vendredi, 23 septembre 2005
Extraits inédits de "Friterie-bar Brunetti" - 7
Maintenant écoutez-moi, voici une vérité dont je puis vous assurer pour l’avoir de longtemps éprouvée : on ne voyage bien en fait qu’au café, en compagnie d’un panaché, d’une verte, d’un Cinzano ou d’un petit noir arrosé si vous préférez ; un modeste reginglard de charbonnier ferait d’ailleurs tout aussi bien l’affaire. Table de bois, pichet auquel se réfère la main même si l’on n’a pas soif, chaleur enveloppante de la discrète musique du zinc souvent en sourdine sur le coup des neuf heures du matin, froissement des pages du journal que susurre un vieux de la vieille tout en lisant tandis qu’à ses côtés et l’air réfléchi un autre bourre avec application sa pipe à gros fourneau d’un paquet de gris. Économie de paroles, échanges fugaces, comme en aparté et juste pour dire que le temps va changer ou qu’Ils ont encore augmenté la baguette. Assis un peu à l’écart en équilibre sur un bord de tabouret un carabin révise à la va-vite le dernier cours, s’encourageant pour cela d’un grand crème et d’une bout dorée. La patronne au pas lourd et qu’on imagine presque en robe de chambre et chaussons tant on se sent ici chez soi, vous sert sur un simple signe de tête le verre désiré, une seconde votre écot tinte en tournoyant telle une minuscule toupie dans la soucoupe de fer-blanc ; vous avez fait l’appoint, le compte est bon. Vous pouvez appareiller.
Qu’importe alors le temps qu’il fait sur les boulevards; voyageur sans valise livré à la méditation et à de multiples découvertes, seul, vous explorez la profondeur intime du monde à l’abri des gesticulations insensées du dehors qui sans cesse l’efface au profit de mille grimaces. Posé là, immobile au milieu des petites gens au parler économe dont vous vous faites le silencieux complice, l’air absent dans l’atmosphère feutrée des lieux, avec pour armes et bagages seulement votre blanc sec et un journal sans raison déplié sur la table, vous voici, emporté par le cours de votre rêverie, doucement devenant capitaine de toutes les espérances.
(Extrait de "Friterie-bar Brunetti" : Pierre Autin-Grenier, à paraître le 6 octobre chez l'Arpenteur)
18:50 Publié dans Inédits | Lien permanent | Commentaires (15)
Commentaires
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alors que je ne fréquent pas les troquets à potron-minet moua! Je m'en fous si vous croyez tous qu'il y a du parti pris sous la table, y a qu'un partage: la même vision du monde par le petit bout de la rêverie silencieuse, voilà!
Écrit par : Calou | vendredi, 23 septembre 2005
elle serait pas un peu fayote, la Calou, avé le P.A.G., des foies (gras) ?
Écrit par : J.-J. M. | vendredi, 23 septembre 2005
Comment être fayote d'un fantôme ? T'as pas remarqué JJ que le Pierrot on l'entend plus depuis qu'il a pondu ? Mais Houestcequilest ?
Écrit par : Calou | vendredi, 23 septembre 2005
On se demande bien ce qu'elle fait sous la table, alors qu'elle ne boit pas !
Écrit par : Ray | vendredi, 23 septembre 2005
je m'éclate de rire Ray ! Comme d'hab les vapeurs me suffisent.
Écrit par : Calou | vendredi, 23 septembre 2005
Il ose plus se montrer, mais j'ai quand même réussi à capter sa trogne, là elle arrive, presque tout de suite...
Écrit par : Ray | vendredi, 23 septembre 2005
Qu'est-ce tu dis ? Saaaoûle à table ? La Calou ? Tu plaisantes ! Les vapeurs, qu'elle dit, les vapeurs, tu parles ! Elle vapeur de rien, celle-là, tiens passe-moi le Cairane que j'tête.
Écrit par : J.-J. M. | vendredi, 23 septembre 2005
j'allais dire une grosse cagade, oups... avec ça, vous seriez partie pour la nuit à déblatérer sur... purée, j'ai eu chaud
Écrit par : Calou | vendredi, 23 septembre 2005
"vous seriez partie" ? Houlala, ça frise l'attentat aux mœurs ici ! Bon, et ce Cairane, ça vient ?
Écrit par : J.-J. M. | vendredi, 23 septembre 2005
minute parpaillon, peux pas m'occuper de tout le monde en même temps!
Écrit par : Calou | vendredi, 23 septembre 2005
Mais si Calou, quelle santé !
Écrit par : Ray | vendredi, 23 septembre 2005
Ah oui, c'est vrai, j'avais oublié que P.A.G. était sous la table, sorry Calou, je repasserai !
Écrit par : J.-J. M. | vendredi, 23 septembre 2005
je n'ai jamais rien su refuser aux hommes, c'est mon gros pb. Je peux m'allonger sur votre canapé et vous me dites ce qui cloche ?
Vous y avez cru hein! quelle bande de poivrots...
Écrit par : Calou | vendredi, 23 septembre 2005
Crue ou cuite, moi, perso, j'm'en fous, pourvu qu'on me passe le Cairane ! Kant au canapé, dessus, dessous, c'est pas un blème, et pour la cloche, j'ai un truc qui fait Boum !
Écrit par : J.-J. M. | vendredi, 23 septembre 2005
explosée de rire !
bon, c'est pas tout mais je passais juste 2 secondes car j'ai plein de boulot à me taper pour le site et ça me gave. Je ne sais plus où c'est dit (une photo de Ray) mais sans argent y'a pas de bonheur ou quelque chose du genre, ben c'est généralement faux mais ce soir c'est vrai.
Écrit par : Calou | vendredi, 23 septembre 2005
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