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jeudi, 02 février 2006

Voix

medium_goya.jpgC'est une bouche cachée dans le noir de la nuit qui parle bas et invite, par-delà les rêves incertains, à la révolte. Une voix de velours violet frémissant dans les plis du vent, semblable à celles de ces statues qu'on recouvrait jadis d'un voile le mercredi des Cendres et dont les forces mystérieuses nous fascinaient jusqu'au vertige. Avant de quitter le sommeil pour les prémices de l'aube, embrasse passionnément cette bouche; et cette voix, qu'elle vibre en ton coeur de plaisir et de défi tout le long du jour si tu tiens à gagner la paix du soir sans avoir mis genou en terre.
Tu n'auras plus rien à redouter ainsi, ni le joug humiliant des possédants ni l'entrave de leurs lois à ta liberté; le tourment des heures impossibles à vivre aura beau lâcher contre toi tous ses chiens, la meute n'atteindra ta conscience ni n'ébranlera ta volonté. Tu pourras aller debout dans le tohu-bohu du monde sans abdiquer rien de tes espérances, le clavecin des oiseaux dans les arbres accompagnera tes pas et le chemin sera tout entier tracé par le granit du pavé. Mais cette bouche qui murmure dans le noir, es-tu prêt à l'écouter? Cette voix violette de colère contre les mille complots de l'ordre, es-tu vraiment décidé à l'entendre ?

Pierre Autin-Grenier, Les radis bleus

21:05 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (4)

Commentaires

Cette toile... un très beau souvenir de lecture (en plus de ces merveilleux radis bleus, of course!) "Requiem pour un paysan espagnol" de Ramon Sender (http://perso.wanadoo.fr/calounet/resumes_livres/sender_resume/sender_requiem.htm).

Écrit par : Calou | jeudi, 02 février 2006

Le corps de celui qui va mourir embrase toute la toile. On suppose qu'il y a une lampe. Elle n'est pas visible.Ici, le jaune de son pantalon et là, le blanc laiteux intense de son chemisier jettent un tapis de lumière sur le peloton qui sort des ténèbres. La lumière est aveuglante,monte au ciel gorgé d'encre de deuil. Elle embrase la cathédrale. Le sang coule par terre mais qui triomphe, où est le feu? Au bout du canon ou dans les yeux de celui qui fixe la mort, les bras faisant le"V" de la victoire?
Salut, Goya!

Écrit par : Bona | vendredi, 03 février 2006

Je ne sais pas si tu as lu le commentaire de Alina sur La Boétie, il était très fort en fait (j'ai répondu en faisant l'imbécile comme d'habitude !) mais je le recopie là parce que ça va tout à fait avec ce que tu dis !
"Le serviteur volontaire peut encore avoir accès au royaume. D'autant plus s'il consent à sa servitude par amour. Celui qui asservit en est exclu.

"Le "Royaume des cieux" est un état du coeur". (Nietzsche)

Le moins roi n'est pas celui qu'il y parait.

Ceci est valable dans la vie privée, mais aussi dans la vie sociale. Celui qui se fait exploiter pour pouvoir élever ses enfants a un coeur en meilleur "état" que celui qui l'exploite.

Et quand il trouve les moyens et la force de se libérer, eh bien il peut continuer à se nourrir du pain qu'il a jusque là fait pour le maître, alors que le maître-vampire n'a plus qu'à rester sur sa faim... ou en trouver d'autres à abuser, sans jamais dans ce cercle vicieux pouvoir gagner la paix.

Un maître est un mort.
Un serviteur est un malade.
Un homme libre, celui qui n'a pas souhaité devenir à son tour vampire (bourgeois, pour faire écho à la note ci-dessus) est en bonne santé."

Écrit par : Ray | vendredi, 03 février 2006

C'est juste!
Le fusillé, c'est l'incarnation de la lumière, une apparition, une sorte d'épiphanie, selon l'étymologie grecque!
Merci amigo!

Écrit par : Bona | vendredi, 03 février 2006

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