mercredi, 30 décembre 2020
Paysage par temps calme
On peut passer des dizaines de fois devant un tableau de Poussin et ne rien voir. A son ami Chantelou : "Les choses esquelles il y a de la perfection ne se doivent pas voir à la hâte, mais avec temps, jugement et intelligence. Il faut user des mêmes moyens à les bien juger comme à les bien faire". L’émotion tisse son œuvre. L’espace est baigné d’une douce lumière, transfiguré, présence de la volupté, mais aussi de la volonté farouche des hommes, touches graciles de vert dans le jade du ciel. Une perfection qu’on devinait confusément est là, manifeste, sur la toile. Lumière romaine, tour à tour triomphante et souple, sensualité des corps, justes, voluptueux, jamais idéalisés, tout précise l’harmonie, la souplesse, l’éternel retour...
Cette œuvre : Paysage par temps calme. Le bleu de l’eau et des météores se contemplent, enserrent le paysage, un rêve entre les deux, lui aussi dédoublé par son reflet. Sinon presque rien, des animaux paisibles, la montagne se fond dans l’architecture des nuages, les feuilles de l’arbre sur la droite s’effilochent irréelles, ténues, graciles, les nuages s’envolent vers le haut du ciel, la sensation de calme est rassemblée, ramenée partout, innervée.
Un homme au premier plan s’appuie sur une canne, près de lui un chien mais leur regard flotte indifférent à cette beauté, ils en sont tellement pénétrés qu’ils n’ont pas besoin de la regarder. Le mouvement de leur corps est le lever de rideau de la scène. D’autres personnages, minuscules, des cavaliers, l’un d’entre eux lance sa monture à toute vitesse, il va quitter le tableau, il n’a pas place ici, son départ imminent le montre, la tranquillité va reprendre sa place.
Partout dans l’œuvre de Poussin, ces nuances de teintes qui sculptent le paysage, répandues sur les contours, cieux déchirés, adamantins, douceur infinie des regards, apaisante. Souvent, les personnages sont pris de frénésie, c’est l’orage, le grand vent de l’Histoire, la Bible, rien n’échappe à ce déferlement. Toujours les météores, les nuées décrivent l’action, les sentiments, la palette est infinie. Son but, la délectation, la sensualité pure, l’arrondi des corps, cette chair que l’on respire. Plus on regarde un tableau de Poussin, plus on y décèle d’harmonie, plus la vue s’éclaire, prend de l’expansion, devient assurée. La fièvre subtile qui se dégage de la composition gagne le spectateur.
Ainsi dans le Paysage avec les funérailles de Phocion, la lumière du soir est posée subreptice, dans une fureur printanière, multitude des plans entrelacés. Un arbre torturé berce sa palme avec indolence. A un moment il y a résonance entre la composition, le motif, les émotions décrites. Des tableaux comme des opéras. Une œuvre ailée.
Raymond Alcovère, Le Sourire de Cézanne, roman, éditions n & b, 2007, extrait
10:10 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : le sourire de cézanne, poussin
samedi, 23 janvier 2010
Poussin l'ouverture
On peut passer des dizaines de fois devant un tableau de Poussin et ne rien voir. A son ami Chantelou : "Les choses esquelles il y a de la perfection ne se doivent pas voir à la hâte, mais avec temps, jugement et intelligence. Il faut user des mêmes moyens à les bien juger comme à les bien faire". L’émotion tisse son œuvre. L’espace est baigné d’une douce lumière, transfiguré, présence de la volupté, mais aussi de la volonté farouche des hommes, touches graciles de vert dans le jade du ciel. Une perfection qu’on devinait confusément est là, manifeste, sur la toile. Lumière romaine, tour à tour triomphante et souple, sensualité des corps, justes, voluptueux, jamais idéalisés, tout précise l’harmonie, la souplesse, l’éternel retour...
Cette œuvre : Le temps calme. Le bleu de l’eau et des météores se contemplent, enserrent le paysage, un rêve entre les deux, lui aussi dédoublé par son reflet. Sinon presque rien, des animaux paisibles, la montagne se fond dans l’architecture des nuages, les feuilles de l’arbre sur la droite s’effilochent irréelles, ténues, graciles, les nuages s’envolent vers le haut du ciel, la sensation de calme est rassemblée, ramenée partout, innervée.
Un homme au premier plan s’appuie sur une canne, près de lui un chien mais leur regard flotte indifférent à cette beauté, ils en sont tellement pénétrés qu’ils n’ont pas besoin de la regarder. Le mouvement de leur corps est le lever de rideau de la scène. D’autres personnages, minuscules, des cavaliers, l’un d’entre eux lance sa monture à toute vitesse, il va quitter le tableau, il n’a pas place ici, son départ imminent le montre, la tranquillité va reprendre sa place.
Partout dans l’œuvre de Poussin, ces nuances de teintes qui sculptent le paysage, répandues sur les contours, cieux déchirés, adamantins, douceur infinie des regards, apaisante. Souvent, les personnages sont pris de frénésie, c’est l’orage, le grand vent de l’Histoire, la Bible, rien n’échappe à ce déferlement. Toujours les météores, les nuées décrivent l’action, les sentiments, la palette est infinie. Son but, la délectation, la sensualité pure, l’arrondi des corps, cette chair que l’on respire. Plus on regarde un tableau de Poussin, plus on y décèle d’harmonie, plus la vue s’éclaire, prend de l’expansion, devient assurée. La fièvre subtile qui se dégage de la composition gagne le spectateur.
Ainsi dans le Paysage avec les funérailles de Phocion, la lumière du soir est posée subreptice, dans une fureur printanière, multitude des plans entrelacés. Un arbre torturé berce sa palme avec indolence. A un moment il y a résonance entre la composition, le motif, les émotions décrites. Des tableaux comme des opéras. Une œuvre ailée.
Raymond Alcovère, Le Sourire de Cézanne, éditions n & b, 2007, extrait
00:18 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : le sourire de cézanne, poussin
lundi, 14 septembre 2009
Les climats influent plus ou moins sur le goût des peuples
Les climats influent plus ou moins sur le goût des peuples. En Grèce, par exemple, tout est suave, tout est adouci, tout est plein de calme dans la nature comme dans les écrits des anciens. On conçoit presque comment l'architecture du Parthénon a des proportions si heureuses comment la sculpture antique est si peu tourmentée, si paisible, si simple, lorsqu'on a vu le ciel pur et les paysages gracieux d'Athènes, de Gorinthe et de Flonie. Dans cette patrie des Muses la nature ne conseille point les écarts, elle tend au contraire à ramener l'esprit à l'amour des choses uniformes et harmonieuses.
Chateaubriand, Itinéraire de Paris à Jerusalem
Poussin, Paysage avec Diane et Orion
00:10 Publié dans Grands textes | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : chateaubriand, poussin
lundi, 03 novembre 2008
Diogène jetant son écuelle
L’écuelle était le seul objet usuel de Diogène. Comme les moines zen, il la transportait partout avec lui pour manger et pour boire. Jusqu’au jour où il vit un enfant boire à la fontaine dans ses deux mains en creux. Il jeta alors l’écuelle – luxe inutile. Nicolas Poussin l’a représenté en 1648.
23:05 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : diogène, poussin
jeudi, 16 octobre 2008
Le Temps calme
Cette œuvre : Le temps calme. Le bleu de l’eau et des météores se contemplent, enserrent le paysage, un rêve entre les deux, lui aussi dédoublé par son reflet. Sinon presque rien, des animaux paisibles, la montagne se fond dans l’architecture des nuages, les feuilles de l’arbre sur la droite s’effilochent irréelles, ténues, graciles. Les nuages s’envolent, la sensation de calme est rassemblée, ramenée partout, innervée.
Un homme au premier plan s’appuie sur une canne, près de lui un chien, mais leur regard flotte indifférent à cette beauté. Ils en sont tellement pénétrés qu’ils n’ont pas besoin de la regarder. Le mouvement de leur corps est le lever de rideau de la scène. D’autres personnages, minuscules, des cavaliers. L’un d’entre eux lance sa monture à toute vitesse, il va quitter le tableau, il n’a pas place ici, son départ imminent le montre. La tranquillité va reprendre sa place.
Partout dans l’œuvre de Poussin, ces nuances de teintes qui sculptent le paysage, répandues sur les contours, cieux déchirés, adamantins, douceur infinie des regards, apaisante. Souvent, les personnages sont pris de frénésie. C’est l’orage, le grand vent de l’Histoire, la Bible. Rien n’échappe à ce déferlement. Toujours les météores, les nuées décrivent l’action, les sentiments. La palette est infinie. Son but, la délectation, la sensualité pure, l’arrondi des corps. Cette chair que l’on respire. Plus on regarde un tableau de Poussin, plus on y décèle d’harmonie. Plus la vue s’éclaire, prend de l’expansion, devient assurée. La fièvre subtile qui se dégage de la composition gagne le spectateur.
Raymond Alcovère, extrait du roman "Le Sourire de Cézanne"
Nicolas Poussin, Le temps calme
00:21 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, art, peinture, cézanne, poussin, le temps calme, le sourire de cézanne
mercredi, 11 juillet 2007
Plus on regarde un tableau de Poussin...
Partout dans l’œuvre de Poussin, ces nuances de teintes qui sculptent le paysage, répandues sur les contours, cieux déchirés, adamantins, douceur infinie des regards, apaisante. Souvent, les personnages sont pris de frénésie. C’est l’orage, le grand vent de l’Histoire, la Bible. Rien n’échappe à ce déferlement. Toujours les météores, les nuées décrivent l’action, les sentiments. La palette est infinie. Son but, la délectation, la sensualité pure, l’arrondi des corps. Cette chair que l’on respire. Plus on regarde un tableau de Poussin, plus on y décèle d’harmonie. Plus la vue s’éclaire, prend de l’expansion, devient assurée. La fièvre subtile qui se dégage de la composition gagne le spectateur.
Raymond Alcovère, extrait du roman "Le Sourire de Cézanne", n & b éditions
Poussin, Paysage avec Orphée et Eurydice
11:05 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Le sourire de Cézanne, Poussin
jeudi, 24 mai 2007
L'harmonie chez Poussin
Voir c’est capter l’esprit du monde, le sensible. Peindre, saisir du regard l’ensemble, le devenir. Ce sera la vibration chez Cézanne, l’amour ingénu chez Chagall, la sensualité, sa finesse chez Titien, la compassion chez Greco, l’harmonie chez Poussin. Regard qui perce l’univers, trouve le lien, le point nodal. Rembrandt l’ombre, Caravage la rage, Fragonard la volupté. Cézanne la plénitude.
(Extrait de "Le Sourire de Cézanne")
Raymond Alcovère, n & b éditions, 2007
Nicolas Poussin : "Le onzième Travaux d'Hercule"
03:10 Publié dans Le Sourire de Cézanne | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : art, littérature, Raymond Alcovère, peinture, Le sourire de Cézanne, Poussin
mardi, 10 octobre 2006
Les choses esquelles il y a de la perfection
On peut passer des dizaines de fois devant un tableau de Poussin et ne rien voir. A son ami Chantelou : Les choses esquelles il y a de la perfection ne se doivent pas voir à la hâte, mais avec temps, jugement et intelligence. Il faut user des mêmes moyens à les bien juger comme à les bien faire. L’émotion tisse son œuvre. L’espace est baigné d’une douce lumière, transfiguré, présence de la volupté, mais aussi de la volonté farouche des hommes, touches graciles de vert dans le jade du ciel. Une perfection qu’on devinait confusément est là, manifeste, sur la toile. Lumière romaine, tour à tour triomphante et souple, sensualité des corps, justes, voluptueux, jamais idéalisés, tout précise l’harmonie, la justesse, l’éternel retour...
Extrait du roman : Le sourire de Cézanne, à paraître mai 2007, N & B éditions.
09:12 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature, art, Poussin, Le sourire de Cézanne