige
Ce fut vers la fin de décembre que la première neige tomba sur l’Ardenne. Quand Grange se réveilla, un jour blanc et sans âge qui suintait de la terre cotonnait sur le plafond l’ombre des croisées ; mais sa première impression fut moins celle de l’éclairage insolite que d’un suspens anormal du temps : il crut d’abord que son réveil s’était arrêté ; la chambre, la maison entière semblaient planer sur une longue glissade de silence – un silence douillet et sapide de cloître, qui ne s’arrêtait plus Il se leva, vit par la fenêtre la forêt blanche à perte de vue, et se recoucha dans la chambre quiète avec un contentement qui lui faisait cligner les yeux. Le silence respirait autour de lui plus subtil sous cette lumière luxueuse. Le temps faisait halte : pour les habitants du Toit, cette neige un peu fée qui allait fermer les routes ouvrait le temps des grandes vacances.
Julien Gracq, un balcon en forêt
A consulter, un site complet sur Gracq : http://www.jose-corti.fr/auteursfrancais/gracq.html
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vendredi, 01 avril 2005
Des danses mystérieuses
"Qu'est-ce que les mots nous disent à l'intérieur où ils résonnent ? Qu'ils ne sont ni des instruments qui se troquent, ni des outils qu'on prend et qui se jettent, mais qu'ils ont leur mot à dire. Ils en savent sur le langage beaucoup plus que nous. Ils savent qu'ils sont échangés entre les hommes non comme des formules et des slogans mais comme des offrandes et des danses mystérieuses."
Valère Novarina
18:35 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
Un passage
"Nous le savons tous très bien, tout au fond, que l'intérieur est le lieu non du mien, non du moi, mais d'un passage, d'une brèche par où nous saisit un souffle étranger."
Valère Novarina
18:19 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
La fin de l'histoire
"La fin de l'histoire est sans parole"
Valére Novarina
18:07 Publié dans littérature | Lien permanent | Commentaires (0)