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samedi, 10 décembre 2005

Les velours de Christine

Dans les velours de Christine, on déplace des chaises qui sont des flûtes.

Christine est sur son croissant. Elle dîne d'un bouton de bottine et sa jolie tête dandine.

On déplace aussi des étuis. Ce sont les étuis de ces chaises effilées, aux trous inégaux et qui luisent.

Et l'on comprend qu'un conducteur de piano, en cotte de maille, descende, à toute vapeur, de la partition rigide de ses montagnes.

C'est pour lui qu'on a déplacé les chaises si fines et leurs volumineux étuis.

Il donne à Christine la distraite, à Christine perdant son peton, un récital assez narquois de saute-mouton.

Chaises volatiles, étuis envolés, saluez cette apothéose : Christine de papier tombant en mille morceaux sur les bosses effervescentes du piano, tandis que le conducteur déchaussé s'égare, dans les tubulures réfrigérantes de la nuit : un concerto pour chaises et étuis.

Paul Colinet (1898-1957)

Extrait de « Œuvres 1 », s.l., Éditions Lebeer Hossmann, 1980, 74.

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