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dimanche, 18 décembre 2022

Comédie humaine

DoublesC’est au purgatoire, au milieu d’un paysage froid et désolé, entouré de brouillard. À flanc de montagne, dans un chalet vétuste, près de la cheminée, Alexandre Dumas, Stendhal et Marcel Proust, attablés, devisent. Une bouteille d’eau de vie de poire circule. Proust n’en prend pas, il n’aime que la bière.
— Allons les amis, ne faites pas grise mine, lance Dumas ! Certes, ce séjour ne comporte pas que des agréments, mais songez à la félicité éternelle qui nous attend !
Son visage est en mouvement, s’anime comme personne quand il parle.
— Il reste une inconnue, et elle est de taille, reprend-il, pour combien de temps sommes-nous encore ici ? En attendant, l’auberge n’est pas si mauvaise, j’en ai connu de pires !
Il sourit en regardant Proust.
— Et puis nos conversations sont un fameux divertissement ! On n’a pas si souvent l’occasion de causer avec des gens vraiment intelligents. L’intelligence est aussi rare que le bonheur !
Raymond Alcovère, début de la nouvelle "Comédie humaine", extraite du recueil "Doubles", vient de paraître.
Commande auprès de l'éditeur :
138 pages au format 10x15 ; 9 € (3,5 € de port ; prix forfaitaire quel que soit le nombre d'exemplaires)
Je dispose également d'exemplaires si vous habitez Montpellier.

14:35 Publié dans Doubles, Nouvelle | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : doubles

mercredi, 14 décembre 2022

Être inutile et tranquille définitivement (À Pierre Autin-Grenier)

846248063.jpgC’était le mois de juin. On avait mangé dehors. Nos amis partis, on s’est retrouvés, Elena et moi, assis dans le jardin, à seulement goûter le silence. Ensuite, on est montés et on a fait l’amour sans échanger un mot, comme dans un rituel paisible et dérangeant. Elle s’est endormie, puis je suis redescendu. J’ai tout d’un coup ressenti un immense vide.

C’est ce soir-là que je suis parti. Ce qui nous avait rapprochés, Elena et moi, notre désir de liberté, et ces deux ans de vie commune n’avaient fait que le conforter. Elle et moi on le savait depuis le début, l’histoire pouvait et devait s’arrêter d’un moment à l’autre, on était tous les deux indépendants.

Je ne ressentais pas d’émotion particulière, sinon un sentiment de solitude, mais je m’y étais habitué, avec le temps.

Je lui écrivis une lettre, courte mais limpide. J’éprouvais un certain plaisir à voir se dérouler les arguments sur le papier. Jamais je n’avais vécu aussi longtemps avec une femme, c’était la raison de mon désir d’évasion. Pour le reste, peu de choses à lui dire. Une règle tacite entre nous : ne jamais évoquer le passé.

J’ai toujours aimé les situations nettes, détesté les adieux dans les gares. Je lui demandai de venir chercher mes affaires en son absence. Pourquoi pas, si c’est ta volonté, me répondit-elle. Aucune trace chez elle d’impatience ni de ressentiment. Mon amour-propre que je n’attendais pas en si bonne place, reçut sa première pique. Puis, par cette habitude absurde de raisonner qui ne me quitte jamais, j’en conclus à une certaine élasticité du réel, quoiqu’on pense.

Les jours ont passé, un doigt sur les lèvres. À chaque circonstance qui nous mettait en relation, elle affichait la même tempérance, une parfaite urbanité. Au lieu de me rassurer, cette attitude m’exaspérait.

Raymond Alcovère, début de la nouvelle, extraite du recueil Doubles, vient de paraître.
Commande auprès de l'éditeur :
138 pages au format 10x15 ; 9 € (3,5 € de port ; prix forfaitaire quel que soit le nombre d'exemplaires)
Je dispose également d'exemplaires si vous habitez Montpellier.

12:37 Publié dans Doubles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : doubles

vendredi, 09 décembre 2022

La nuit, avec ses yeux de masque africain, plombe le ciel

Dan Hecho.jpgLa nuit, avec ses yeux de masque africain, plombe le ciel. Ville fleuve, embuée dans son liquide initial. Réalité floue, organique...

Antonio Vivaldi, seul à la pointe de la Salute, rêve. Femmes allongées, lascives. Corps huilés. Entremêlements. Anna Giro trône, au milieu de ce harem. Vibrante, luisante, épanouie. Elle danse, effrontée, provocante. Antonio est là, près d’elle. D’un geste, elle l’empêche d’approcher. Bientôt il va l’entourer. Lui, le prêtre roux, au visage si fin, si frêle en apparence. Amant incomparable. Ses doigts sont des caresses. Elle s’envole. L’air épouse ses formes.

Quand il la voit, il entend la musique, elle s’écrit. Staccato, bassons, ombres boisées, legato, violoncelles, pizzicato. L’orchestre se déchaîne. Elle ne cesse de tourner. Son rire tinte comme du verre brisé. Ses gestes, furtifs, accomplis, parlent une langue muette : abandon, luxure, jouissance. Elle sera un jouet entre mes mains tout à l’heure, elle joue à donner cette illusion. La netteté d’esprit cause aussi la netteté de la passion ; c’est pourquoi un esprit grand et net aime avec ardeur, et il voit distinctement ce qu’il aime.

Raymond Alcovère, début de la nouvelle "Tempo impetuoso d'estate", extraite du recueil Doubles, vient de paraître.
Commande auprès de l'éditeur :
138 pages au format 10x15 ; 9 € (3,5 € de port ; prix forfaitaire quel que soit le nombre d'exemplaires)
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Photo de Dan Hecho

15:55 Publié dans Doubles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : doubles, dan hecho

mercredi, 07 décembre 2022

Partir

doublesPartir, en bateau, découvrir des aurores bleues, jaune pale, des matins calmes ou bouillonnants, les odeurs de rouille des ports abandonnés, me saouler dans des bars avec des filles faciles et puis partir toujours, pour pouvoir revenir, aimer à la folie la chaleur des nuits d’hiver dans les ports, et encore ce mouvement incessant des bateaux, trépidation, effluves, oublier, oublier le temps, juste une aurore nouvelle au bout du chemin avec l’horizon bleuté et la lumière mouillée du grand large. M’arrêter à Mindelo avec ses squares rectilignes et ses bateaux rouillés, abandonnés au milieu de la rade et les bars, boire du rhum jusqu’à ne plus rien voir, et penser que le monde m’appartient. Voilà ce que j’ai aimé, choisi. Tout plutôt qu’une vie régulière à terre où demain ressemble à aujourd’hui, où l’horizon est borné, les humains prévisibles, le mystère récurrent. En mer, il y a toujours un après, ce grand vent du large qui balaie tout, le sentiment cosmique de la vie. La terre ferme refroidit les hommes, les rend inaptes à vivre, la mer libère de tout, elle n’enferme rien, plus loin on peut toujours rêver une île inconnue, le déchaînement d’une tempête, une aurore boréale, une lumière étale, l’envol des fous de Bassan, un havre de paix. Les ports ne sont pas sur terre mais regardent dehors. Ils ne sont là que pour partir.
Raymond Alcovère, début de la première nouvelle (Strongyle) du recueil Doubles, vient de paraître.
Commande auprès de l'éditeur :
138 pages au format 10x15 ; 9 € (3,5 € de port ; prix forfaitaire quel que soit le nombre d'exemplaires)
Je dispose également d'exemplaires si vous habitez Montpellier.
Photo de Sakari Kangasmata

20:42 Publié dans Doubles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : doubles

samedi, 03 décembre 2022

Doubles : le sommaire

couverture  +  4ème Doubles.jpgVient de paraître : Doubles, recueil de nouvelles.
Sommaire :
• Strongyle
• Ricardo Almotasim
• Comédie humaine
• Le Mystère des cathédrales
• Un lieutenant de Garibaldi
• L’espace s’est ouvert
• Cave amantem
• Ça n’arrive jamais
• À travers le corps
• Le Diamant du boa
• Wandering chief
• Des fourmis grouillent
• Tempo impetuoso d’estate
• La solitude des musées de province, les après-midi de semaine
• Si tu le souhaites bien sûr…
• Ça ne te dérange pas ?
• La vie des marionnettes
• Comment craquer (une allumette)
• Être inutile et tranquille définitivement
• Le monde n’est pas si réel
Commande auprès de l'éditeur :
138 pages au format 10x15 ; 9 € (3,5 € de port ; prix forfaitaire quel que soit le nombre d'exemplaires)
Je dispose également d'exemplaires si vous habitez Montpellier.

17:25 Publié dans Doubles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : doubles