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lundi, 13 février 2006

Le jour où le monde bascula...

Ce livre est avant tout l'histoire d'un homme, qui vécut la plus grande partie de sa vie en Europe occidentale, durant la seconde moitié du XXe siècle. Généralement seul, il fut cependant, de loin en loin, en relation avec d'autres hommes. Il vécut en des temps malheureux et troublés. Le pays qui lui avait donné naissance basculait lentement, mais inéluctablement, dans la zone économique des pays moyen-pauvres; fréquemment guettés par la misère, les hommes de sa génération passèrent en outre leur vie dans la solitude et l'amertume. Les sentiments d'amour, de tendresse et de fraternité humaine avaient dans une large mesure disparu; dans leurs rapports mutuels ses contemporains faisaient le plus souvent preuve d'indifférence, voire de cruauté.

 

Au moment de sa disparition, Michel Djerzinski était unanimement considéré comme un biologiste de tout premier plan, et on pensait sérieusement à lui pour le prix Nobel; sa véritable importance ne devait apparaître qu'un peu plus tard.

 

A l'époque où vécut Djerzinski, on considérait le plus souvent la philosophie comme dénuée de toute importance pratique, voire d'objet. En réalité, la vision du monde la plus couramment adoptée, à un moment donné, par les membres d'une société détermine son économie, sa politique et ses moeurs. Les mutations métaphysiques - c'est-à-dire les transformations radicales et globales de la vision du monde adoptée par le plus grand nombre - sont rares dans l'histoire de l'humanité. Par exemple, on peut citer l'apparition du christianisme.

 

Dès lors qu'une mutation métaphysique s'est produite, elle se développe sans rencontrer de résistance jusqu'à ses conséquences ultimes. Elle balaie sans même y prêter attention les systèmes économiques et politiques, les jugements esthétiques, les hiérarchies sociales. Aucune force humaine ne peut interrompre son cours aucune autre force que l'apparition d'une nouvelle mutation métaphysique. On ne peut pas spécialement dire que les mutations métaphysiques s'attaquent aux sociétés affaiblies, déjà sur le déclin. Lorsque le christianisme apparut, l'Empire romain était au faîte de sa puissance; suprêmement organisé, il dominait l'univers connu; sa supériorité technique et militaire était sans analogue; cela dit, il n'avait aucune chance. Lorsque la science moderne apparut, le christianisme médiéval constituait un système complet de compréhension de l'homme et de l'univers; il servait de base au gouvernement des peuples, produisait des connaissances et des oeuvres, décidait de la paix comme de la guerre, organisait la production et la répartition des richesses; rien de tout cela ne devait l'empêcher de s'effondrer. Michel Djerzinski ne fut ni le premier, ni le principal artisan de cette troisième mutation métaphysique, à bien des égards la plus radicale, qui devait ouvrir une période nouvelle dans l'histoire du monde; mais en raison de certaines circonstances, tout à fait particulières, de sa vie, il en fut un des artisans les plus conscients, les plus lucides.

Les particules élémentaires, Prologue, Michel Houellebecq, 1998

Commentaires

Pourquoi ne passes-tu pas un extrait porno-salace de ce livre, Ray ? Quand MH veut jouer à Hubert Selby Jr mais qu'il n'y arrive pas...

Écrit par : Éric Dejaeger | lundi, 13 février 2006

Connais pas HSJ désolé ! Non simplement j'ai re-ouvert les particules, c'est le début que je trouve pas mal, il se trouve qu'il était disponible sur le net, alors voilà, là j'en suis à la page 84 et rien de salace pour le moment ou presque ! (l'amour ? on s'enlace !)

Écrit par : Ray | lundi, 13 février 2006

Tu ne l'avais pas encore lu ? C'est la dernière fois que j'ai eu un MH en main, ces Particules. Je l'ai lu, celui-là. Enfin, tu verras de tes yeux.

A l'occasion, je te scannerai un extrait de Hubert Selby Jr...

Écrit par : Éric Dejaeger | lundi, 13 février 2006

Si si je l'avais lu une fois il y a longtemps, c'est en discutant avec un copain hier soir rencontré dans la rue qui m'en a parlé, que j'ai eu envie de l'ouvrir à nouveau, et voilà, en 80 pages très peu de salace, mais par contre on en apprend beaucoup plus sur la sociologie des années d'après guerre en France (et ailleurs) que dans des tonnes de bouquin de socio (c'est pas pour la ramener mais j'ai fait dans ma lointaine jeunesse des études de socio, je peux comparer) et tout ceci est d'une grande précision, ça ne veut pas dire que je partage les idées du bonhomme, mais il y a là une façon d'envisager le roman (très dégraissée l'écriture, très) et bien différente (à mon avis) de ce qu'on peut lire par ailleurs ! au demeurant pour rebondir (un peu) sur l'autre débat, ce qui compte il me semble c'est l'adéquation entre le fond et la forme, personnellement j'adore Proust tout autant que Carver, Chateaubriand autant que Hammet (enfin je préfère quand même chaque fois le premier que le second : vite une Marseillaise !) et Ok pour Hubert Selby Jr au nom sonore !

Écrit par : Ray | mardi, 14 février 2006

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