vendredi, 08 mai 2009
Roch-Gérard Salager
Roch-Gérard Salager a publié cinq titres à ce jour : Corps gisant lisse et nu et Paysages d'urgence, chez Jacques Brémond, De voix, de silence et d'eau, Jour de l'an et Quelques aperçus d'un autre territoire aux éditions La Dragonne. Il poursuit une oeuvre très exigeante et originale, très décalée même. Rien ici de facile, d'évident, Roch-Gérard Salager creuse, fouille les mots, l'écriture est extrêment précise, si concentrée qu'elle en acquiert une certaine rondeur, une puissante subtilité, rendue à sa musicalité finalement : La désignation libère ce que le sens concède au monde, toujours en référence à une histoire, des lieux : Est-il vraiment heureux, ou bien simplement vrai, que la mobilité s'apparente à une sorte de tumulte alors que tout suggérait à l'homme de côtoyer la lente patience du lieu ?
"De voix, de silence et d'eau est une promenade littéraire qui nous emmène à Maguelone, mais aussi sur le Canal du Midi, au Pont du Diable près de Saint-Guillem le Désert et à Montpellier. Il est juste d'affirmer que le lieu appartient à l'espace. Du pied des dunes pourtant, lorsqu'il emprunte le chemin carrossable qui conduit aux édifices de Maguelone, le visiteur est saisi du sentiment contraire : ici le lieu commande à l'espace dont il reste solidaire cependant.
Les lieux décrits et visités s'enrichissent au fur et à mesure d'éléments qui s'y rattachent - on est vraiment dans une promenade littéraire - si bien qu'on est toujours là et en même temps ailleurs, dans une histoire, des mythologies, mais aussi une réalité, un vrai regard sur le monde, au fin fond de nous-mêmes finalement.
Louazna remarque que son père se fâche lorsqu'il est photographié ou filmé sur les plateaux du nord de l'Afrique en compagnie des bêtes dont il surveille le pâturage. Sa colère se fonde sur la conviction que la pellicule incarcère un instant arraché à tous les instants du monde et, partant, qu'un maillon irremplaçable fera défaut dans le kaléidoscope universel. Les bergers touaregs, poursuit Louazna, considèrent qu'un instant détourné, pour mince qu'il soit, peut provoquer un désordre cosmique susceptible de contrarier un homme en passe d'améliorer sa condition après bien des efforts, d'un autre sur le point d'acquitter une dette envers lui-même, d'un autre encore tout près d'obtenir les faveurs de la bien-aimée, la miséricorde des pierres, l'eau claire d'une oasis... Cela rejoint sans doute cette observation que Cézanne couche sur le papier d'une lettre adressée à son père. "L'instant du monde que je souhaite peindre ne peut être figé."
00:15 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : roch-gérard salager
Commentaires
Tiens, nous avons des connaissances en commun.
Écrit par : marie | samedi, 09 mai 2009
Si tu le connais, tu le reconnaîtras sans doute là :
http://www.youtube.com/watch?v=5KLgQHlANXM&hl=fr
Écrit par : Ray | samedi, 09 mai 2009
Il y a certes un air de famille mais je pense que Roch est beaucoup plus flegmatique !
Écrit par : marie | lundi, 11 mai 2009
méfions-nous des apparences, c'est un puncheur ! Pour écrire comme il écrit, il faut être un vrai combattant !
Écrit par : Ray | lundi, 11 mai 2009
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