vendredi, 19 octobre 2007
Les écrivains sont étranges
François Mauriac
Il écrit son « Bloc-Notes » assis sur un petit lit, Mauriac, papier sur ses genoux, à l’écoute. Il est incroyablement insulté à longueur de temps, et il y répond par des fulgurations et des sarcasmes (ressemblance avec Voltaire, après tout). Il est très drôle. Méchant ? Mais non, exact. Sa voix cassée surgit, très jeune, la flèche part, il se fait rire lui-même, il met sa main gauche devant sa bouche. Homosexuel embusqué ? On l’a dit, en me demandant souvent, une lueur dans l’œil, si à mon égard, etc. Faribole. Mauriac était très intelligent et généreux, voilà tout. Fondamentalement bon. Beaucoup d’oreille (Mozart), une sainte horreur de la violence et de sa justification, quelle qu’elle soit. Les sujets abordés, après les manipulations, les mensonges et les hypocrisies de l’actualité ? Proust, encore lui, et puis Pascal, Chateaubriand, Rimbaud. Les écrivains sont étranges : avec Ponge, je suis brusquement contemporain de Démocrite, d’Epicure, de Lautréamont, de Mallarmé. Avec Mauriac, de saint Augustin, des « Pensées », d’« Une saison en enfer ».
Philippe Sollers, extrait de "Un Vrai roman, Mémoires" à paraître chez Plon le 25 octobre
13:50 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Philippe Sollers, Un Vrai roman
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