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mardi, 24 février 2015

Dico de bord (extrait 5)

jean gabin maigret affaire saint fiacre 1959.JPGDico de bord, suite, cinquième extrait :
Maigret (Commissaire)
Magnifique personnage, la plus belle création de Simenon : Il est massif, placide, entêté, rugueux parfois mais détaché, on dirait qu’il survole les situations ; on croirait qu’il rêve. Pourtant il n’arrête pas de réfléchir, de sentir ; son quotidien c’est le tragique, la bassesse de l’existence ; lui, c’est un bloc, une montagne ; il trimballe dans tout Paris sa carrure massive, faussement débonnaire, la pipe à la bouche. Sa méthode, c’est l’imprégnation, dans les rues, les bistrots, les loges de concierge. Il s’insinue, renifle, met ses pas dans ceux de la victime, il cherche pourquoi elle a pu être l’objet de la haine ou de la vengeance des autres. On plonge dans le Paris de l’entre-deux guerres ou de l’immédiat après-guerre, qu’il nous fait visiter de son allure de promeneur nonchalant. C’est une espèce de anti-héros, décalé en apparence, avec sa femme dans l’ombre, les enfants qu’ils n’ont pas eus, et son amour pour les déshérités ; il est capable de tricher devant la loi pour protéger les faibles et les innocents quand ils sont menacés. Bien sûr il est désabusé, mais son empathie est la plus forte ; elle lui permet de comprendre les gens, leurs mobiles, leurs faiblesses et de dénouer, même si le plus souvent c’est trop tard. Et puis il y a ce talent inouï de Simenon dans tous ses romans ; en quelques lignes, les premières, il plante le décor, l’ambiance, et il n’y aura pas de relâchement jusqu’au bout : « C’était un de ces mois de mai exceptionnels comme on n’en connaît que deux ou trois dans sa vie et qui ont la luminosité, le goût, l’odeur des souvenirs d’enfance. » (Maigret et les vieillards).
Raymond Alcovère, à paraître

dimanche, 06 janvier 2013

Maigret

12_lesoublies_montage.jpgIl est massif, placide, entêté, rugueux parfois mais détaché, on dirait qu’il survole les situations ; il n’est pas vraiment là, on croirait qu’il rêve ; pourtant son quotidien c’est le tragique, la bassesse de l’existence, mais lui c’est un bloc, une montagne, il trimballe dans tout Paris son allure de promeneur, la pipe à la bouche. Son truc numéro un c’est l’imprégnation, les rues, les bistrots, les loges de concierge. Un commissaire qui fait le boulot d’un inspecteur, aujourd’hui ce ne serait plus possible, il s’agit bien d’un monde révolu. 
Mais quel charme, ce Paris de l’entre-deux guerres ou de l’immédiat après-guerre, qu’il nous fait traverser mieux que quiconque. Simenon a campé là un des personnages les plus attachants de notre littérature, avec sa femme dans son ombre, l'absence d’enfants, et son amour pour les déshérités ; il est capable de tricher devant la loi pour protéger les faibles et les innocents quand ils sont menacés. 
Et puis il y a ce talent inouï de Simenon dans tous ses romans ; en quelques lignes, les premières, il plante le décor, l’ambiance, et il n’y aura pas un seul instant de relâchement jusqu’au bout : « C’était un de ces mois de mai exceptionnels comme on n’en connaît que deux ou trois dans sa vie et qui ont la luminosité, le goût, l’odeur des souvenirs d’enfance. » (incipit de Maigret et les vieillards).

Raymond Alcovère

Article paru dans le Magazine "Autour des auteurs" n° 29, septembre 2012

lundi, 04 avril 2011

Maigret se défend

Souplex0003.JPGAh, Simenon, quand même... Longtemps que je n'avais pas lu un Maigret. Me suis régalé avec ce "Maigret se défend". La situation est inversée : Le commissaire, à trois ans de la retraite, est victime d'une machination. Il doit se défendre. L'enquête qu'il va mener a pour but de le blanchir. Le roman est intéressant, écrit en 1963, on y voit apparaître les nouvelles méthodes de la police ; Maigret, lui, se plaçant plutôt du côté des anciennes. Le portrait du jeune préfet de police est saisissant et tout à fait actuel d'ailleurs. Ainsi on voit deux mondes cohabiter, et c'est sur le terrain, comme d'habitude, que Maigret, fidèles à ses méthodes, retrouvera le chemin de la vérité. Après avoir douté, hésité avant de se  battre. On savoure l'ironie, toujours présente chez Simenon, la justesse du style et des dialogues, et le portrait d'une époque en train de disparaître, définitivement...