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samedi, 24 septembre 2005

Extraits inédits de "Friterie-bar Brunetti" - 9

La Friterie-Bar Brunetti, fondée en 1906 au 9 de la rue Moncey, comme je vous l’ai dit, et dont j’ai entrepris par fantaisie de célébrer ici le souvenir, rapport à mes à-valoir surtout, n’oubliez pas!, occupait dans le quartier de la Guille une position hautement stratégique puisque située à deux pas à peine de la Place du Pont et de son légendaire magasin Prisunic, lui-même ouvert début des années trente sur l’emplacement de la Grande Brasserie Charroin où se retrouvaient alors les enragés du Damier Lyonnais pour de terribles tournois, mais aussi et déjà les marlous à rouflaquettes et casquettes à pont immigrés du Piémont, les zouaves à couteaux des casernements tout proches et quelques Casque d’Or au petit pied en congé des maisons de la rue Turenne, Marignan ou alentour.

La Friterie Brunetti des années soixante qui fut la mienne, c’est de tous ces cocos-bel-œil, manilleurs aux enchères, petites gens à la débrouille, marchands de chansons et coquettes de la barrière qu’ elle a pris le relais avec, en prime, la clientèle assidue et siroteuse des smicards du Prisunic, celle bambocheuse et forte en gueule des chauffeurs de taxis pour qui le zinc tenait le plus souvent lieu de borne et aussi les séfarades tout juste débarqués de Casa ou Tanger, de Tunis et Tabarka, la plupart négociants en tissus chamarés de faux or et lourdes broderies débités au petit métrage ou bradés par coupons entiers dans le clair-obscur d’échoppes étriquées ou alors ciseleurs de bagues, bracelets et pendeloques tarabiscotés en invraisemblables turqueries que lorgnaient avec gourmandise les matrones du coin.

À ce florilège de tous les petits boulots de tous les faubourgs de l’univers il fallait ajouter les arrivants d’Alger, Blida ou Constantine, les Mohamed qui levaient le rideau des premières boucheries halal, les Ali tenant étal d’épices, pistaches, pois chiches et semoule à couscous, d’autres ouvrant des bazars trouve-tout où s’entremêlaient pêle-mêle poêles à paella, tapis de prière, shampoings au henné et tout un fourbi défiant le moindre inventaire, cependant que les plus mal lotis d’entre eux quittaient tôt le matin leur meublé pour s’en aller à pied à l’autre bout de la ville se faire briser l’échine par les gardes-chiourmes de chez Pénnaroya pour le plus grand profit du patronat.

(Extrait de "Friterie-bar Brunetti" : Pierre Autin-Grenier, à paraître le 6 octobre chez l'Arpenteur)

Photo : Robert Doisneau

10:05 Publié dans Inédits | Lien permanent | Commentaires (2)

Commentaires

Il est mignon Music, n'est-il pas ? Quant à son papa, lje trouve que es photos en noir & blanc mûrissent un gars!

Écrit par : Calou | samedi, 24 septembre 2005

Pour changer, la prochaine c'est une photo quand il était enfant

Écrit par : Ray | samedi, 24 septembre 2005

Les commentaires sont fermés.