samedi, 26 avril 2008
Je ne pensais même pas à dormir.
Je réservais le sommeil aux chaleurs de la journée, sans quoi elles étaient interminables. Je préférais la nuit, les ombres rares dans les rues. Les dessins peuplaient mes rêves de forêts enneigées, de bricks, de goélettes fendant la mer avec le jusant, de palais baroques, de portes dérobées ouvrant sur l’infini. Je voyageais à travers les cinq continents. Traversant les époques, soulevant des rideaux de théâtre, ourdissant des complots, déjouant des embuscades. De ces voyages, je ressortais anéanti mais apaisé. Ils continuaient pendant la journée et les gestes du quotidien s’en trouvaient métamorphosés. Je ne ressentais aucune pesanteur dans les choses. Peut-être avais-je atteint cet état mystérieux, insondable, ce trouble léger qu’on appelle bonheur. Cet état, cette limite plutôt, qui était ma quête, que j’étais venu chercher ici au bout du monde, que tant d’autres avant moi avaient poursuivi et si peu atteint, cette fêlure dans le réel qui fait oublier la rumeur des jours pour nous plonger transis dans une extase fragile et passagère que l’on cherche à recréer sans cesse sans y parvenir souvent. Et il me semblait l’avoir domestiqué ici, m’en être fait un ami pendant ces nuits tropicales où j’étais si heureux que je ne pensais même pas à dormir.
Raymond Alcovère, extrait de "Solaire", roman en cours d'écriture
00:18 Publié dans En cours d'écriture | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : le bonheur est un drôle de serpent, raymond alcovère
Commentaires
L'enchantement continue...
Écrit par : gazelle | samedi, 26 avril 2008
Un passage largement prometteur... Attendons avec patience la sortie de ce "abébé"...
3 bises
Écrit par : christian JULIA | dimanche, 27 avril 2008
Toutes ces lectures de "Solaire"me font penser à un puzzle. Chaque extrait me donne un morceau du tableau final; chaque histoire à part entière, donne à voir sa propre vie, où toi seul connaît sa place dans le tout. Cela est une judicieuse forme de communication pré-promotionnelle : distiller au compte-gouttes. C'est aussi pour moi une intéressante leçon d'écriture.
Avec quelques heures d'avance sur le 1er mai, je te souhaite beaucoup de bonheur avec ce roman et un grand succès à sa parution.
Hélène O.
Écrit par : Hélène | mercredi, 30 avril 2008
Oui c'est surtout au gré de mon humeur, et parfois de passages qui viennent d'être terminés. C'est un peu aussi comme dans un film où les scènes ne sont jamais tournées dans l'ordre ! Et vive le 1 er mai ! Grosses bises !
Écrit par : Ray | mercredi, 30 avril 2008
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